17.06.2015 Views

voir le document - Archives du MRAP

voir le document - Archives du MRAP

voir le document - Archives du MRAP

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Connaître<br />

LES TSIGANES<br />

DIFFÉRENCES DÉCEMBRE 1980<br />

'ï<br />

vagabondage !<br />

La législation est particulièrement <strong>du</strong>re dans certains pays. La peine<br />

de mort pour <strong>le</strong> fait même d'être Tsigane est appliquée en Al<strong>le</strong>magne,<br />

en Ang<strong>le</strong>terre, en Ecosse, en Bohême et en Moravie, aux Pays­<br />

Bas. Prévue en Suède et au Danemark el<strong>le</strong> n'y sera jamais appliquée.<br />

La Russie et la Hongrie se montrent assez libéra<strong>le</strong>s; <strong>le</strong>s principautés<br />

roumaines, depuis <strong>le</strong> milieu <strong>du</strong> l4 e sièc<strong>le</strong>, ré<strong>du</strong>isent <strong>le</strong>s Tsiganes en<br />

esclavage afin de s'assurer une main-d'œuvre indispensab<strong>le</strong>.<br />

Les premiers départs de Tsiganes pour <strong>le</strong>s Amériques et l'Afrique ne<br />

sont pas volontaires: l'Europe essaie ainsi de se débarrasser d'une<br />

population qu'el<strong>le</strong> trouve gênante entreprise vouée à l'échec,<br />

comme on peut, heureusement, <strong>le</strong> constater aujourd'hui -. Les persécutions<br />

atteindront <strong>le</strong> summum de l'horreur sous <strong>le</strong> régime nazi.<br />

4 Le génocide nazi<br />

1<br />

1 est extrêmement diffici<strong>le</strong> d'évaluer <strong>le</strong> nombre des Tsiganes<br />

vivant en Europe avant la guerre et <strong>le</strong> nombre des victimes<br />

tsiganes de l'extermination nazie. Dans "L'holocauste oublié"<br />

Christian Bernadac par<strong>le</strong> de 936.000 Tsiganes en 1939 et de<br />

245.000 victimes. 11 y a peu de <strong>document</strong>s sur <strong>le</strong> génocide des Tsiganes<br />

: Mais <strong>le</strong>s motifs invoqués pour justifier <strong>le</strong>ur assassinat sont<br />

identiques à ceux avancés pour ordonner <strong>le</strong> meurtre des Juifs.<br />

Les Tsiganes furent, comme <strong>le</strong>s Juifs, déclarés de race inférieure,<br />

représentant un corps étanger dans la communauté al<strong>le</strong>mande.<br />

Les persécutions contre <strong>le</strong>s Tsiganes en Al<strong>le</strong>magne commencèrent<br />

bien avant l'avènement de Hit<strong>le</strong>r, comme dans beaucoup d'autres<br />

pays. D'après <strong>le</strong>s fichiers nazis concernant <strong>le</strong>s Tsiganes, la majorité<br />

de ceux-ci étaient des "Mischlinge", des métis - plus de 90 070 - et<br />

menaient une vie sédentaire. 5.000 Tsiganes seu<strong>le</strong>ment étaient nomades,<br />

d'après Dora Yates, secrétaire de la "Gypsy Lore Society"<br />

d'Ang<strong>le</strong>terre. Cette assimilation à divers degrés fut précisément une<br />

des causes de la condamnation à mort de cette minorité.<br />

En 1899 fut créée auprès de la police de Bavière une section spécia<strong>le</strong><br />

aux affaires tsiganes. Diverses lois réglaient la vie de la minorité tsigane.<br />

La loi de 1929 marque la naissance de la "Question Tsigane" et<br />

imposa aux Tsiganes diverses restrictions. Ils ne pouvaient se déplacer<br />

sans un permis de la police et seu<strong>le</strong>ment dans des roulottes ou des<br />

wagonnets. Les Tsiganes âgés de plus de 16 ans qui ne donnaient pas<br />

la preuve d'une occupation régulière pouvaient être astreints à deux<br />

années de travail dans un établissement de réé<strong>du</strong>cation.<br />

• Condamnés à mort<br />

<strong>le</strong> 27 septembre 1939<br />

A partir de 1933, date de l'arrivée de Hit<strong>le</strong>r au pou<strong>voir</strong>, ces mesures<br />

s'aggravent. Bientôt s'ouvriront des camps de concentration et nous<br />

y verrons parmi <strong>le</strong>s premiers prisonniers <strong>le</strong>s Tsiganes, avec <strong>le</strong>s opposants<br />

