1 LA PRIÈRE DU CŒUR de Jean Lafrance, prêtre (1931 ... - Kerit
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<strong>Jean</strong> <strong>Lafrance</strong><br />
cela que les moines bâtissent <strong>de</strong>s sanctuaires sur la montagne pour que leur<br />
prière soit portée par celle du cosmos. Le cosmos entier est nourri par la prière,<br />
seulement il faut que cette prière puisse jaillir. Il faut donc <strong>de</strong>s hommes pour<br />
l’exprimer; ceux-ci donnent un sens au mon<strong>de</strong> en libérant la prière du cosmos.<br />
L'homme retrouve alors sa vraie nature, et la prière méthodique a pour but <strong>de</strong><br />
nous mettre en état <strong>de</strong> prière, c’est-à-dire <strong>de</strong> nous faire <strong>de</strong>venir nous-mêmes.<br />
Alors, dit le moine d'Orient, « le Nom <strong>de</strong> Jésus <strong>de</strong>vient une espèce <strong>de</strong> clé qui<br />
ouvre le mon<strong>de</strong>, un instrument d’offran<strong>de</strong> secrète, une apposition du sceau<br />
divin sur tout ce qui existe. L’invocation du Nom <strong>de</strong> Jésus est une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
transfiguration <strong>de</strong> l’univers ».<br />
Maxime le Confesseur dit que, dans l’état <strong>de</strong> prière continuelle, l'homme<br />
recueille les logoi <strong>de</strong>s choses. Il voit la Parole subsistante <strong>de</strong> Dieu en toutes<br />
choses, cette Parole par qui tout a été créé, il la recueille, non pour se<br />
l’approprier, mais pour l’offrir à Dieu. Il décèle « le visage comme une icône », le<br />
visage étant le lieu par excellence où l'homme traduit le fond <strong>de</strong> son être, qui<br />
est relation. Comme dit Isaac le Syrien, « il voit la flamme <strong>de</strong>s choses » et<br />
découvre le mon<strong>de</strong> comme un buisson ar<strong>de</strong>nt. Il voit que le mon<strong>de</strong> est déjà<br />
secrètement transfiguré par le Christ, et il hâte par-là même la manifestation <strong>de</strong><br />
cette transfiguration du mon<strong>de</strong> en Christ. Ainsi s’exprime le pèlerin :<br />
« Quand en même temps je priais au fond du cœur, tout ce qui m’entourait<br />
m’apparaissait sous un aspect ravissant : les arbres, les herbes, les oiseaux, la<br />
terre, l’air, la lumière, tous semblaient me dire qu'ils existent pour l'homme, qu'ils<br />
témoignent <strong>de</strong> l’amour <strong>de</strong> Dieu pour l'homme; tout priait, tout chantait la gloire<br />
à Dieu! Je comprenais ainsi ce que la Philocalie appelle la connaissance du<br />
langage <strong>de</strong> la création, et je voyais comment il est possible <strong>de</strong> converser avec<br />
les créatures <strong>de</strong> Dieu » (Récits d’un Pèlerin russe, pp. 56-57).<br />
Une prière pénétrée d’action <strong>de</strong> grâce.<br />
Dans le texte <strong>de</strong>s Philippiens que nous avons cité plus haut, Paul invite le<br />
chrétien à supplier Dieu en tout besoin, mais il lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que sa prière soit<br />
pénétrée d'action <strong>de</strong> grâce, et la raison <strong>de</strong> cette louange, c'est que le Seigneur<br />
est proche.<br />
Ne vous inquiétez <strong>de</strong> rien, mais en toute circonstance, par la prière et la<br />
supplication accompagnées d'action <strong>de</strong> grâce, présentez vos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s à<br />
Dieu (Ph 4, 6).<br />
Il est important <strong>de</strong> noter la première phrase <strong>de</strong> Paul : « Ne soyez inquiets <strong>de</strong><br />
rien »; en d’autres termes : ne faites pas <strong>de</strong> bouillon <strong>de</strong> culture avec vos soucis!<br />
Nous découvrons ici la source <strong>de</strong> la prière <strong>de</strong> louange, chez celui qui voit la<br />
présence du Ressuscité en toutes choses. Au fond, c'est sa foi et sa confiance<br />
qui le poussent à bénir Dieu. Tant que nous comptons sur nous, nos propres<br />
forces, nos mérites, nos vertus ou notre milieu, nous <strong>de</strong>meurons inquiets et<br />
peureux. Mais le jour où notre regard est uniquement porté en Jésus Christ, notre<br />
centre <strong>de</strong> gravité a basculé dans le Père et nous exultons <strong>de</strong> joie, parce que<br />
nous recevons chaque instant <strong>de</strong> notre vie comme un don <strong>de</strong> la tendresse <strong>de</strong><br />
Dieu. La confiance, c'est la préférence permanente donnée à une autre<br />
lumière que la nôtre. L’important dans la foi, c'est la souplesse inénarrable <strong>de</strong><br />
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La prière du coeur