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Holmboe: The Complete String Quartets<br />
The Kontra Quartet<br />
Dacapo 8.207001 (7 CD : 472 min 25 s)<br />
★★★★★✩<br />
<strong>La</strong> musique de Vagn<br />
Holmboe (1909-1996)<br />
est enracinée dans la<br />
nature nordique, ses<br />
espaces vastes et glaciaux,<br />
sa rusticité et son<br />
folklore. Son corpus de<br />
quatuors à cordes est<br />
l’un des plus solides (musicalement et<br />
artistiquement parlant) qui soient, à la hauteur<br />
de celui de Chostakovitch, même s’il ne<br />
fait malheureusement pas encore partie du<br />
répertoire courant. Même si Holmboe a<br />
attendu assez tard (43 ans) avant d’écrire son<br />
premier opus pour cette formation, une fois<br />
lancé, il n’arrêta plus d’en composer jusqu’à<br />
quelques années avant sa mort. Résultat : une<br />
vingtaine d’œuvres aux accents sombres et<br />
graves, imprégnés de couleurs bartokiennes,<br />
de grisaille émotionnelle, mais aussi d’espoir<br />
et de rédemption. Un condensé du siècle dernier<br />
quoi. Au prix de 2 CD pour un total de<br />
7, on serait fou de s’en passer. FC<br />
Impressions on Chopin: Keep Swingin’ Chopin<br />
Leszek Mozdzer, arrangements & piano<br />
Naive V5229 (65 min 20 s)<br />
★★★★★✩<br />
Leszek Mozdzer est un<br />
pianiste jazz de formation<br />
classique. Polonais<br />
de naissance, il est facile<br />
de comprendre pourquoi<br />
la musique de<br />
Chopin exerce sur lui<br />
un attrait puissant.<br />
Depuis déjà une bonne quinzaine d’année, il<br />
revisite, à la fois sur disque et en concert, le<br />
répertoire du compositeur. Ce disque Naïve<br />
est en fait une réédition d’un disque paru à la<br />
fin des années 1990. <strong>La</strong> science et l’art de<br />
Mozdzer sont en tout point fort originaux. Il<br />
ne faut pas s’attendre ici à des «variations<br />
jazzistiques» à la Peterson ou Jacques Loussier.<br />
Les lectures de Mozdzer sont littéralement des<br />
réécritures de la trame narrative et de la syntaxe<br />
chopiniennes, avec un brin d’exotisme<br />
harmonique orientalisant (il transforme ici tel<br />
nocturne ou une mazurka en improvisation de<br />
type impressionniste et modal). Loin d’être<br />
des exercices futiles ou gratuits, encore moins<br />
mercantilistes ou racoleurs, les réflexions (car<br />
ses lectures sont pleinement « réfléchies ») de<br />
Mozdzer font ressortir la modernité et l’atemporalité,<br />
ainsi que l’universalité, de Chopin.<br />
On découvre dans sa musique l’annonce de<br />
Satie et du jazz, et une ouverture au monde<br />
bien plus sincère et fondamentale qu’une certaine<br />
musique du monde actuelle. FC<br />
Mendelssohn :Œuvres pour violoncelle et piano<br />
Daniel Müller-Schott, violoncelle; Jonathan Gilad, piano<br />
Orfeo C 750 101 A (72 min 28 s)<br />
★★★★★✩<br />
L’œuvre pour violoncelle<br />
et piano de Mendelssohn<br />
n’est pas considérée<br />
généralement comme<br />
une partie majeure de sa<br />
production, en comparaison<br />
des symphonies ou<br />
des quatuors par exem -<br />
ple. Il n’en reste pas moins que la seconde<br />
Sonate (1843), bien supérieure à son aînée de<br />
l’opus 45 (1838), toutes deux gravées sur le présent<br />
CD, est une sorte de chef-d’œuvre.<br />
L’adagio se révèle être une page subtilement<br />
écrite et empreinte d’un lyrisme à la fois assagi<br />
et émouvant, tandis que les mouvements<br />
extrêmes puisent aux mêmes sources que les<br />
célèbres trios. C’est la pièce de résistance d’un<br />
programme homogène où l’on trouve aussi des<br />
Variations concertantes (1829), huit au total,<br />
gracieuses, certes, mais sans réelle originalité,<br />
ainsi que quatre œuvres brèves qu’on pourrait<br />
tenir pour des pièces de salon, transcriptions de<br />
lieder du compositeur et feuilles d’album dont<br />
l’époque était friande. Toutes ces œuvres<br />
quelque peu négligées par la discographie sont<br />
très bien servies ici par deux musiciens dont la<br />
complicité, indispensable à ce genre de réperwww.scena.org<br />
Konge af Danmark: l’Europe musicale à la cour de<br />
Christian IV<br />
Les Witches (Odile Edouard, violon; Claire Michon, flûtes;<br />
Sylvie Moquet, dessus et basse de viole; Pascale Boquet,<br />
luth et théorbe; Freddy Eichelberger, orgue)<br />
Alpha 163 (68 min 30s)<br />
★★★★★✩<br />