<strong>du</strong> régime, <strong>le</strong>s "associaux" et <strong>le</strong>s Juifs.<br />

"Les premiers Tsiganes arrivèrent à Dachau en 1936, rapporte Maurice<br />

Colinon dans son livre "Des inconnus parmi nous: <strong>le</strong>s Gitans."<br />

L'année suivante, une ordonnance décrétait que <strong>le</strong>s Tsiganes "mettaient<br />

la société en péril". Du 12 au 18 juin 1938, au cours d'une<br />

"grande semaine d'épuration" décidée par Himm<strong>le</strong>r, des milliers de<br />

Tsiganes furent envoyés dans des camps de concentration. Un nouveau<br />

décret <strong>le</strong>s condamne pratiquement à mort à l'exception - provisoire<br />

- de deux groupes préservés "au bénéfice de la loi sur la protection<br />

des monuments historiques". Himm<strong>le</strong>r, dans un premier<br />

temps, édicte la stérilisation des hommes, d('s femmes et des enfants<br />

de plus de 12 ans.<br />

Puis ce fut la seconde guerre mondia<strong>le</strong>. Partout où <strong>le</strong>s nazis arrivèrent,<br />

<strong>le</strong>s Tsiganes devinrent <strong>le</strong>urs victimes.<br />

"L'extermination des Tsiganes fut décidée <strong>le</strong> 27 septembre 1939. Un<br />

grand nombre d'entre eux furent fusillés en Yougoslavie occupée par<br />

<strong>le</strong>s "oustachis" pro-al<strong>le</strong>mands: 28.000 selon <strong>le</strong>s statistiques officiel<strong>le</strong>s<br />

yougoslaves; 18 .000 autres furent gazés à Auschwitz-Birkenau.<br />

D'autres encoreà Treblinka et à Belsen." Plusieurs milliers d'autres<br />

furent fusillés en Pologne dont Hit<strong>le</strong>r avait décidé de faire <strong>le</strong> tomb~au<br />

des Juifs ~t des Tsiganes. Ces derniers y furent déportés par<br />

dlzalI1es de milliers. D'autres encore furent fusillés en Russie occupée.<br />

En France, <strong>le</strong> gouvernement de Vichy a fait interner <strong>le</strong>s Tsiganes en<br />

1940 et <strong>le</strong>s Al<strong>le</strong>mands n'ont eu qu'à <strong>le</strong>s récupérer; 30.000 personnes<br />

furent ainsi rassemblées dans diverses parties <strong>du</strong> territoire. 15.000<br />

Tsiganes furent exterminés en France, sur une population tota<strong>le</strong> évaluée<br />

à 40.000 personnes.<br />

"Lorsqu'un ancien déporté de Buchenwald déclare Que "<strong>le</strong>ur disparition<br />

tota<strong>le</strong> n'eut affecté dans <strong>le</strong> camp Qu'un petit nombre de philanthropes<br />

déterminés" ... on mesure sur <strong>le</strong> champ jusQu'où pouvait<br />

al<strong>le</strong>r <strong>le</strong> mépris dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s Tsiganes étaient tenus." Même à<br />

Nuremberg, aucun Tsigane n'a été appelé à témoigner. Ajoutons<br />

encore que si <strong>le</strong>s Juifs survivants de l'holocauste ont pu, <strong>du</strong> moins en<br />

par~ie, être dédom~agés de <strong>le</strong>urs pertes, <strong>le</strong>s Tsiganes ne purent y parveI1lr.<br />

Une. circulaire de 1950 <strong>du</strong> Ministère de Würtemberg affirme<br />

que <strong>le</strong>s TSiganes furent tués en raison de <strong>le</strong>ur associabilité et non<br />

pour des raisons racia<strong>le</strong>s.<br />

5<br />

L<br />

Les Tsiganes, en France, une<br />

communauté toujours écartée<br />

a population Tsigane en France, tous groupes confon<strong>du</strong>s, est<br />

actuel<strong>le</strong>ment évaluée à 120.000 personnes dont la grande<br />

majorité est de nationalité française. El<strong>le</strong> comporte des<br />

Manouches, des Sintis, des Gitans et des Roms répartis comme suit:<br />

1/ 3 de voyageurs, 1/ 3 de sédentarisés et 1/ 3 de "semi-sédentarisés"<br />

qui ne se déplacent qu'une partie de l'année.<br />

Les Tsiganes .ont conservé <strong>le</strong>urs activités traditionnel<strong>le</strong>s: étamage,<br />

ferrail<strong>le</strong>, mUSique ... <strong>le</strong> travail saisonnier, occupant souvent toute la<br />

cellu<strong>le</strong> famili.a<strong>le</strong>, e~t très répan<strong>du</strong> (vendanges, cueil<strong>le</strong>tte des fruits ... )<br />

