LA PLACE DES PERSONNES ÂGÉES - Cédis Formation

On voit donc que le vieillissement de la société française a souvent , par le passé, été présenté
comme une catastrophe sanitaire et sociale et ce notamment depuis 1928, date à laquelle le
démographe Alfred Sauvy a créé ce terme de vieillissement de la population, par lequel il voulait
signifier à la fois l’importance de la baisse de la natalité dans la population française et
l’augmentation relative des personnes de 60 ans et plus appelées par pure convention
démographique, « les personnes âgées ». On a, depuis cette époque jusqu’à aujourd’hui, parlé de ce
vieillissement populationnel et en corollaire du problème posé à la société par ces personnes âgées
amenant ce raccourci saisissant très souvent utilisé par les médias en général, le « problème des
personnes âgées ».
Vieillissement de la population et âge de la vieillesse
Ce qui marque l’époque actuelle, ce n’est pas tant le vieillissement de la population française terme
utilisé par Alfred Sauvy et extrêmement discutable, mais bien plutôt la modification de la structure
par âge de la population. On assiste en effet depuis le début des années 1900, à la montée
progressive du groupe d’âge des personnes de 60 ans et plus, essentiellement d’abord à cause de la
baisse de la mortalité infantile : 1,9 million en 1780, 5 millions en 1900, 7,7 millions en 1962 lors de
la publication du rapport Laroque, 11,3 millions en 1990 et environ 12,9 millions en 2005 pour la
France entière (métropole et outre mer). Dans le même temps la proportion des 60 ans et plus, dans
la population totale, augmente : 7,1% en 1780, 16,8% en 1962, 20,6% en 2005. En 2020, les
projections actuelles prévoient 17 millions de personnes de 60 ans et plus, soit 28% de la population
totale. Pour autant peut-on parler de vieillissement de la population, certainement pas, cela voudrait
dire qu’on accorde la même importance au fait d’avoir 60 ans en 2005 qu’en 1780 !
En effet , l’utilisation du même seuil d’âge 60 ou 65 ans pour parler de personnes âgées alors que
l’espérance de vie est passée, hommes et femmes confondues, de 45ans en 1900 à 80 ans aujourd’hui,
n’a aucun sens. Comme le fait remarquer Patrice Bourdelais, s’interrogeant sur « l’âge de la
vieillesse » 3 , serait-on vieux de plus en plus jeune alors que l’espérance de vie à la naissance a
quasiment doublé depuis le début du XXème
Cet auteur constate que « l’utilisation de catégories d’âge obsolètes contribue à rendre anachronique
notre perception des personnes âgées de la fin du XXème siècle ».
Il est donc extrêmement difficile de définir un âge d’entrée dans la vieillesse. La notion de
« personne âgée » est en effet très relative. Nous sommes tous et toutes des personnes âgées de 5, 10,
30, 45, 60, 80, 100 ans voire plus. Il y a, à l’évidence des gens plus âgés ou plus vieux que d’autres
chronologiquement. La racine indo européenne « vet » du mot vieux veut dire étymologiquement
« celui qui a un an de plus ».
A partir de quel moment devient-on personne âgée « tout court » On peut proposer que la notion de
personne âgée, à une époque donnée, soit relative à l’espérance de vie de cette époque. Les
personnes âgées du rapport Laroque sont les personnes de plus de 65ans ce qui peut paraître cohérent
avec une espérance de vie à la naissance d’environ 70 ans (67 ans pour les hommes et 73,6 ans pour
les femmes). Michel Philibert, philosophe grenoblois et grand précurseur du champ de la
gérontologie, proposait cette définition relative : les personnes âgées sont celles qui ont vécu plus
que la moyenne de leurs contemporains et Patrice Bourdelais, précédemment cité, proposait de
définir comme seuil d’entrée dans la catégorie personne âgée ou comme seuil d’entrée dans la
vieillesse, cinq ans avant l’espérance de vie du moment, soit aujourd’hui environ 72 ans pour les
hommes et 79 ans pour les femmes.
On peut aussi proposer que l’âge de la vieillesse soit grosso modo celui auquel commencent à
apparaître certaines incapacités importantes soit autour de 83-85ans.
Peut-on définir la catégorie « personnes âgées »
3 BOURDELAIS P. (1993). Le nouvel âge de la vieillesse, Paris, Editions Odile Jacob.
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