Bateson et l'épistémologie - SFTF
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<strong>Bateson</strong> <strong>et</strong> l’épistémologie – Jacques Miermont<br />
de son disciple. Il est symptomatique que l’éditeur français ait r<strong>et</strong>enu pour le titre : Une<br />
logique de la communication, qui eût mieux convenu à <strong>Bateson</strong>, mais qui trahissait<br />
l’intention explicite de Watzlawick. Pour ajouter au dépit de <strong>Bateson</strong>, l’éditeur Norton,<br />
réticent à publier son propre manuscrit de Steps to an Ecololgy of Mind, acceptera sans<br />
réserve l’ouvrage de Watzlawick.<br />
Lors de ma visite pendant quinze jours du Mental Research Institute de Palo Alto, en<br />
1981, j’ai constaté, à ma grande surprise, que la photo de <strong>Bateson</strong>, disparu l’année<br />
précédente, ne faisait pas partie de la galerie de portraits affichées au mur. J’ai fait une<br />
formation (brève) à la thérapie brève <strong>et</strong> à l’hypnothérapie, avec Paul Watzlawick, Richard<br />
Fisch, John Weakland, <strong>et</strong> Carlos Sluzki, qui était alors le directeur du RMI. Je me suis<br />
rendu compte alors que les démarches thérapeutiques proposées pouvaient être<br />
intéressantes pour toute une série de troubles <strong>et</strong> de symptômes fort éloignés des<br />
pathologies schizophréniques. Il fallait être bien armé mentalement pour accomplir les<br />
tâches paradoxales qu’il nous était donné de réaliser à titre d’exercices formateurs. Et les<br />
personnes qui venaient consulter avaient des symptômes <strong>et</strong> des problèmes relativement<br />
circonscrits, relevant davantage de difficultés névrotiques que psychotiques. J’ai acquis<br />
la conviction que le proj<strong>et</strong> de recherche sur les communications schizophréniques était<br />
bien enterré _ , <strong>et</strong> que le hiatus entre la démarche de <strong>Bateson</strong> <strong>et</strong> celle de ses disciples<br />
directs était profond. J’ai participé également aux activités de l’Emergency Therapy<br />
Center, affilié au MRI, constitué d’une douzaine de psychologues travaillant sous la<br />
direction de Diana Sullivan Everstine en collaboration étroite avec la police pour<br />
intervenir dans les situations urgentes de violence familiale sur le terrain. Lors de ma<br />
participation à une synthèse, plusieurs intervenants se plaignaient de ne pouvoir faire<br />
hospitaliser nombre de personnes en grande souffrance, faute de moyens…<br />
3.3. <strong>Bateson</strong> <strong>et</strong> la psychothérapie<br />
Il est de bon ton de dire que <strong>Bateson</strong> n’était pas psychothérapeute, <strong>et</strong> qu’il ne<br />
connaissait le champ de la psychothérapie <strong>et</strong> de la psychanalyse que de manière<br />
incidente <strong>et</strong> superficielle. Il semble bien que la réalité soit très différente.<br />
D’une part, vers la fin de l’année 1946, suite à la séparation avec sa première femme<br />
Margar<strong>et</strong> Mead, <strong>et</strong> à l’instigation de c<strong>et</strong>te dernière, <strong>Bateson</strong> entreprit une psychothérapie<br />
intensive en face à face avec une psychanalyste jungienne, Elisab<strong>et</strong>h Hellersberg. Il<br />
partagea alors son temps entre des séances quotidiennes <strong>et</strong> l’étude de la cybernétique <strong>et</strong><br />
de la théorie de l’information (M. C. <strong>Bateson</strong>, 1984, p. 59). Il confia à son biographe David<br />
Lips<strong>et</strong> que c<strong>et</strong>te expérience « que j’appelais vaguement ma psychanalyse », fut agréable<br />
<strong>et</strong> riche d’enseignement. Il lui évoqua l’importance de rêves, faits avant <strong>et</strong> pendant<br />
l’analyse, révélant des sentiments de culpabilité kafakïens <strong>et</strong> non identifiés. Dans un rêve<br />
important, il voit son père faisant monter son frère Martin sur une échelle. Martin était le<br />
frère qui le précédait, qui se suicida, après le décès de John, le frère aîné mort lors de la<br />
Première Guerre Mondiale.<br />
Dans un autre rêve fait dix ans avant l’analyse, il explique : « Je suis coupable. Et<br />
comme je suis coupable je suis condamné <strong>et</strong> je me r<strong>et</strong>rouve sur le lieu de mon exécution<br />
où je peux parler à l’assemblée de mes amis, admirateurs <strong>et</strong> parents, dans une sorte de<br />
discours de la Rennaissance, vous savez, sur le chemin de la guillotine. Et c’est un<br />
discours très noble. Rien de cela du tout, même en mots dans le rêve ŕ mais le fait est<br />
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