brochure - Ovk

lendemain, il lui commente un
article économique ; et ainsi de
suite. J’ai demandé à Tim : C’était
important ? Oui, m’a-t-il dit. Mais
est-ce que tu comprenais ? Et il m’a
répondu : Non, rien du tout. Mais
c’était important, parce que c’était
la première fois de ma vie – j’avais
treize ans – qu’on me parlait comme
à un homme. Imaginez, dans la
même situation, un garçon bien
élevé, avec papa-maman. Qu’auraitil
répondu au clochard ? Laissezmoi
tranquille. Le même fait en
soi prend une signification pour soi
totalement différente selon l’histoire
et le développement de l’individu.
«L’écriture permet de développer
un monde de beauté, alors
que le réel est ignoble …»
Et le troisième domaine des
facteurs de résilience, c’est la
disposition, autour du blessé, de
«tuteur de résilience,» – et non plus
de «tuteurs de développement». Et
beaucoup de blessés surinvestissement
l’écriture parce que cela
leur permet de développer un
monde intime, un monde de beauté,
alors que le réel est ignoble. Dans le
surinvestissement intime, l’écriture
joue un rôle fondamental.
Mais tout le monde n’a pas le don
de l’écriture …
Même pour celui qui ne sait pas
écrire, l’acte de l’écriture est déjà
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un facteur tranquillisant. Moi, enfant
blessé, je laisse une trace hors de
moi de ce qui est arrivé au fond
de moi. Plus tard, je m’en servirai
pour en faire quelque chose. Mais
le simple acte d’écriture, le travail
d’écriture est déjà un facteur de
résilience – même si cela reste
dans un tiroir. En France, on évalue
à quatre millions le nombre de
diaristes ; quatre seront édités.
Certains, parmi vos confrères,
estiment que la résilience est un
concept flou et peu opérationnel
d’un point de vue thérapeutique.
Que leur répondez-vous ?
Ce qui me gêne dans le concept de
résilience, c’est son succès. Très
souvent, un trop grand succès provoque
des contresens. Ceux que
vous citez n’ont pas lu une seule ligne
sur la résilience. Les critiques sont
minoritaires et passionnels. Ce qui
me fait douter de leur authenticité…
Ce que j’entends, c’est, au contraire,
que toutes les psychothérapies sont
fortement relancées par la résilience
; énor-mément de psychiatres
demandent à leurs patients de lire
des livres sur la résilience de façon
à pouvoir en parler avec eux parce
que c’est un trésor à hypothèses, un
trésor d’illustration. Et beau-coup de
gens qui m’ont lu, me disent : Je me
suis reconnu
Propos recueillis par DOMINIQUE BERN
«Le Soir» 16/17 avril 2005