dossier - La Ligue de l'Enseignement
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nome en parallèle à ses étu<strong>de</strong>s.<br />
« Il y a plusieurs possibilités d’apprentissage<br />
<strong>de</strong> la photographie ; bien sûr, il y a<br />
d’un côté l’école, mais il y a aussi la vie. »,<br />
nous explique-t-il. « A mes yeux, il n’y a<br />
pas <strong>de</strong> meilleur moyen d’apprendre qu’en<br />
pratiquant, donc il ne faut pas avoir peur,<br />
il faut y aller. Apprendre la photographie,<br />
c’est comme apprendre une langue. J’ai<br />
beaucoup d’amis qui ont étudié le néerlandais<br />
ou l’anglais et qui connaissent la grammaire,<br />
les temps primitifs, mais qui n’ont jamais<br />
eu <strong>de</strong> vraie discussion avec quelqu’un.<br />
Résultat : ils sont incapables d’avoir une<br />
conversation poussée. Pour apprendre l’anglais,<br />
il faut regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s films en anglais,<br />
il faut oser parler anglais avec quelqu’un ;<br />
la photographie, c’est pareil. Tu peux faire<br />
<strong>de</strong>s années d’étu<strong>de</strong>s, ça ne sert à rien si tu<br />
n’expérimentes pas. Il faut vraiment lâcher<br />
prise. Avec le numérique, aujourd’hui, c’est<br />
d’autant plus facile : on voit immédiatement<br />
le résultat, on peut corriger tout <strong>de</strong> suite ce<br />
qui ne va pas. »<br />
Jefta nous confie qu’au début, il ratait<br />
beaucoup ses photos argentiques, ce qui<br />
l’amenait à payer le développement d’un<br />
film sur lequel il n’y avait rien <strong>de</strong> bon : au<br />
final, il n’osait même plus déclencher. Or,<br />
même si c’est important <strong>de</strong> penser avant<br />
d’appuyer sur le déclencheur, <strong>de</strong> ne pas<br />
photographier n’importe quoi sans réfléchir,<br />
il ne faut pas non plus avoir peur <strong>de</strong><br />
prendre <strong>de</strong>s photos. C’est là tout l’intérêt<br />
du numérique. Aujourd’hui, n’étant<br />
plus limité par le prix <strong>de</strong> la pellicule, Jefta<br />
n’hésite pas à prendre plusieurs photos du<br />
même sujet. Lorsqu’il réalise <strong>de</strong>s photos<br />
<strong>de</strong> mo<strong>de</strong>, par exemple, et que la modèle<br />
fait une pose qu’il aime bien, il en fait trois<br />
photos avec un angle légèrement différent<br />
et choisit la meilleure sur l’ordinateur.<br />
« L’argentique ne permet pas vraiment ça, en<br />
tout cas pas à moindres frais. », explique-t-il.<br />
« Le numérique représente un investissement<br />
<strong>de</strong> départ mais, au final, la photo est <strong>de</strong>venue<br />
quelque chose <strong>de</strong> très abordable. »<br />
Heureuses rencontres<br />
Si la vie est la meilleure <strong>de</strong>s écoles, c’est<br />
aussi pour les rencontres qu’elle permet.<br />
Jefta a toujours eu un assez bon contact<br />
avec les artistes, dont certains lui ont énormément<br />
appris. Il doit notamment beaucoup<br />
à un certain photographe <strong>de</strong> Huy,<br />
se surnommant Linographe 1 . Ce <strong>de</strong>rnier<br />
rassemblait plusieurs photographes et modèles<br />
pour <strong>de</strong>s week-ends entiers <strong>de</strong> prises<br />
<strong>de</strong> vues, leur permettant ainsi <strong>de</strong> s’exercer<br />
mais aussi <strong>de</strong> se confronter au travail <strong>de</strong>s<br />
autres, d’échanger <strong>de</strong>s idées, <strong>de</strong>s conseils,<br />
<strong>de</strong>s manières <strong>de</strong> faire.<br />
Une autre rencontre enrichissante est<br />
celle <strong>de</strong> Jefta avec l’un <strong>de</strong> ses professeurs.<br />
Après obtention <strong>de</strong> son CESS en infographie<br />
publicitaire, Jefta commence à étudier<br />
les arts numériques au Carré <strong>de</strong>s Arts,<br />
à Mons. Si l’atelier lui plaît, c’est pourtant<br />
son cours d’Histoire <strong>de</strong> l’art contemporain<br />
qui va le lancer sur la voie <strong>de</strong> ses<br />
projets actuels. Le cours est dispensé par<br />
Christophe Veys, qu’il n’hésite pas à appeler<br />
son « mentor » du moment. Pourquoi ?<br />
Tout d’abord parce qu’il lui a donné les<br />
clés <strong>de</strong> ce qu’était l’art contemporain.<br />
Jefta étant par nature quelqu’un <strong>de</strong> plutôt<br />
figuratif, l’art abstrait et l’art minimal lui<br />
échappaient complètement. Ensuite, parce<br />
qu’au travers <strong>de</strong> ses cours, son professeur<br />
lui a fait découvrir énormément d’artistes :<br />
« C’est quelque chose <strong>de</strong> très important, il<br />
faut savoir ce qui se fait autour <strong>de</strong> soi pour<br />
arriver à se faire soi-même. », explique-t-il.<br />
C’est ainsi que Jefta repère <strong>de</strong> nouvelles<br />
sources d’inspiration, notamment à travers<br />
Déconstructions<br />
le body art, qui l’a amené à commencer<br />
son premier vrai projet <strong>de</strong> série photographique,<br />
la série « Peintof ».<br />
Le corps comme support<br />
Dans « Peintof », sa première série, Jefta<br />
recouvre le corps <strong>de</strong> ses modèles avec <strong>de</strong><br />
la peinture, et les photographie avec un<br />
certain éclairage. Mais il ne s’arrête pas là :<br />
au lieu <strong>de</strong> les retoucher sur Photoshop, il<br />
en peint une copie et ensuite mélange la<br />
photo avec la peinture qu’il en a faite. Il<br />
imprime enfin l’ensemble sur toile. Il met<br />
ainsi le spectateur face à une œuvre hybri<strong>de</strong>,<br />
ambiguë, qui ressemble à une peinture<br />
par le côté très brut <strong>de</strong> la matière mais qui<br />
ne peut <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce pas en être une,<br />
<strong>de</strong> par les détails du corps qui apparaissent.<br />
C’est cette incohérence qui intéresse<br />
Jefta, ce questionnement qui naît chez le<br />
spectateur. Il aime jouer avec les frontières<br />
<strong>de</strong>s genres, et il avoue qu’il le doit en gran<strong>de</strong><br />
partie à l’ouverture d’esprit que lui a<br />
apportée son cours d’art contemporain.<br />
Par après, toujours inspiré par le body<br />
painting, Jefta entame une <strong>de</strong>uxième série,<br />
n° 87 | février 2012 éduquer 35