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Format PDF - Analyses littéraires des romans de Jules Verne

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d’autre part, véritable mère <strong>de</strong> substitution finalement pour ces enfants abandonnés à leur<br />

triste sort. Expliquer dans le roman que cette bouteille jetée à la mer vient <strong>de</strong> la Maison<br />

« Cliquot », c’est procé<strong>de</strong>r à une référence très facile à comprendre (notamment à l’époque) et<br />

qui sous-tend le reste <strong>de</strong> l’aventure : sans détermination, rien ne peut se faire (<strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong><br />

déclarera d’ailleurs plus tard : « Rien ne s’est fait <strong>de</strong> grand qui ne soit une espérance<br />

exagérée »). Et ce sont bien là <strong><strong>de</strong>s</strong> femmes qui vont faire avancer les choses. Rappelons<br />

d’autre part que le début <strong>de</strong> l’intrigue se déroule en Ecosse (avec <strong>de</strong> nombreuses références à<br />

Walter Scott), une terre si chère à <strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong>, écossais du côté… <strong>de</strong> sa mère ! Quand<br />

géographique rime avec pédagogique, c’est au féminin qu’il faut le conjuguer !<br />

Autre élément important relatif à cette bouteille, après le contenant intéressons-nous plus<br />

particulièrement au contenu. Le texte retrouvé dans la bouteille, à moitié détruit, est traduit<br />

dans trois langues différentes, mais conserve toujours le même sens. Tout cela n’est pas sans<br />

rappeler un autre fait marquant du XIX° siècle : Champollion qui en 1822 déchiffre les<br />

hiéroglyphes grâce à la fameuse pierre <strong>de</strong> Rosette. En effet, comment ne pas voir ici aussi un<br />

parallèle troublant entre le manuscrit mystérieux du roman <strong>de</strong> <strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong> et cette pierre <strong>de</strong><br />

Rosette qui a permis, justement parce qu’elle reproduit en trois langues différentes le même<br />

texte (écriture hiéroglyphique, démotique et grecque), <strong>de</strong> comprendre et <strong>de</strong> déchiffrer les<br />

hiéroglyphes. De Champollion à la veuve Clicquot, <strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong> traverse ainsi tout le XIX°<br />

siècle et y laisse lui-aussi sa marque. Peut-être est-ce <strong>de</strong> là (l’exploit <strong>de</strong> Champollion) que<br />

<strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong> tire son goût pour les cryptogrammes dans ses <strong>romans</strong> ? Pour autant, faut-il<br />

douter <strong>de</strong> cette référence, indirecte, faite aux hiéroglyphes ? Non, car <strong>Jules</strong> <strong>Verne</strong> lui-même<br />

fait directement la référence à la fin <strong>de</strong> son roman : « […] ce document passablement<br />

hiéroglyphique, que huit jours après son naufrage, il avait enfermé dans une bouteille et<br />

confié aux caprices <strong><strong>de</strong>s</strong> flots. » (page 897, lors du récit d’Harry Grant qui permet aussi <strong>de</strong><br />

comprendre pourquoi Paganel s’est trompé, une fois <strong>de</strong> plus…).<br />

L’intrigue est donc lancée à partir d’une double référence historique (<strong><strong>de</strong>s</strong> références datant<br />

toutes du XIX° siècle). Pour percer le mystère que renferme ce message, à l’image <strong>de</strong><br />

Champollion avec les hiéroglyphes, il faudra toute la détermination dont a fait preuve la<br />

Veuve Clicquot après le décès prématuré <strong>de</strong> son mari. Parachevant ces éléments, c’est par un<br />

requin ayant énormément voyagé autour du globe que le message est apporté à la<br />

connaissances <strong><strong>de</strong>s</strong> différents protagonistes. Ce requin est là aussi pour rappeler que cette<br />

aventure va porter certes une forte dimension géographique (incarnée par le géographe<br />

Paganel), mais qu’elle sera surtout parsemée <strong>de</strong> nombreuses épreuves et difficultés <strong>de</strong> tous<br />

genres (dimension initiatique). Les enseignements dispensés par les « pairs » <strong>de</strong> Robert lui<br />

permettront d’affronter toutes ces étapes initiatiques (dimension pédagogique). Chose<br />

amusante, la traduction française <strong>de</strong> « peer » (en anglais = membre <strong>de</strong> la Chambre <strong><strong>de</strong>s</strong> Lords)<br />

est aussi « pair » : or Lord Glenarvan fait bien sûr partie <strong>de</strong> la Chambre <strong><strong>de</strong>s</strong> Lords ! Tout n’est<br />

donc ici qu’affaire <strong>de</strong> traduction, d’interprétation, d’analyse. Certes, mais encore faut-il savoir<br />

bien traduire ce que l’on nous met entre les mains…<br />

Toute cette aventure autour du mon<strong>de</strong> (tel est d’ailleurs le sous-titre du roman) est aussi à<br />

l’image <strong>de</strong> ce que nous avons déjà analysé dans le cadre <strong>de</strong> Cinq semaines en ballon,<br />

notamment <strong>de</strong> par les références, directes ou indirectes, qui sont faites à Œdipe et au Sphinx.<br />

Dans Les Enfants du capitaine Grant, la référence au célèbre passage mythique est indirecte,<br />

mais elle est bien présente : Paganel, perché dans son arbre, au-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus <strong>de</strong> tout le mon<strong>de</strong> (plus<br />

proche <strong>de</strong> Dieu, donc <strong>de</strong> la vérité…), telle une vigie, et répondant aux incessantes questions<br />

<strong>de</strong> ses collègues, finit par réaliser que la réponse initialement donnée concernant le<br />

déchiffrement du texte est en réalité fausse (influencé qu’il était par les premières déductions<br />

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