The Project Gutenberg EBook of Cheri, by Colette Copyright ... - Umnet
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voyons, du départ, des bagages...."<br />
Elle parla en effet, et dit :<br />
"Je vois.... Je vois que je ne peux pas traiter en homme un être qui est capable, par<br />
veulerie, de mettre le désarroi chez deux femmes. Crois-tu que je ne comprenne pas? En<br />
fait de voyage, tu les aimes courts, hein? Hier à Neuilly, aujourd'hui ici, mais demain....<br />
Où donc, demain? Ici? Non, non, mon petit, pas la peine de mentir, cette figure de<br />
condamné ne tromperait même pas une plus bête que moi, s'il y en a une par là...."<br />
Son geste violent, qui désignait la direction de Neuilly, renversa une jatte à gâteaux que<br />
Chéri redressa. A mesure qu'elle parlait, elle accroissait son mal, le changeait en un<br />
chagrin cuisant, agressif et jaloux, un chagrin bavard de jeune femme. Le fard, sur ses<br />
joues, devenait lie-de-vin, une mèche de cheveux, tordue par le fer, descendit sur sa<br />
nuque comme un petit serpent sec.<br />
"Même celle de par là, même ta femme, tu ne la retrouveras pas toutes les fois chez toi,<br />
quand il te plaira de rentrer! Une femme, mon petit, on ne sait pas bien comment ça se<br />
prend, mais on sait encore moins comment ça se déprend!... Tu la feras garder par<br />
Charlotte, la tienne, hein? C'est une idée, ça! Ah! je rirai bien, le jour où...."<br />
Chéri se leva, pâle et sérieux :<br />
"Nounoune!...<br />
--Quoi, Nounoune? quoi, Nounoune? Penses-tu que tu vas me faire peur? Ah! tu veux<br />
marcher tout seul? Marche! Tu es sûr de voir du pays, avec une fille de Marie-Laure !<br />
Elle n'a pas de bras, et le derrière plat, mais ça ne l'empêchera guère....<br />
--Je te défends, Nounoune!..."<br />
Il lui saisit les deux bras, mais elle se leva, se dégagea avec vigueur, et éclata d'un rire<br />
enroué :<br />
"Mais bien sûr! "Je te défends de dire un mot contre ma femme!" N'est-ce pas?"<br />
Il fit le tour de la table et vint tout près d'elle, tremblant d'indignation :<br />
"Non! Je te défends, m'entends-tu bien, je te défends de m'abîmer ma Nounoune!"<br />
Elle recula vers le fond de la chambre en balbutiant :<br />
"Comment ça?... Comment ça?..."<br />
Il la suivait, comme prêt à la châtier :<br />
"Oui! Est-ce que c'est ainsi que Nounoune doit parler? Qu'est-ce que c'est que ces<br />
manières? Des sales petites injures genre madame Peloux, maintenant? Et ça sort de toi,<br />
toi Nounoune!..."<br />
Il rejeta la tête en arrière orgueilleusement :<br />
"Moi, je sais comment doit parler Nounoune! Je sais comment elle doit penser! J'ai eu le<br />
temps de l'apprendre. Je n'ai pas oublié le jour où tu me disais, un peu avant que je<br />
n'épouse cette petite : "Au moins ne sois pas méchant.... Essaie de ne pas faire souffrir....<br />
J'ai un peu l'impression qu'on laisse une biche à un lévrier...." Voilà des paroles! Ça, c'est<br />
toi! Et la veille de mon mariage, quand je me suis échappé pour venir te voir, je me<br />
rappelle, tu m'as dit...."<br />
La voix lui manqua, tous ses traits s'éclairèrent au feu d'un souvenir :<br />
"Chérie, va...."<br />
Il posa ses mains sur les épaules de Léa :<br />
"Et cette nuit encore, reprit-il, est-ce qu'un de tes premiers soucis n'a pas été pour me<br />
demander si je n'avais pas fait trop de mal LÀ-BAS? Ma Nounoune, chic type je t'ai<br />
connue, chic type je t'ai aimée, quand nous avons commencé. S'il nous faut finir, vas-tu