dossier - La Ligue de l'Enseignement

clichés instantanés en lumière
naturelle et de travailler plus
discrètement, ce qui devait naturellement
se sentir dans leurs
clichés. La conception du photoreportage
et de la photographie
elle-même en est radicalement
modifiée.
Suite à la Grande Dépression,
le gouvernement américain exploite
à son tour la photographie
à des fins politiques. La
Farm Security Administration,
créée avec l’objectif d’aider les
fermiers dans la misère, se dote
rapidement d’une section photographique
destinée à documenter
les effets du New Deal.
A l’origine du photojournalisme,
une douzaine de photographes,
parmi lesquels Dorothea Lange
et Walker Evans, mettent leur
art au service de l’être humain,
dressent un bilan objectif des
conditions de vie des misérables
paysans américains et parviennent
à sensibiliser l’opinion.
Également de manière engagée,
le correspondant de guerre
Robert Capa effectue des reportages
sur la Guerre civile espagnole
et souligne les brefs succès
des troupes républicaines.
Sa photographie « Mort d’un
soldat républicain », montrant
Frederico Borrell Garcia en
train de s’effondrer suite à un
tir, marque à tout jamais l’histoire
du médium. Pendant la
Seconde Guerre mondiale, il
photographie, au péril de sa vie,
les débarquements alliés, notamment
celui en Normandie.
Au lendemain de la guerre, il
co-fonde, avec Henri Cartier-
Bresson, David Seymour et
George Rodger, la prestigieuse
agence coopérative Magnum.
La photographie du quotidien
L’événement le plus marquant
pour la photographie
amateur est l’apparition, en
1948, de l’appareil Polaroïd, qui
permet la photographie instantanée
en une seule opération et
produit un tirage positif seulement
une minute après la prise
du cliché.
En Allemagne, de nombreux
photographes privilégient l’objectivité
et le dépouillement. De
1910 à 1960, August Sander entame
un travail de typologie des
Allemands de la République de
Weimar et réalise quarante-cinq
portfolios de portraits, classés en
sept groupes sociaux. Dans un
registre tout aussi conceptuel,
les époux Becher accumulent
des clichés de formes architecturales
précises, des châteaux
d’eau, des silos, des fourneaux,
et les agencent symétriquement
pour mieux faire surgir les similitudes.
Tous deux enseignants
à l’Académie des Beaux-Arts
de Düsseldorf, ils réussissent à
influencer de nombreux photographes
allemands.
En France, la photographie
d’auteur se développe autour
de la personnalité d’Henri
Cartier-Bresson. Tout comme
les photojournalistes, ses adeptes
se lancent généralement en
free-lance et tentent d’immortaliser
des situations quotidiennes.
Ils refusent de considérer l’appareil
comme un outil permettant
de rendre objectivement la
réalité et estiment, a contrario,
que le regard du photographe
agit de manière subjective.
La photographie plasticienne
Se détachant du photojournalisme
à l’américaine, de plus
en plus de professionnels se rapprochent,
dès la fin des années
1960, des arts plastiques. Enclins
à faire exploser les clivages entre
les médiums, de nombreux
artistes, comme Jeff Wall, se
lancent dans la conception de
« tableaux photographiques » ou
d’installations photographiques
et lient leur pratique à d’autres
techniques, telle l’architecture.
Plusieurs d’entre eux se mettent
à exploiter la photographie de
manière conceptuelle. D’autres,
refusant le spectaculaire, tentent
de réduire la différence entre
le réel et sa représentation.
Parmi eux, une poignée essaie
surtout de saisir l’intimité des
modèles, sur l’exemple de Nan
Alfred Stieglitz. Entrepont, 1907. Héliogravure.
Goldin. Enfin, dans un registre
beaucoup plus pop ou baroque,
quelques artistes, parmi lesquels
Bettina Rheims, Pierre et Gilles,
ou encore Cindy Sherman,
pastichent les icônes traditionnelles
et modernes. Oniriques,
leurs scènes sont composées de
personnages aux visages lisses,
prenant la pose dans des scènes
généralement kitsch.
La photographie numérique
En 1981, Sony dévoile déjà
le tout premier appareil photo
numérique couleur. Un disque
magnétique permet le stockage
de cinquante images en
couleurs d’une définition de
280000 pixels, et un lecteur
approprié permet d’afficher
les photos sur un téléviseur. À
partir de 1994 apparaissent des
appareils photo numériques
tels que nous les connaissons à
l’heure actuelle, équipés d’un
écran couleur LCD à l’arrière.
L’explosion du marché se pro-
duit vers 1997 avec une rapide
multiplication des modèles. La
définition, d’abord inférieure
au million de pixels, croît rapidement,
et atteint jusqu’à 80
millions de pixels pour un dos
numérique professionnel. ■
n° 87 | février 2012 éduquer 23