Bateson et l'épistémologie - SFTF
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<strong>Bateson</strong> <strong>et</strong> l’épistémologie – Jacques Miermont<br />
que c’est un noble discours. Et à la fin du discours, je salue, <strong>et</strong> je dis : ŖExcusez-moi, si je<br />
m<strong>et</strong>s en scène moi-même de façon un peu dramatiqueŗ, <strong>et</strong> je me réveille en hurlant de<br />
rire ».<br />
D’autre part, <strong>Bateson</strong> traita nombre de patients entre 1948 <strong>et</strong> 1963. Fry a souligné que<br />
<strong>Bateson</strong> rencontrait les familles davantage en tant qu’anthropologue observateur que<br />
comme clinicien ou thérapeute. Il basculait entre ce rôle <strong>et</strong> celui d’un oncle maternel<br />
amical, soulevant des questions intrigantes <strong>et</strong> significatives, adoptant une attitude<br />
éducative, <strong>et</strong> pouvant jouer au golf avec ses patients. L’ironie du sort a voulu que c<strong>et</strong>te<br />
attitude ait été r<strong>et</strong>enue comme plus prudente <strong>et</strong> pertinente dans l’approche des<br />
schizophrènes <strong>et</strong> de leurs familles par les cliniciens, ceux-ci ayant fait le constat que les<br />
velléités d’efficacité, les remises en question personnelles, les démarches stratégiques,<br />
structurales, transgénérationnelles, voire celles cherchant à prescrire le paradoxe,<br />
étaient le plus souvent contre-performatives. Ronald D. Laing a fait c<strong>et</strong>te remarque à<br />
David Lips<strong>et</strong> : « Je ne pense pas qu’il se soit jamais considéré lui-même comme un<br />
thérapeute, mais pour autant certains parmi les meilleurs thérapeutes pourraient ne pas<br />
faire de même… Si j’avais été son patient lors d’une séance, je n’aurais certainement pas<br />
senti quoi que ce soit d’effrayant. Je pense que c’est la chose la plus importante. Il<br />
n’essayait pas de faire surgir les gens… hors du cheminement de ces constellations<br />
familiales. Je ne pense pas qu’il m’aurait dit quelque chose qui aurait signifié qu’il pensait<br />
en termes d’une stratégie réellement active à adopter, de moyens pratiques pour m<strong>et</strong>tre<br />
son nez dans les affaires des gens en les sortant des enchevêtrements dans lesquels ils<br />
étaient empêtrés Ŕ ce dont, en un sens, vous savez être le propre d’un activiste politicien<br />
de piètre envergure… Je veux dire que vous jouez activement le pouvoir contre le<br />
pouvoir. <strong>Bateson</strong> n’était jamais impliqué dans ce genre de chose. » (in Lips<strong>et</strong>, 1980, p.<br />
220)<br />
Marie Catherine <strong>Bateson</strong> souligne ainsi combien il y avait chez son père (comme chez<br />
sa mère, Marag<strong>et</strong> Mead) un effort, non seulement pour comprendre les processus<br />
biologiques <strong>et</strong> sociaux, mais aussi pour se comprendre soi-même. Il existait une relation<br />
continue entre connaissance de soi <strong>et</strong> connaissance professionnelle. Ces intersections<br />
entre le personnel <strong>et</strong> le professionnel peuvent être source de compréhension, mais aussi<br />
d’erreurs. Le fait de s’observer soi-même perm<strong>et</strong> de prendre conscience de ses<br />
problèmes personnels, <strong>et</strong> de faire un travail comparatif. Il devient possible de comparer<br />
des images, des sentiments, des évocations, de telle manière que l’observateur, en<br />
sciences humaines, ait une idée assez précise des caractéristiques de son propre<br />
instrument d’observation (M. C. <strong>Bateson</strong>, 1984, p. 202).<br />
3.4. La théorie du double bind : une méprise ?<br />
Dès 1958, G. <strong>Bateson</strong> avait mis en garde contre la tendance à rechercher les causes<br />
de la schizophrénie du côté des caractères parentaux, des « mères surprotectrices » ou<br />
des « pères trop forts ou trop faibles », eux-mêmes identifiables dans la triade père -<br />
mère - enfant, en incitant à prendre en compte les « constellations plus larges » au sein<br />
desquelles les interactions parents - enfant opéraient. Mais comme à son habitude, sa<br />
formulation reste elliptique, laissant ouverte la nature exacte de ces « constellations plus<br />
larges » :<br />
« (…) nous partons du principe que nous cherchons des circuits de causalité <strong>et</strong><br />
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