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JE SUIS LE FRUIT DE MA CULTURE.. JE SUIS LE SUPPORT DE LA CONTINUITE Ito WAIA vit à la tribu d'Azareu, près de Bourail. Artiste ayant plusieurs cordes à son arc, Ito n 'hésite pas à passer de la peinture au graphisme, de la sculpture sur bois à celle sur bambou. Curieux de tout, ii revient d'un stage en Nouvelle- Zélande, où, au contact d'artistes venant d'une douzaine de pays il a enrichi ses techniques et son imaginaire. MWA VEE : Comment t'est venue la vocation d'artiste? Ito WAÏA: Cela fait trois-quatre ans que je me lance dans l'art. Ma passion quand j'étais gamin, c'était le graphisme. Les dessins que les enfants font, c'est du pur graphisme. Il n'y a pas de détails. C'est l'ensemble qui reflète la pensée de l'être. Les couleurs vont donner les sensations de la personne sur le moment. Pendant les cours, j'étais très souvent dans la lune. Un peu plus tard, j'étais curieux, je regardais les pein- tures. Quand j'avais du temps, je faisais des dessins au stylo, au crayon papier que je donnais aux copains. Ce que je faisais sortait de l'ordinaire, c'était quelque chose qui sortait de moi. Je voyais mais je n'avais pas vraiment conscience. Comme j ' avais accumulé quelques dessins, les copains disaient LES CRITIQUES SONTTOUJOURS POSITIVES, qu'il y avait de la MÊME SI ELLES SONT NEGATIVES valeur et qu'il fallait queje sorte. La première exposition, c'était en 1981, à l'ancienne Mairie de Bourail. J'ai pris mon courage à deux mains. J'ai créé 5 dessins: 2 abstraits et 3 naïfs. J'ai fait un effort d'encadrement, de mise en valeur. Il y avait les femmes qui expo- saient des travaux manuels. J'ai été voir une tante et je lui ai demandé si je pouvais exposer avec ses vanneries. J'ai simplement demandé qu'elle recueille toutes les critiques positives et négatives des gens sur ce que j ' avais fait. ARTISTES KANAK : ITO WAIA ITO WAÏA La chose la plus importante pour moi, ce n'était pas de vendre mes tableaux. Je n' ai pas voulu rester, j ' avais peur de recueillir la critique moi-même. MV - Quelles ont été les critiques ? IW - Les critiques sont toujours positives, même si elles sont négatives ! La première critique, c'était que ce n'était pas assez cher pour ce que je faisais © Mwà Véé/ADCK-CCT | www.adck.nc
Et la deuxième, c'était qu'il fallait que je mette en valeur l'encadrement. J'en ai vendu deux. J'étais fier, j'étais satisfait. Je sentais que j'allais faire un autre pas avec les critiques. Les critiques, c'est comme la canne de l'aïeul, c'est un appui pour avancer. MV - Qu'utilises-tu comme matière pour tes travaux? IW - Je suis polyvalent, j 'ai plusieurs cordes à mon arc; quand je suis fatigué d'une matière, je change. En sculpture, j'utilise le cocotier, le litchi, le bambou, le houp. Sinon tous les bois sont bons. Sur gravure, c'est plutôt le bambou. C'était utilisé dans l'époque passée. LE MAITRE D'UVRE (EST LA NATURE, MOI JE METS EN VALEUR J'ai fait 2 bambous gravés. Je fais plutôt des sculptures avec les bambous malformés. Le maître d'oeuvre, c'est la nature, moi je mets en valeur. Je fais des statuettes, des "lutins". Quand tu es dans la banbounière, c'est silencieux. Il y a un tapis de feuilles, il n'y a rien qui pousse, on dirait une moquette quand tu vas choisir le bambou. Quand il y a du vent, on pourrait dire qu'il y a des grincements, comme des voix; la première fois, ça paraît bizarre, c'est impressionnant, il y a une présence ... Les lutins, c'est quelque chose de petit ... Moi, j'utilisais la malformation et j'ai juste réussi à créer le visage à travers cette malformation. Le visage est déjà présent; quand je choisis le bambou, il y a déjà le visage dessus, j'ai juste à prendre mes points de repère pour le faire sortir. Photo : Ito Wala Parfois, j ' arrive à distinguer le masculin ou le féminin. Moi, je suis un plus pour lui, pour le sortir de "l'ombre". Quand je rentre dans la bambounière, je ne choisis pas n'importe lequel . . . il y a quelque chose. Je cherche le détail qui va faire l'ensemble. Les matières que j'utilise pour faire les lutins, c'est la fibre de cocotier pour faire la coiffe des ancêtres ou les parures, les plumes aussi. Je vais varier avec des feuilles d' arbre. MV - Tu reviens de TE ATINGA, la rencontre d'artistes indigènes, qui s'est tenue en Nouvelle-Zélande? LES LUTINS SONT PARTIS EN NOUVELLE-ZELANDE, AU JAPON, A HAWAI © Mwà Véé/ADCK-CCT | www.adck.nc IW - J'ai été envoyé par 1'A.D.C.K., en Nouvelle-Zélande. C'est la première fois que j'ai un contact, un échange de pratiques, d'idées, de techniques avec des artistes d'autres pays. Il y avait de la sculpture sur bois, sur métal, de la poterie traditionnelle et moderne, de la peinture, du tressage (j'ai pensé aux femmes du Territoire qui auraient pu montrer la vannerie). Du collage avec du papier, du sable, des copeaux de bois. Moi, j'ai fait tout ce que je savais faire: du graphisme, de la peinture et de la sculpture sur bambou. J'étais le seul à faire cela. Les artistes n'ont jamais imaginé que l'on pouvait sculpter des lutins. Pour eux, le bambou pousse droit et ne doit pas être malformé. J'ai ramené du bambou de Nouvelle-Calédonie qui était malformé. La première question qu'ils ont posé, c'est "Combien de temps as-tu mis pour couper ton bambou ?". J'ai réfléchi. Après, ils m'ont dit: "Quand le bambou est jeune, tu l'attaches avec un fil de fer pour lui donner la malformation ?". Alors, j'explique que je vais dans la bambounière pour choisir le bambou Mes lutins ont eu un grand succès et se sont vendus lors d'une exposition. Les lutins sont partis en Nouvelle- Zélande, au Japon, à Hawaii. MV - Est-ce que des techniques t'ont marqué? IW - Pas vraiment. Le travail du sculpteur à la tronçonneuse ... J'avais déjà vu un sculpteur de l'ue de Pâques travailler à la tronçonneuse. J'ai pensé aux artistes du pays, que ce serait bien qu'ils voient comment utiliser le matériel moderne la tronçonneuse, la ponceuse électrique, la perceuse, la scie sauteuse, . . . Ca peiinet de gagner du temps et, avec la ponceuse, ça permet une meilleure finition. Ici, on n'a pas essayé et il y a le manque de moyens pour acheter le matériel. La plupart des artistes présents avaient un haut niveau. Dans les livres en librairie, j ' ai retrouvé leurs noms. C'étaient des gens connus dans leur art. ARTISTES KANAK : ITO WAJA
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