agenda - 491
agenda - 491
agenda - 491
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
20 N° 179 MARS 2012<br />
spectacles vivants<br />
“FAUT MANGER<br />
AVANT DE VENIR”<br />
Interview par Étienne Faye<br />
Il est des conseils que l’on peut suivre aveuglément,<br />
d’autres qu’il faut considérer avec circonspection.<br />
“Faut manger avant de venir”, c’est le conseil de<br />
Jean-Christophe Meurisse, le metteur en scène<br />
d’Une raclette, visible aux Subsistances, pendant<br />
l’un de ces désormais fameux week-ends, intitulé<br />
“Ça tremble !” et sous-titré “10 spectacles pour<br />
mourir de peur”. Il se pourrait donc que cette raclette<br />
exige du spectateur d’avoir l’estomac bien accroché.<br />
N’empêche, avis aux gourmands, le public sera<br />
convié comme à une “fête de voisins”, autour d’un dîner<br />
de fromage fondu et de charcuterie, mais sans le loisir<br />
de goûter… Pas assez de poêlons, sans doute. Parmi<br />
les autres spectacles à voir pendant le week-end, il<br />
faut noter le retour du chorégraphe américain Jeremy<br />
Wade, avec la vidéaste japano-canadienne Alison<br />
Kobayashi et le collectif Motus. Ils formeront<br />
ensemble le collectif Peur, et imagineront une création<br />
originale. Et, bien sûr, cette manifestation programmera<br />
du cirque, de la danse, du théâtre, et même une<br />
installation d’art contemporain… En attendant,<br />
quelques questions à Jean-Christophe Meurisse,<br />
metteur en scène de la compagnie parisienne des<br />
Chiens de Navarre.<br />
Quel est le principe d’Une raclette ?<br />
Le repas est une vieille histoire, au théâtre, et c’est un<br />
thème que je voulais aborder, à la manière des Chiens<br />
de Navarre. Je voulais les odeurs, les conversations<br />
ordinaires, les bruits de vaisselle, je voulais commencer<br />
à l’apéro, terminer par la prune… Les comédiens se<br />
retrouvent donc autour d’une raclette à échanger les<br />
banalités d’usage, et tous ces lieux communs accumulés<br />
© Christian Ganet<br />
finissent par révéler beaucoup de choses, et d’abord<br />
l’étrangeté de l’ordinaire. Nous cherchons bien sûr par<br />
ce biais à lancer un pavé dans la mare des conformismes,<br />
et cependant, sans jugement, car c’est un constat que<br />
nous faisons sur nous-mêmes.<br />
Vous voulez dire que c’est juste un repas, c’est tout ?<br />
Stanley Kubrick a dit que “dans son inconscient, chacun<br />
de nous viole et tue”, et sans rentrer dans le détail,<br />
sachez que cette citation nous a inspirés. Nous avons<br />
comme principe fondamental l’intranquillité des<br />
artistes sur le plateau comme des spectateurs. Et bien<br />
sûr que ce dîner doit complètement dégénérer.<br />
Comment avez-vous mis en place le spectacle ?<br />
Il n’y a pas de texte à la base, puisqu’il s’agit d’une<br />
création collective. Nous sommes 8 comédiens et un<br />
metteur en scène, et nous sommes tous auteurs de nos<br />
spectacles, nous improvisons, pendant les temps de répétitions<br />
et pendant la représentation elle-même. J’estime que<br />
cela nous permet de faire entrer une part d’inconscient<br />
dans le spectacle, nous faisons un théâtre pulsionnel,<br />
sans idée, sans discours. Dans la Raclette, il n’y a pas<br />
de personnages, je ne crois pas en cette notion, et les<br />
comédiens, sur scène, tantôt jouent et tantôt sont euxmêmes.<br />
D’une façon générale, nous espérons bousculer<br />
les codes, en pratiquant un théâtre informe…<br />
En passant par la provocation ?<br />
Rodrigo Garcia fait de la provoc, pas moi. Je ne suis pas<br />
là pour provoquer le bourgeois. Il peut nous arriver de<br />
jouer avec nos sexes, par exemple, mais de façon idiote,<br />
au sens popularisé par Lars von Trier. Nous sommes dans<br />
un plaisir monstrueux, une jubilation dionysiaque, et<br />
s’il y a quelque chose de choquant, dans nos créations,<br />
singulièrement dans Une raclette, c’est plutôt cette<br />
absence de forme.<br />
Du 29 mars au 1er avril aux Subsistances<br />
CENT CULOTTES<br />
ET SANS PAPIERS<br />
Interview par Étienne Faye<br />
Une raclette<br />
Anne Courel a créé en octobre, au centre Théo-Argence qu’elle dirige,<br />
la pièce de Sylvain Levey Cent culottes et sans papiers. La compagnie<br />
Ariadne le rejoue au centre Théo Argenceet en avril à la Renaissance.<br />
La pièce se déroule dans une école. Une liste d’objets oubliés<br />
après la classe, chacun délivre son histoire. Par exemple, une cagoule<br />
ne trouve plus son petit propriétaire. Samir. Qu’est devenu Samir ?<br />
Il ne vient plus à l’école, il a disparu. Il a été expulsé. “LIBERTÉ /<br />
ÉGALITÉ / FRATERNITÉ / Pour une longue / Très longue / Longue<br />
et douloureuse / Histoire / Histoire de France / Des sans-culottes /<br />
Aux enfants de sans-papiers.” La mise en scène d’Anne Courel veut<br />
nous rappeler l’ambiance de nos écoles, les souvenirs qu’on en<br />
a, la craie, les tableaux noirs, les portemanteaux dans le couloir.<br />
Et les chansons de nos enfances, les comptines immortelles,<br />
Henri Dès, les poèmes de Prévert. En avril, nous serons à<br />
quelques encablures d’une double élection, présidentielle et<br />
législative. Le moment n’est-il pas bien choisi pour nous rappeler<br />
quelques douloureux épisodes du quinquennat qui s’achève ?<br />
7 mars au Centre Culturel Théo Argence<br />
Les 4 et 6 avril au Théâtre de la Renaissance<br />
© Balthazar Maisch