Le Grenelle de l’environnement : conséquences <strong>et</strong> mesures pratiquesLutte biologique contre les acariens phytophages <strong>et</strong> les thripsLes auxiliaires acariphages majeurs appartiennent à la famille des Phytoseiidae qui comprend àce jour plus de deux mille espèces décrites (De Moraes <strong>et</strong> al., 2004). Seules quelques-unesd’entre elles sont considérées comme jouant un rôle dans la lutte contre les acariensphytophages de la vigne en tant que prédateurs de protection. Il s’agit de Typhlodromus pyriScheuten (majoritaire dans tous les vignobles sauf ceux du pourtour méditerranéen, photo 3),Kampimodromus aberrans (Oudemans) (espèce prépondérante en région PACA <strong>et</strong> Languedoc-Roussillon), Phytoseius finitimus Ribaga (Corse) <strong>et</strong> Amblyseius andersoni (Chant) (recensé dansquelques situations du Sud-Ouest).Ces Phytoseiidae ou typhlodromes dans le langage vernaculaire, représentent une réellealternative à l’utilisation des acaricides, ils assurent une régulation naturelle des T<strong>et</strong>ranychidae :Panonychus ulmi (Koch), Eot<strong>et</strong>ranychus carpini (Oudemans) <strong>et</strong> T<strong>et</strong>ranychus urticae Koch, desEriophyidae : Calepitrimerus vitis (Nalepa) <strong>et</strong> Colomerus vitis (Pagenstecher). La prédation duthrips Drepanothrips reuteri Uzel complète le spectre d’action de T. pyri.La connaissance des eff<strong>et</strong>s non intentionnels des produits phytopharmaceutiques sur T. pyri, K.aberrans <strong>et</strong> P. finitimus est sans nul doute à l’origine d’une amélioration significative de lasituation faunistique du vignoble.Photo 3 : Femelle de Typhlodromus pyri Scheuten (Ph. IFV - G. Sentenac)En eff<strong>et</strong> une utilisation rationnelle des produits phytosanitaires aux eff<strong>et</strong>s non intentionnelsconnus est une condition nécessaire au maintien ou au rétablissement du potentiel antagonistenaturel des acariens phytophages. Lorsque les Phytoseiidae de protection sont présents survigne, l’acarocénose offre un équilibre stable au sein duquel les tétranyques <strong>et</strong> les phytoptesn’ont plus le statut de ravageurs. Pour perm<strong>et</strong>tre aux Phytoseiidae de se maintenir ou derecoloniser le vignoble afin d’exercer pleinement leur rôle d’agents naturels de régulation despopulations d’acariens phytophages un schéma décisionnel a été proposé aux viticulteurs(Kreiter <strong>et</strong> Sentenac, 1995). Ce dernier perm<strong>et</strong> d’établir un programme de traitement enadéquation avec les besoins phytosanitaires locaux tout en limitant autant que faire se peutl’emploi de spécialités ayant un eff<strong>et</strong> toxique vis-à-vis des typhlodromes de protection. La lutteobligatoire contre Scaphoideus titanus Ball, cicadelle vectrice de la flavescence dorée, peutconstituer une impasse technique puisque pour c<strong>et</strong> usage il n’y a pas à ce jour, d’insecticidesélectif homologué. Toutefois sans que l’on puisse considérer qu’il s’agisse d’une règle, dessuivis de populations effectués au sein de périmètres de lutte obligatoire (Bourgogne,Aquitaine, Midi-Pyrénées) ont montré que les Phytoseiidae se maintenaient ou se rétablissaient.34Lutte biologique contre les cicadelles Empoasca vitis Göth, Scaphoideus titanus BallLutte biologique contre Empoasca vitisLes auxiliaires qui participent à la régulation des populations de la cicadelle des grillures sontnombreux : Salticidae, Chrysopidae, Dryinidae, Pipunculidae, Mymaridae. Celui qui sans nuldoute a une action primordiale est le parasitoïde oophage de la famille des Mymaridae :Anagrus atomus Linné (Sentenac, 2004). Bien que son action ne soit pas régulière d’une annéeà l’autre, A. atomus peut être à l’origine d’un taux élevé de parasitisme des œufs d’Empoascavitis, au mieux, 78 % des œufs de première génération, 68 % des œufs de seconde génération,sont naturellement parasités (voir graphique n° 3).
Le Grenelle de l’environnement : conséquences <strong>et</strong> mesures pratiquesGraphique 3 : Taux de parasitisme des œufs Empoasca vitis par Anagrus atomus par génération<strong>et</strong> par site de 2001 à 200435Malgré c<strong>et</strong>te réelle activité des parasitoïdes autochtones, les essais de lutte biologique paraugmentation m<strong>et</strong>tant en œuvre 10 lâchers successifs de 270 A. atomus adultes/ha chacun, ou9 lâchers successifs de 1730 A. atomus adultes/ha chacun, n’ont pas été couronnés de succès.Nous ne disposons pas actuellement de moyen d’action pour augmenter dans les situations quile justifient, le taux de parasitisme des œufs d’E. vitis.Lutte biologique contre Scaphoideus titanusGrace à un soutien financier de l’ONIVINS, l’INRA - Unité de Lutte Biologique du Centre deSophia Antipolis a mené une prospection en 2001 <strong>et</strong> 2002 dans la région des Finger Lakes,région d’origine de S. titanus, afin d’identifier les auxiliaires spécifiques à c<strong>et</strong> Hémiptère. Le bilandes recherches d’agents de lutte biologique fut positif (Malausa, 2003), avec la mise enévidence de relations faisant intervenir des Dryinidae : Lonchodryinus flavus Olmi, Anteon masoniOlmi, Gonatopus peculiaris Brues, Esagonatopus perdebilis Perkins, Esagonatopus niger Fenton,des Pipunculidae <strong>et</strong> des Mymaridae du genre Polynema. Ces parasitoïdes introduits enquarantaine ont fait l’obj<strong>et</strong> de beaucoup d’efforts pour tenter d’en pérenniser l’élevage enlaboratoire, malheureusement efforts restés vains, aucune espèce n’a pu être maintenue enélevage.Dans ces conditions, l’étude a été orientée vers un parasitoïde autochtone mis en évidence en2003 en Languedoc-Roussillon : Gonatopus clavipes (Thunberg) (photo 4). Sa présence a étéconfirmée lors d’un inventaire faunistique réalisé de 2004 à 2007 sur plusieurs sites viticoles deBourgogne, Languedoc-Roussillon <strong>et</strong> Provence Alpes Côte d’Azur, d’autres parasitoïdes ontégalement été mis en évidence, deux Dryinidae : Gonatopus lunatus Klug <strong>et</strong> Anteon pubicorne(Dalman), un Pipunculidae du genre Eudorylas. Les taux de régulation relevés sont très faibles,généralement nuls ou voisins de 1 %, exceptionnellement approchant les 5 %. Le parasitoïdele plus couramment rencontré est G. clavipes, son élevage présente des contraintes : faiblefécondité, mortalité importante à tous les stades de développement, durée d’incubation descocons non prévisible. Celles-ci sont peu compatibles avec les objectifs d’une lutte biologiquepar augmentation. Suite à trois années d’étude, de 2005 à 2007, il s’avère que G. clavipes n’estpas un agent de lutte biologique efficace contre S. titanus. La lutte biologique paraugmentation contre S. titanus au moyen de ce parasitoïde ne constitue pas une alternativesatisfaisante dans la mesure où elle n’a pas permis d’obtenir un niveau de régulation supérieurà celui que présente le parasitisme naturel.