QUI EST L'AUTRE - Eric Vincent

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LE LUTIN BLOND
L'homme aux mains d'ombre suspendit sa sortie. Il se retourna et fit jaillir la lumière noire
aux pieds de son collègue. Le pauvre type plongea en enfer ou dans un lieu totalement
inconnu. A moins qu'il n'ait été absorbé par un vortex fait d'antimatière ! Les regards se
croisèrent et les premiers cris s'échappèrent des gorges, les témoins pressentant un sort
identique. Le jet se déplaça à une vitesse fulgurante, absorbant les humains, un à un.
Lorsqu'il fit face à Malika, il hésita. Les autres lui sortaient par les yeux ; ils ne représentaient
rien que de sinistres personnages, des puissants le méprisant au plus haut point. Ils n'étaient
que d'informes vers de terre !
Pas Malika… La jeune et brillante formatrice l'estimait pour son intelligence, pour ses rares
mais pertinentes questions. Elle ne lui voulait pas de mal. Elle était différente. Ses origines
africaines l'avaient probablement amenée à côtoyer des phénomènes paranormaux. Il y avait
bien un marabout dans sa famille, avec un peu de chance ! Elle comprendrait.
Elle ne comprit point ! Au contraire, elle se rua vers le fond de la salle, direction la porte
donnant sur une autre salle de formation. Totalement paniquée, elle ne songea qu'à une seule
chose : mettre le plus de distance entre elle et lui. Elle traversa la salle annexe comme une
fusée, malgré l'étroitesse de sa jupe entravant sa course. Jaillissant de la pièce, elle bifurqua
vers le plateau des ascenseurs. Elle frappa le bouton d'appel à de nombreuses reprises.
"Trop lent !" Pensa-t-elle.
Le monstre paraîtrait bientôt et l'abattrait sans sommation. A moins qu'il s'en prenne aux
autres employés du vingt-septième étage et qu'il les anéantisse tous, sans l'ombre d'une
hésitation ! Elle devait vivre pour témoigner, pour dénoncer cet incroyable et destructeur
pouvoir. L'escalier de service ! Même si sa descente était plus lente qu'avec l'ascenseur, elle
serait en sécurité. Elle courut et tourna à droite, au hasard. Vingt-sept étages à dévaler ! Par
chance, il s'agissait de descendre. De plus, elle avait été championne de demi-fond, un détail
d'importance !
Elle s'engouffra dans l'espace confiné et monotone. Elle fonça, sautant les marches quatre à
quatre, risquant de se rompre le cou à chaque étage. Lorsqu'elle atteignit le dix-huitième
niveau, elle stoppa sa course, décidant de semer son adversaire. Elle pénétra dans les bureaux
d'une société dont elle ignorait tout. Un groupe d'hommes d'affaire patientait devant l'espace
aboutissant aux quatre ascenseurs. Elle se mêla à eux, le cœur battant, le souffle haletant, des
rigoles de sueur perlant sur ses tempes. Les cadres supérieurs, cravatés et costumés malgré la
chaleur, notèrent son trouble. Ils ignoraient qu'elle était plongée dans la frayeur la plus
complète, que seul son instinct la conduisait vers la voie de la survie.
Les portes s'ouvrirent, l'assemblée s'enfonça dans la cabine. Une fois verrouillée, elle plongea
dans le vide.
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