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« La prochaine réponse que je donnerai est-elle « non » ? Je<br />
ne peux pas répondre « non » puisque pour dire « non » à la<br />
question, il me faudrait répondre « oui » ! Et je ne peux pas dire<br />
« oui » parce que si je dis « oui » la « prochaine réponse » ne<br />
sera pas « non » ! »<br />
ŕ Alors ? lança <strong>Amos</strong> en ricanant. C’est oui ou c’est non ?<br />
Le démon ne pouvait plus parler ! Il était béat d’étonnement.<br />
Orobas avait beau se passer et se repasser le problème dans son<br />
esprit, il arrivait toujours au même raisonnement ! Il lui était<br />
impossible de répondre à cette question… <strong>Amos</strong> avait gagné.<br />
Orobas se leva, se dirigea vers l’unique fenêtre de son donjon<br />
et fit un signe à l’un de ses soldats. <strong>Amos</strong> et lui attendirent<br />
ensuite en silence avant qu’une dizaine de guerriers à poils<br />
longs n’entrent dans la salle. Supposant qu’ils étaient là pour<br />
l’escorter hors de ce niveau des Enfers, <strong>Amos</strong> se leva et salua<br />
Orobas. Sans le regarder, le démon fit à son hôte un petit signe<br />
de la tête et le renvoya d’un furtif geste de la main. Le porteur<br />
de masques quitta ainsi le palais de glace et c’est sous bonne<br />
garde qu’il fut conduit non loin des murailles.<br />
Les soldats d’Orobas s’arrêtèrent tout près d’un trou grand et<br />
profond surmonté d’une grille de métal. Il émanait de ce tunnel<br />
une odeur pestilentielle insupportable. Il s’en dégageait aussi<br />
une chaleur humide qui faisait fondre la neige et la glace tout<br />
autour de l’ouverture.<br />
Les créatures du prince soulevèrent la grille et l’un d’eux<br />
poussa violemment <strong>Amos</strong>, qui perdit l’équilibre et tomba dans<br />
le trou. Le grillage se referma tandis que, en chute libre, le<br />
porteur de masques se demandait s’il allait réussir son<br />
atterrissage !<br />
* * *<br />
Ainsi que l’avait dit Orobas, le cinquième niveau des Enfers<br />
portait le nom de « marais de la colère ». Le Cocyte, aussi<br />
symboliquement appelé « torrent des lamentations » parce qu’il<br />
était composé des larmes des désespérés, traversait ce plan<br />
d’existence en son centre. Cette rivière souvent gonflée par des<br />
vagues de pleurs inondait les alentours. Le niveau des terres<br />
humides, qui retenaient périodiquement l’eau de surface, variait<br />
selon les marées de chagrin, les inondations de tristesse, les<br />
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