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évidence <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> joué par l’image, l’imaginaire et <strong>le</strong> spéculaire dans la<br />
construction du Moi et de la subjectivité. Il s’agira par conséquent d’inscrire<br />
cette analyse dans <strong>le</strong> cadre de la théorie de l’Imaginaire inaugurée<br />
en 1936 par <strong>le</strong> fameux texte de Lacan sur <strong>le</strong> stade du miroir 8, théorie qui<br />
ne cessera de subir des reformulations successives pour aboutir à une<br />
théorie structura<strong>le</strong> du spéculaire.<br />
Ce rapprochement théorique que nous opérons entre <strong>le</strong> hors-champ<br />
du dispositif télévisuel à l’œuvre dans Loft Story et la fonction de l’altérité<br />
dans la construction d’un sujet aliéné au champ de l’Autre, se fonde sur<br />
une analogie résidant dans <strong>le</strong> référent spéculaire. En effet, si Loft Story<br />
fait des miroirs et des glaces sans tain un emploi massif, Lacan, dans<br />
<strong>le</strong> sillon tracé par Freud qui décrivait l’appareil psychique comme une<br />
structure plurisystémique semblab<strong>le</strong> à un instrument de vision 9, fait, lui<br />
aussi, régulièrement appel à des métaphores optiques – et en particulier<br />
cel<strong>le</strong> du miroir – pour rendre compte de la topique subjective. Nous verrons<br />
comment, dans <strong>le</strong>s deux cas, <strong>le</strong>s miroirs fonctionnent comme pivot<br />
entre deux lieux fonctionnel<strong>le</strong>ment « inégaux » au regard de la « vérité »<br />
du sujet : un champ, lieu de l’imaginaire, et un hors-champ, lieu du symbolique,<br />
qui soumet <strong>le</strong> champ à ses impératifs. Nous invitons donc <strong>le</strong><br />
<strong>le</strong>cteur à lire <strong>le</strong> registre de l’Autre comme une sorte de « hors-champ » de<br />
l’individu, antérieur à son avènement en tant que sujet, et absolument<br />
déterminant dans l’élaboration des idéaux de la personne.<br />
Le dispositif loftien et <strong>le</strong> motif de l’œil<br />
Revenons donc au point de départ, celui que nous nous sommes fixé<br />
avec la prise en considération du dispositif loftien, en examinant de plus<br />
près une séquence emblématique de l’émission, à savoir cel<strong>le</strong> du générique.<br />
En effet, cette séquence, qui revient invariab<strong>le</strong>ment en début de<br />
chaque diffusion télévisuel<strong>le</strong>, présente un doub<strong>le</strong> intérêt. En premier<br />
lieu, el<strong>le</strong> donne en quelques secondes, aussi bien au niveau de l’image<br />
que du verbal, un résumé des conditions du jeu et de ses règ<strong>le</strong>s 10. En<br />
quelques mots et images, tout est dit : <strong>le</strong> générique permet de répondre à<br />
la fois au quoi, qui, où, pendant combien de temps, pourquoi et pour qui d’un<br />
tel programme, <strong>le</strong>s mots clé de l’énoncé venant s’inscrire sur l’écran, au<br />
côté des images, en <strong>le</strong>ttres blanches sur un fond noir.<br />
Cet exposé synthétique du principe de l’émission s’apparente à la<br />
trame narrative minima<strong>le</strong> d’un scénario qui prescrit un cadre aux candidats,<br />
tous des acteurs « non professionnels » invités à jouer <strong>le</strong>ur propre<br />
rô<strong>le</strong>. Les données matériel<strong>le</strong>s du dispositif, la temporalité, <strong>le</strong> but du jeu<br />
et l’interactivité imposent au « réel » des contraintes qui forment ainsi<br />
une sorte d’écriture scénaristique dictée par la production.<br />
Les images du générique, quant à el<strong>le</strong>s, part<strong>ici</strong>pent à cette même<br />
Etudes 39<br />
8 Ce texte, censé être présenté par Lacan<br />
lors du Congrès psychanalytique international<br />
de Marienbad (1936), a été perdu, mais sera<br />
repris par l’auteur en 1949, à l’occasion du<br />
XVI e Congrès international de psychanalyse à<br />
Zurich, sous <strong>le</strong> titre « Le stade du miroir comme<br />
formateur de la fonction du ‹ je › tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong><br />
nous est révélée par l’expérience psychanalytique<br />
», conférence qui sera publiée plus tard<br />
dans <strong>le</strong>s Ecrits (1966). Cf. Jacques Lacan,<br />
Ecrits I, op. cit., p. 89 - 97.<br />
9 En septembre 1899, Freud aborde la partie<br />
la plus théorique de L’Interprétation des<br />
rêves avec <strong>le</strong> célèbre chapitre VII consacré à la<br />
métapsychologie du rêve. S’efforçant de définir<br />
<strong>le</strong> psychisme comme l’espace constitutif du<br />
rêve, il emploie alors une métaphore à la fois<br />
optique et photographique, en comparant l’appareil<br />
psychique au microscope, au té<strong>le</strong>scope<br />
et à l’appareil photographique. Sigmund Freud,<br />
L’interprétation des rêves (1900), PUF, Paris,<br />
1971, p. 455.<br />
10 Cf. infra.