Rapport mission dogon 2002 - Alain Gallay
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TRADITION C : SHERES D’ENDOGAMIE<br />
Forgerons et potières étrangères<br />
On notera également sur le Plateau méridional quelques<br />
patronymes manifestement d’origine étrangère<br />
témoignant parfois d’unions exceptionnelles entre<br />
classes artisanales distinctes (tableau 7). Ces cas, qui<br />
restent rares, témoignent en fait de deux mécanismes<br />
distincts qui peuvent se combiner. Dans le premier<br />
cas, des mariages entre forgerons des Tomo et des<br />
femmes de classes artisanales étrangères témoignent<br />
d’un certain degré d’ouverture, très exceptionnel, en<br />
direction d’autres classes artisanales. Dans le second<br />
cas, nous sommes en présence d’un phénomène<br />
d’ordre strictement économique : des familles de<br />
forgerons d’origine étrangère s’installent dans une<br />
région dominée par une classe artisanale locale<br />
entretenant des relations privilégiées avec les classes<br />
paysannes autochtones. Ces diverses situations<br />
ne sont pas sans conséquence sur l’évolution et la<br />
diffusion des techniques céramiques.<br />
1. On signalera tout d’abord quelques unions<br />
impliquant des Karambé ou des Dégoga dont les<br />
épouses pratiquent en principe la tradition D.<br />
- A Koko, M. Arama (3777), originaire de Simi,<br />
a épousé un Karambé et continue à pratiquer la<br />
technique du fond retourné , alors que ses coépouses<br />
(Karambé et «Samasseku») pratiquent la<br />
tradition D.<br />
- A Nomono Bondo, H. Karambé (5728) a épousé<br />
un Arama et pratique uniquement la technique du<br />
fond retourné.<br />
- A Néné, L. Karambé (5507), originaire de Vouin,<br />
a épousé un forgeron Konaté parlant le bambara.<br />
Elle dit pratiquer les mêmes techniques que les<br />
autres femmes de la concession (les potières<br />
ETUDE ETHNOARCHEOLOGIQUE DES TRADITIONS CERAMIQUES DU PAYS DOGON<br />
21<br />
connaissent les trois techniques de la tradition<br />
C). Elle a appris la céramique avec sa mère, une<br />
Dégoga, et affi rme que les femmes des forgerons<br />
mun<strong>dogon</strong> pratiquent les mêmes techniques que<br />
les potières ton djèmè. Mais fait-elle vraiment<br />
la distinction entre les différentes techniques<br />
utilisées par les femmes de forgerons ? Cette<br />
information demande confi rmation dans la mesure<br />
où, en l’état actuel des enquêtes, les potières<br />
Karambé et Dégoga pratiquent la tradition D.<br />
2. A Guiloveli, plusieurs potières témoignent d’une<br />
situation complexe impliquant des patronymes<br />
d’origine tomo (Djo), mun<strong>dogon</strong> (Karambé),<br />
bambara (Dembélé) et sonraï (Maiga). Ces<br />
dernières pratiquent apparemment toutes le<br />
montage sur fond retourné, technique peu<br />
spécifi que se rencontrant dans de nombreuses<br />
traditions, une situation qui ne facilite pas<br />
l’évaluation de ce contexte social et historique.<br />
La présence de potières Dembélé peut néanmoins<br />
s’expliquer par la proximité de villages bambara<br />
sur cette frange méridionale du Delta intérieur.<br />
La présence d’un patronyme pour le moins<br />
exceptionnel dans cette région, Maiga, trouve, elle,<br />
son origine dans l’histoire de la fondation de ce<br />
village par les Tomo (cf. infra). Toutes les potières<br />
se considèrent comme des femmes des forgerons des<br />
Tomo. La présence de plusieurs potières d’origine<br />
bambara dans ce village pourrait fournir un indice<br />
sur l’origine de la technique du fond retourné chez les<br />
potières des Tomo occupant les villages du Plateau et<br />
de la Falaise (tradition C1). On observe en effet cette<br />
unique technique dans la tradition bambara dite du<br />
Bani (<strong>Gallay</strong>, Huysecom, Mayor, 1998).