Rapport mission dogon 2002 - Alain Gallay
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TRADITION C : SHERES D’ENDOGAMIE<br />
4. Données historiques sur l’histoire des<br />
familles de forgerons<br />
On aborde ici l’histoire des clans de forgerons<br />
en tant que facteur pertinent dans l’histoire de<br />
la mise en place des traditions céramiques. La<br />
mémoire généalogique des lignées paternelles reste<br />
relativement peu étendue, soit de 3 à 4 générations<br />
et au maximum de 6 générations. Les déplacements<br />
des familles se limitent, ici encore, à des villages du<br />
Plateau. Les données les plus complètes concernent<br />
la dispersion des Arama à partir des villages de la<br />
Falaise, en particulier Simi, en direction de l’Ouest<br />
et de la marge deltaïque, migration très récente ne<br />
remontant qu’à deux ou trois générations. L’histoire<br />
de la fondation du village de Guilovéli permet<br />
d’illustrer le rôle des forgerons dans les négociations<br />
précédant l’installation d’un nouveau village et<br />
illustre un épisode du repeuplement de la région par<br />
les Tomo.<br />
Les clans de forgerons ont en principe des relations<br />
privilégiées avec certains groupes d’agriculteurs<br />
et portent souvent les mêmes noms de clans que<br />
leurs maîtres. On pourrait donc avancer que « les<br />
forgerons des Tomo sont des Tomo ». Cette liaison<br />
étroite n’exclut pourtant aucunement d’autres formes<br />
de partenariat permettant de répondre à la demande<br />
économique. On peut donc trouver des forgerons<br />
travaillant dans des groupes étrangers. La logique<br />
des associations est essentiellement fondée sur les<br />
besoins des agriculteurs en artisans du fer. On peut<br />
donc avancer que la logique de la production de la<br />
poterie est partiellement conditionnée par la logique<br />
de la production du fer. L’introduction du « temps<br />
court » dans la reconnaissance des mécanismes de<br />
mise en place des traditions céramiques doit donc<br />
faire intervenir les déplacements des forgerons qui<br />
répondent aux demandes en instruments de métal<br />
venues des familles de paysans et contribuent par ce<br />
biais à défi nir la géographie des sphères de mariage<br />
de leurs épouses.<br />
Quelques données historiques ont été réunies<br />
dans cette optique sur l’histoire des clans Arama,<br />
Djo, Sobengo et Erikan du Plateau. La mémoire<br />
ETUDE ETHNOARCHEOLOGIQUE DES TRADITIONS CERAMIQUES DU PAYS DOGON<br />
29<br />
généalogique des lignées paternelles (la seule testée)<br />
reste peu étendue, soit de 3 à 4 générations et au<br />
maximum de 6 générations. Les déplacements des<br />
familles se limitent, ici encore, à des villages du<br />
Plateau. Quelques données sur la dispersion des<br />
Arama à partir de Simi, où la continuité généalogique<br />
en ligne paternelle a été rompue, ont été recueillies.<br />
Importance de la zone métallurgique de la<br />
Falaise<br />
Les forgerons insistent tous sur l’importance de la<br />
Falaise pour l’ancienne production du fer. On sait<br />
en effet que les sédiments du pied de la Falaise,<br />
notamment entre Kobo et Ségué, contiennent, à<br />
plus de 15 m de profondeur, des horizons riches en<br />
composés métalliques de type goethite et hématite<br />
(Huysecom 1996). Plusieurs sites de réduction du<br />
fer, qui ont cessé leur activité entre le début des<br />
années soixante et 1976, se rencontrent donc dans<br />
cette région :<br />
« Autrefois, les forgerons allaient fondre à côté de<br />
Ségué. Ils allaient là-bas car c’est la seule région<br />
où l’on trouve du minerai de fer. Ils allaient là-bas<br />
seulement pour la fonte. Les villages de fonte sont<br />
Dinyi, Guilé et Bou. Leurs ancêtres n’ont jamais<br />
travaillé le fer dans les villages de la Plaine. Ils<br />
allaient fondre sur la Falaise, car il n’y a pas de<br />
minerai sur le Plateau » (Boubakari Konaté et<br />
Arouna Konaté. Néné : 7.2.<strong>2002</strong>).<br />
Origine des forgerons tomo du Plateau<br />
Les informations recueillies témoignent du rôle de<br />
premier plan joué par le village de Simi dans l’histoire<br />
des forgerons Arama (fi g. 5 et 6).<br />
« Les forgerons Arama de Néné sont originaires<br />
de Simi à l’est de Wo. Ils étaient à Simi bien avant<br />
les temps coloniaux, bien avant Sékou Ahmadou.<br />
Il ont quitté Simi pour s’installer à Touni (3.5393<br />
/ 14.0758), puis ont quitté Touni il y a 71 ans pour<br />
venir s’installer à Néné. Avant Simi, ils venaient du<br />
Mandé » (Boubakari Arama, Arouna Konaté. Néné :<br />
7.2.<strong>2002</strong>).