Ce disque est une incursion<br />
dans l’univers<br />
méconnu de la musique<br />
à la cour du Danemark<br />
du roi Christian IV dans<br />
la première moitié du<br />
XVII e siècle. On y fait<br />
des rencontres surprenantes<br />
de qualité (étant donné leur obscurité).<br />
Les noms de Pederson, Vierdanck, Maercker<br />
et Gitsou n’ont pas traversé les siècles, c’est le<br />
moins que l’on puisse dire. D’autres sont plus<br />
familiers : Scheidt, Tobias Hume, Thomas<br />
Simpson. Cela illustre l’ouverture sur le reste<br />
de l’Europe dont faisait preuve cette petite<br />
cour et son souverain, ainsi que sa volonté de<br />
recruter des esprits artistiques de haut niveau.<br />
On remarque également un lien assez étroit<br />
avec l’Angleterre (Hume, Simpson, Maynard,<br />
Robinson), ce qui n’est guère surprenant étant<br />
donné les croisements nombreux entre les<br />
deux familles royales. <strong>La</strong> production Alpha est<br />
encore une fois impeccable. Livret illustré de<br />
grande qualité, notes informatives et<br />
intelligentes, prise de son claire et équilibrée,<br />
interprétations irréprochables de l’ensemble<br />
Les Witches. <strong>La</strong> crème de la crème. FC<br />
Corigliano – Rota – Korngold: Œuvres pour piano<br />
Jimmy Brière, piano<br />
Analekta AN 2 9973<br />
★★★★★✩<br />
Dans ce disque brillant<br />
consacré aux œuvres de<br />
compositeurs primés de<br />
musique de film, Jimmy<br />
Brière, pianiste mont -<br />
réalais à la technique<br />
irréprochable, s’illustre<br />
clairement comme un<br />
artiste de la trempe de Schnabel. L’interprète,<br />
dans chacune des œuvres, livre une prestation si<br />
variée, si riche en subtilités et en surprises<br />
qu’elle confère à merveille tout son pouvoir<br />
évocateur, voire programmatique, à un tel type<br />
de musique. Somme toute, le goût du risque de<br />
Brière le sert extrêmement bien; le disque<br />
entier est un rare monument de lyrisme, tantôt<br />
radieux, tantôt effrayant, rendant bien la<br />
richesse des œuvres, particulièrement du<br />
Corigliano. L’épreuve de son premier mouvement,<br />
extrait noir consacré exclusivement à la<br />
main gauche, est parfaitement réussie!<br />
<strong>La</strong> grande expressivité chez Brière l’entraîne<br />
néanmoins à de légers excès, celui-ci sacrifiant<br />
parfois la cohérence des mouvements plus<br />
rapides et joyeux à son imagination qui<br />
évoque un peu trop l’imagerie cinémotographique,<br />
particulièrement dans Korngold. On<br />
en regrette presque l’absence d’un support<br />
visuel ! Brière n’en est pas pour autant<br />
maniéré; lesdits mouvements sont merveilleusement<br />
pétillants, légers. Ils expriment tout le<br />
charme et la magie du chef-d’œuvre d’enfance<br />
d’un compositeur de génie.<br />
JB<br />
Liszt: 12 Études d’exécution transcendante<br />
Maurizio Baglini, piano<br />
Decca 476 3882 (79 min 25 s)<br />
★★★✩✩✩<br />
Depuis sa victoire aux<br />
Masters de piano de<br />
Monte-Carlo en 1999,<br />
Maurizio Baglini fait<br />
figure de vedette pour<br />
certains, mais ce que l’on<br />
entend sur ce CD, son<br />
second chez Decca,<br />
suscite bien des réserves. <strong>La</strong> virtuosité indispensable<br />
n’y trouve pas son compte et l’instabilité<br />
rythmique y semble généralisée, par excès de<br />
précaution ou pour sacrifier aux coquetteries<br />
d’un rubato artificiel. Ainsi, dans Mazeppa,<br />
l’imperceptible hésitation dans les redoutables<br />
sauts entre octaves et tierces d’accompagnement<br />
partagées entre les deux mains suffit pour<br />
nuire à l’élan d’une course qu’on imagine<br />
effrénée. De plus, le respect des notes staccato<br />
et lourées, nécessaire pour distinguer les voix et<br />
faire ressortir la structure de la pièce, n’est pas<br />
observé. Des négligences similaires peuvent être<br />
relevées ailleurs, entre autres dans Wilde Jagd et<br />
Chasse-neige. Les pièces plus lentes du recueil,<br />
d’une atmosphère délicate difficile à rendre,<br />
paraissent plutôt longuettes, la poésie n’étant<br />
pas de la partie. Le programme est complété par<br />
deux pièces des 12 Grandes Études de 1837<br />
dont la virtuosité envahissante et gratuite<br />
justifie les remaniements de Liszt en vue d’une<br />
exécution simplement… «transcendante»! AL<br />
34 OCTOBRE <strong>2010</strong> OCTOBER