Catalogue des personnages de l'œuvre filmique de Jean Renoir ...

une ferme et quelques arpents de terre ou de forêts, tout un lambeau de ses vastes domaines de Picardie. » 7
Descriptif
L’oncle de Georges et le meilleur ami de Muffat semble ne pas se laisser hypnotiser par Nana.
Il garde les idées claires, et est le seul à s’apercevoir du manège de Nana, qui non contente
d’avoir Muffat, tente de séduire le jeune et naïf Georges. Il ne comprend pas l’engouement des
deux hommes pour cette garce qui casse tout et brutalise ses domestiques, à la suite de
l’insuccès de la pièce de théâtre dans laquelle elle jouait.
Or il commet une erreur fatale celle de lui rendre visite – « Ce que j’ai à vous dire est très délicat »,
dit-il en réajustant son monocle pour paraître plus crédible, plus sévère, plus strict et surtout
en reculant le fauteuil que Nana avait collé au lit. Il a la volonté de se tenir à l’écart des
tentacules de la pieuvre. »Tant qu’il ne s’agissait que de Muffat... Mais maintenant il s’agit de Georges,
un enfant. »
Et c’est ainsi qu’il va tomber dans ses filets. Vandeuvres est un personnage ultra
conventionnel, aristocrate accompli, il choisira le suicide pour éviter le déshonneur. C’est un
faible incapable du moindre acte de rébellion, une sorte d’aristocrate déchu que l’on va
retrouver dans d’autres films de Renoir.
Il faut signaler que le fait de confier le personnage à Jean Angelo n’est pas un hasard de
distribution. Le comédien est adulé par le public et incarne toute une série de héros dont la
principale caractéristique est le panache. L’année précédente il n’a pas manqué de séduire les
spectateurs en incarnant Robert Macaire sous la direction de Jean Epstein. Le personnage de
Vandeuvres apparaît alors comme un contre emploi manifeste puisque la force du personnage
masque en fait une forme de veulerie. Il faudra Le Monte-Cristo de Fescourt trois ans plus tard
pour que Jean Angelo renoue avec ses personnages de jeunes premiers positifs.
Jean ANGELO (1875-1933) :
Jean Barthélémy est né le 17 mai 1875 à Paris. Sa marraine était la célèbre Sarah Bernhardt.
Son jeu net et sobre ainsi que son physique viril le favorisent. Il tourna une trentaine de films.
Sa carrière ne résiste pas au parlant. Il meurt prématurément à Paris le 11 novembre 1933.
Jean Angelo vu par la critique :
Jean Angelo, a qui Renoir a confié un rôle de tout premier plan, ne peut manquer de déployer les très grandes qualités qui
le firent remarquer dans ses créations précédentes et qui le classèrent parmi nos plus grands artistes d’écran.
Henri GAILLARD, Cinémagazine n° 52, loc.cit. p. 590.
Jean Angelo est, comme toujours, parfait dans le rôle du comte de Vandeuvres. Très sobre, il est infiniment émouvant dans
sa dernière scène avec le comte Muffat et lors de son suicide.
A.T., Cinémagazine n° 19, loc.cit., p. 298.
Les luttes entre sa conscience et sa passion sont admirablement rendues. Il est, dans la seconde partie du film, très
émouvant.
Lucien FARNAY, Cinémagazine n° 21, loc.cit., p. 388.
Ce qui caractérise Jean Angelo dans tous les rôles qu’il aborde, c’est une élégance de bonne aloi, un sérieux fait de gravité
souriante et une dignité que nul artiste ne possède à un degré aussi éminent. (…) On ne s’imagine pas à quelle frénésie
aboutissait l’admiration du public ; il avait fallu apposer un grillage sur sa photographie, parce que chaque soir des
admiratrices par trop zélées l’arrachaient à la devanture de la salle du cinéma qui donnait L’Atlantide.
Jacques BERNIER, Ciné-Miroir n° 374, 3/06/1932, article : Jean Angelo, p. 363.
7 in Nana, op. cit., p.63.
30