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QUI EST L'AUTRE - Eric Vincent

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28<br />

LE LUTIN BLOND<br />

aurait voulu qu'ils rentrent tous à pied, sans commettre de bévue, sans risquer autre chose<br />

qu'un renversement de poubelle bien bénin. Mais non…<br />

Les deux kilomètres nécessaires pour rejoindre leurs domiciles, tous situés aux Couronneries,<br />

le quartier le plus glauque de Poitiers, seraient parcourus en camionnette. Charles connaissait<br />

le chemin par cœur ; comme tous les alcooliques du monde, il était persuadé de contrôler son<br />

véhicule, il était convaincu de respecter les limitations de vitesse, il était assuré de s'arrêter à<br />

temps en cas d'urgence.<br />

Lorsqu'il s'engagea dans la rue de la Cathédrale, étroite, à sens unique, bordée de véhicules en<br />

stationnement des deux côtés, il enfonça brusquement la pédale de droite, maîtrisant mal le<br />

dosage de l'accélération. Il manqua d'emboutir plusieurs véhicules, le cap devenant trop<br />

compliqué à garder.<br />

Tout à coup, un homme traversant la rue surgit dans la lumière des phares. Charles mit trop<br />

de temps à réagir ; le choc fut inévitable. Trois longs hurlements s'en suivirent durant deux<br />

secondes avant de cesser. La camionnette s'était évaporée dans un mur de lumière noire.<br />

L'obstacle avait surgi instantanément, presque par pur réflexe, de la main d'un inconnu.<br />

Haletant, le visage parcouru par des spasmes de frayeur, ce dernier releva la tête et admira le<br />

résultat de son geste. Il était prêt à tout.<br />

* *<br />

*<br />

Le quartier général n'était autre que les appartements de Martin Lemur. Des six compères, il<br />

était le plus aimé, le plus gâté par ses parents, y compris dans l'attribution d'un espace de vie<br />

estudiantine. Les réunions avaient lieu le plus souvent dans ces murs mais elles prenaient<br />

parfois le chemin de la bibliothèque du campus universitaire, voire l'adresse du restaurant<br />

universitaire. Leurs identités n'avaient rien de secret ; cependant, ils cachaient soigneusement<br />

l'existence de leur famille respective (lorsqu'ils en avaient une) à l'exception d'Hubert dont<br />

tous les membres du clan Tannenbaum étaient célèbres en France et au-delà des frontières<br />

pour leur force légendaire et leur appétit démesuré. Mais quel idiot costumé aurait pu avoir<br />

l'idée saugrenue de s'attaquer à cette famille massive et armée de poings capables d'assommer<br />

un bœuf ?<br />

Les mines étaient plutôt grises, les corps étaient sans force, le moral était en baisse. Dans la<br />

journée, les K avaient appris que le commissariat de police avait fait l'objet d'une attaque en<br />

règle d'un véritable commando. Les six policiers présents sur les lieux avaient subi un<br />

mitraillage nourri et avaient dû battre en retraite. Acculés au sous-sol, tenu en respect par les<br />

individus embusqués dans l'escalier, ils n'avaient pas pu entraver le pillage de l'armurerie, le<br />

vol de gilets pare-balles et l'incendie provoqué pour couvrir la fuite.<br />

Selon les dires de Désiré Prosper, le commissaire, la voix percluse d'émotion et de rage, les<br />

dégâts étaient considérables, malgré l'intervention rapide des pompiers. Le coup porté aux<br />

forces de l'ordre était important et portait la signature des "flambeurs", un groupuscule aux<br />

objectifs obscurs, agissant à la vitesse de l'éclair, flambant des voitures à tour de bras.

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