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Grégoire le Grand : 40 homélies sur les évangiles - Kerit

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Notre Rédempteur, prévoyant que sa Passion jetterait <strong>le</strong> troub<strong>le</strong> dans l’âme de ses apôtres,<br />

<strong>le</strong>ur prédit bien à l’avance, et <strong>le</strong>s souffrances de cette Passion, et la gloire de sa Ré<strong>sur</strong>rection.<br />

Ainsi, en <strong>le</strong> voyant mourir comme il <strong>le</strong> <strong>le</strong>ur avait annoncé, ils ne douteraient pas qu’il dût<br />

éga<strong>le</strong>ment ressusciter. Mais parce que ses discip<strong>le</strong>s encore charnels 2 ne pouvaient rien<br />

comprendre au mystère dont il <strong>le</strong>ur parlait, il eut recours à un mirac<strong>le</strong>. Sous <strong>le</strong>urs yeux, un aveug<strong>le</strong><br />

s’ouvre à la lumière, en sorte qu’une action cé<strong>le</strong>ste affermisse dans la foi ceux qui ne<br />

comprenaient pas <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s du mystère cé<strong>le</strong>ste.<br />

Or il faut, frères très chers, reconnaître dans <strong>le</strong>s mirac<strong>le</strong>s du Seigneur, notre Sauveur, des<br />

faits dont on doit croire qu’ils se sont véritab<strong>le</strong>ment accomplis, mais qui cependant, en tant que<br />

signes, nous instruisent de quelque chose. Car tout en témoignant par <strong>le</strong>ur puissance de certaines<br />

vérités, <strong>le</strong>s œuvres du Seigneur nous en affirment d’autres par <strong>le</strong>ur mystère. Remarquez-<strong>le</strong> en<br />

effet, à nous en tenir au sens littéral, nous ignorons qui fut l’aveug<strong>le</strong> dont par<strong>le</strong> notre évangi<strong>le</strong>,<br />

mais nous savons pourtant qui il symbolise dans l’ordre du mystère. L’aveug<strong>le</strong>, c’est <strong>le</strong> genre<br />

humain : exclu des joies du paradis en la personne de son premier père, privé des clartés de la<br />

lumière d’en haut, il subit <strong>le</strong>s ténèbres de sa condamnation; mais retrouvant la lumière grâce à la<br />

présence de son Rédempteur, il en vient à apercevoir, en <strong>le</strong>s désirant, <strong>le</strong>s joies de la lumière<br />

intérieure, et il pose <strong>le</strong> pas de ses bonnes œuvres <strong>sur</strong> <strong>le</strong> chemin de la vie.<br />

2. Il faut remarquer que c’est au moment où, selon <strong>le</strong> récit, Jésus approche de Jéricho que<br />

l’aveug<strong>le</strong> retrouve la lumière. Jéricho signifie «lune», et la lune, dans l’Ecriture Sainte, marque la<br />

faib<strong>le</strong>sse de la chair, car el<strong>le</strong> connaît en chacun de ses cyc<strong>le</strong>s mensuels un déclin, qui symbolise<br />

notre faib<strong>le</strong>sse de mortels. Ainsi, c’est lorsque notre Créateur approche de Jéricho que l’aveug<strong>le</strong><br />

revient à la lumière, puisque c’est quand Dieu a assumé la faib<strong>le</strong>sse de notre chair que <strong>le</strong> genre<br />

humain a recouvré la lumière qu’il avait perdue. C’est parce que Dieu subit la condition humaine<br />

que l’homme est é<strong>le</strong>vé à la condition divine.<br />

C’est avec raison que cet aveug<strong>le</strong> nous est représenté à la fois assis au bord du chemin et<br />

en train de mendier, car la Vérité en personne a dit : «Je suis <strong>le</strong> Chemin.» (Jn 14, 6). Celui qui ne<br />

connaît pas la clarté de la lumière éternel<strong>le</strong> est donc un aveug<strong>le</strong>. Si toutefois il a commencé à<br />

croire au Rédempteur, il est assis au bord du chemin. Cependant, s’il néglige de prier et s’abstient<br />

de supplier Dieu pour recouvrer la lumière éternel<strong>le</strong>, l’aveug<strong>le</strong> est bien assis au bord du chemin,<br />

mais il ne mendie pas. En revanche, si en même temps qu’il croit, il reconnaît que son cœur est<br />

aveug<strong>le</strong> et demande à recouvrer la lumière de vérité, alors l’aveug<strong>le</strong> est assis au bord du chemin et<br />

il mendie. Celui donc qui reconnaît <strong>le</strong>s ténèbres de son aveug<strong>le</strong>ment et qui comprend que lui<br />

manque la lumière de l’éternité, qu’il crie du fond du cœur, qu’il crie de toute son âme et dise :<br />

«Jésus, fils de David, aie pitié de moi!»<br />

Mais écoutons ce qui advint tandis que l’aveug<strong>le</strong> criait : «Ceux qui marchaient devant <strong>le</strong><br />

réprimandaient pour <strong>le</strong> faire taire.»<br />

3. Que représentent ceux qui précèdent l’arrivée de Jésus, sinon la fou<strong>le</strong> des désirs<br />

charnels 3 et la tempête des vices, qui, avant la venue de Jésus en notre cœur, dissipent nos<br />

2 «Charnel» désigne pour saint <strong>Grégoire</strong> tout ce qui appartient à la nature b<strong>le</strong>ssée de l’homme, tant que la grâce n’est<br />

pas venue la guérir et la <strong>sur</strong>é<strong>le</strong>ver. Il s’oppose à «spirituel», qui s’applique à la nature réformée et <strong>sur</strong>é<strong>le</strong>vée par la<br />

grâce. Il ne faut <strong>sur</strong>tout pas comprendre «charnel» au sens de «corporel». Le corps n’est pas en lui-même plus<br />

mauvais que l’âme. Comme <strong>le</strong> dit saint Augustin, «ce n’est pas la chair corruptib<strong>le</strong> qui rend l’âme pécheresse, mais au<br />

contraire l’âme pécheresse qui a rendu la chair corruptib<strong>le</strong>» (De civitate Dei XIV, 3).<br />

3 Les désirs charnels, c’est la concupiscence déréglée par <strong>le</strong> péché originel, c’est-à-dire ce fond vicié de notre nature<br />

qui nous porte au mal par un appétit désordonné des plaisirs. «L’homme, s’il avait voulu observer <strong>le</strong> précepte divin,<br />

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