MIROIR ET CONNAISSANCE DANS LA POÉSIE DES TANG ... - AFEC

30 F. HU-STERK
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Mais d'abord nous voudrions apporter quelques
précisions - sans lesquelles les images poétiques pourraient
rester obscures - sur le miroir en tant qu'objet et
sur son rôle dans la tradition politico-religieuse chinoise.
Si le miroir dans la poésie peut être image, symbole,
ou plus largement peut évoquer tout processus de figuration,
c'est avant tout un objet bien réel. L'analyse du
caractère chinois originel est révélatrice. Le caractère
signifiant «miroir», jian, représentait un homme se penchant
sur un «bassin» pour se voir :
Voir (J œil + A homme)
Voir ou se voir (un homme se penche sur
un bassin pour se voir)
Le miroir (addition de la clé du métal)
Ce «bassin», à l'origine en terre cuite, fut fondu ensuite
en bronze, d'où l'apparition de la clé du métal. Il
servait sans doute à la toilette et également à conserver
les aliments dans la glace 3 .
On s'aperçut très vite que, même sans eau, le visage
se reflétait dans le bassin; de là l'origine du miroir
comme objet spécifique. Le morceau de bronze devint ultérieurement
un objet plus esthétique, orné de motifs et
de décorations. Et pourtant, l'image littéraire du miroir
restera intimement attachée à son sens originel d'eau
immobile et de miroir liquide. Les deux plus anciens
miroirs en bronze découverts en Chine en 1975 et 1976
dateraient d'environ quatre mille ans 4 . Le caractère jing
ne fait son apparition que beaucoup plus tard. On le
rencontre pour la première fois dans un texte de Mozi :
«L'homme de bien ne se mire (jing) pas dans l'eau mais
dans les hommes. Quand on se mire dans l'eau, on voit
son visage. Quand on se mire dans les hommes, on connaît
bons et mauvais présages» 5 . Xu Shen, dans le Shuo-