L'influence de la forme urbaine sur la mobilitÃ© quotidienne. Une ...

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L’interaction entre usage du sol et comportements de mobilité Figure 5. La causalité indirecte entre les caractéristiques socio-démographiques et la forme urbaine Il est possible d’illustrer cet argument par le cas de Bordeaux. Les populations susceptibles d’être « captives » des modes de transport alternatifs à la voiture s’inscrivent en négatif par rapport aux actifs occupés : les chômeurs et les étudiants, pour des raisons pécuniaires ou d’accès au permis de conduire ; les retraités, pour des raisons de handicap 12 . Nous avons donc construit un indicateur simple qui mesure la proportion d’individus susceptibles d’être captifs des modes alternatifs, calculé simplement comme la proportion de chômeurs, de retraités et d’étudiants dans la population totale. La figure 6 montre une corrélation positive entre ce taux et la motorisation individuelle et une corrélation négative entre ce taux et la densité humaine. En complétant par la relation positive entre densité humaine et motorisation individuelle, on se trouve à nouveau confronté à une interaction triangulaire entre ces trois variables, qui empêche de mettre en évidence des liens causaux univoques. Figure 6. Le lien entre population susceptible d'être captive des modes alternatifs et motorisation individuelles (la surface des bulles est proportionnelle à la densité humaine) Motorisation individuelle 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,15 0,25 0,35 0,45 0,55 0,65 Proportion de chômeurs, de retraités et d'étudiants dans la population totale Source : EMD Bordeaux, 1998 (I.N.S.E.E, DR Aquitaine), traitement de l’auteur Les deux effets détaillés ci-dessus décrivent la possibilité d’existence d’un lien unissant les caractéristiques socio-démographiques des individus et leur localisation dans une forme urbaine particulière. Nous nous sommes placés dans le cadre conceptuel formulé par L. D. 12 Les mineurs ont été exclus, car la possibilité de covoiturage familial risque de masquer le phénomène observé, surtout étant données les observations supra sur la tendance des ménages de grande taille à se localiser dans les zones où la dépendance automobile est forte. 14
L’interaction entre usage du sol et comportements de mobilité Frank et G. Pivo (1994) et adopté par beaucoup d’autres à leur suite, qui sépare très distinctement, parmi les facteurs influant sur la mobilité quotidienne, ceux ayant trait à la forme urbaine et ceux liés aux caractéristiques socio-démographiques. Nous avons montré qu’il était possible de compléter ce schéma par un lien entre ces deux facteurs jusqu’ici séparés. Cette relation, observée empiriquement dans le cas de Bordeaux, peut se justifier théoriquement par un lien causal, qu’il soit direct ou indirect. Le cadre conceptuel que nous souhaitons adopter pour l’étude des liens entre forme urbaine et comportements de mobilité décrit donc des relations complexes, une « interaction triangulaire » généralisée entre les trois grands blocs de variables (figure 7). Figure 7. « L'interaction triangulaire » On notera non seulement l’apparition d’un troisième lien, mais aussi la généralisation de l’usage des doubles flèches. Celles-ci reflètent notre incertitude sur le sens de la causalité. Ainsi les trois blocs de variables sont en interaction réciproque. Ce schéma exprime une causalité circulaire généralisée, c’est-à-dire des interactions complexes entre des caractéristiques individuelles, des caractéristiques d’environnement, et ce que l’on cherche à expliquer, des comportements. Nous avons montré qu’il était impossible de dégager des relations causales simples, c’est pourquoi la forme adoptée est celle d’un circuit, pour lequel par définition n’existe pas de théorie causale (Mouchot, 2003, p. 172). Paradoxalement, l’adoption de ce schéma complexe est rendu indispensable par l’avancée des recherches sur le lien entre forme urbaine et mobilité, qui ont finalement davantage soulevé de questions qu’apporté des résultats : « although the connections between transportation and land use seem both obvious and simple, our appreciation of these connections increases as the research on these connections progresses : the more we know, the less we seem to know » (Handy, 2002, 3). On comprendra que l’adoption de « l’interaction triangulaire » comme cadre conceptuel, s’il est imposé par l’honnêteté intellectuelle, complique sévèrement la tâche du chercheur. Il n’est possible d’extraire d’une étude empirique que de simples corrélations entre variables. La détermination de liens causaux univoques devient extrêmement difficile dans un système où tout est en interaction réciproque. Une solution intéressante serait de tenter de « maîtriser » un ensemble de facteurs afin de transformer une relation tripartite en simple relation binaire. L’objectif est le « contrôle statistique » : « Since complete statistical control is never fully introduced, any relationships that are uncovered are necesarily associative rather than causal. » (Cervero & Kockelman, 1997, 201) La question est de savoir si les techniques quantitatives sont susceptibles de fournir des outils adaptés au problème. La solution réside alors dans la construction d’une méthode permettant de contrôler l’influence d’un ensemble de facteurs afin d’isoler dans la mesure du possible l’influence de l’autre ensemble de facteurs. La section suivante résume la méthode employée et donne quelques résultats pour l’aire urbaine de Bordeaux (France). 15
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