Ils sont aussI foralI1s, marchands ambulants, démarcheurs à domici<strong>le</strong>.<br />

La société in<strong>du</strong>striel<strong>le</strong> oblige de plus en plus <strong>le</strong>s Tsiganes à adopter<br />

un travail sédentaire, bien souvent parmi <strong>le</strong>s moins rémunérés. La<br />

crise économique <strong>le</strong>s a touchés plus que d'autres .<br />

• Du carnet anthropométrique<br />

au carnet de circulation<br />

Pendant près de 60 ans, la condition des Tsiganes a été régie par la<br />

loi de 1912, hautement discriminatoire, qui instituait l'odieux carnet<br />

anthropométrique auquel <strong>le</strong>s Tsiganes furent assujettis jusqu'en<br />

1969. Ce carnet était imposé aux Tsiganes à partir de l'âge de 13 ans .<br />

~n plus des noms, prénoms, date et lieu de naissance, il portait des<br />

II1dlcatlOns sur la hauteur de la tail<strong>le</strong>, cel<strong>le</strong> <strong>du</strong> buste, l'envergure, la<br />

longueur et la largeur de la tête, <strong>le</strong> diamètre zygomatique, la longueur<br />

de l'oreil<strong>le</strong> droite, la longueur des doigts médium et auriculaire<br />

gauches, cel<strong>le</strong> de la coudée gauche, cel<strong>le</strong> <strong>du</strong> pied gauche, la cou<strong>le</strong>ur<br />

des yeux; des cases étaient réservées pour <strong>le</strong>s empreintes digita<strong>le</strong>s et<br />

pour <strong>le</strong>s photographies (face et profil) <strong>du</strong> porteur <strong>du</strong> carnet.<br />

Cette loi fut remplacée par cel<strong>le</strong> <strong>du</strong> 3 janvier 1969 qui supprima <strong>le</strong><br />

carnet anthropométrique. La Constitution, assurant "l'égalité<br />

devant la loi à tous <strong>le</strong>s citoyens sans distinction d'origine, de race et<br />

de religion" n'a pas permis aux autorités d 'édi fier un statut spécia<strong>le</strong>ment<br />

destiné aux Tsiganes. Les Pou<strong>voir</strong>s Publics ont donc été amenés<br />

à rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s problèmes qui se posent aux Tsiganes en fonction des<br />

besoins et des activités qui <strong>le</strong>ur sont propres, et surtout en fonction<br />

des réactions de la société envers eux.<br />

Le voyage est libre ... mais contrôlé, la loi étant complétée par <strong>le</strong><br />

décret 70-708 <strong>du</strong> 31 juil<strong>le</strong>t 1970 régissant <strong>le</strong>s S.D.F. (sans domici<strong>le</strong><br />

fixe).<br />

A côté des forains, munis d'un livret spécial de circulation, et comme<br />

l'ensemb<strong>le</strong> des nomades - français ou étrangers - <strong>le</strong>s Tsiganes sont<br />

dotés d'un carnet de circulation établi pour deux ans, et visé tous <strong>le</strong>s<br />

mois. Ils doivent choisir une commune de rattachement où s'effectuent<br />

<strong>le</strong>s actes administratifs liés au domici<strong>le</strong> (mariage, inscriptions<br />

sur <strong>le</strong>s listes é<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>s, déclarations fisca<strong>le</strong>s, etc). Le choix de la<br />

commune s'effectue au moment de la demande d'un titre de circulation,<br />

et il a la même <strong>du</strong>rée.<br />

Les Maires, selon un décret <strong>du</strong> Il janvier 1972, doivent autoriser <strong>le</strong><br />

stationnement des nomades pour 48 heures au moins. Les lieux de<br />

stationnement posent <strong>le</strong> problème <strong>le</strong> plus délicat à résoudre. La circulaire<br />

de 1978, concernant <strong>le</strong>s plans d'occupation des sols, recommande<br />

l'établissement d'aires de stationnement, mais ces dernières<br />

soumises à une règ<strong>le</strong>mentation très comp<strong>le</strong>xe, échappent trop souvent<br />

aux pou<strong>voir</strong>s municipaux.<br />

• Discriminations<br />

A l'heure actuel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Tsiganes connaissent encore de nombreux problèmes<br />

liés au racisme.<br />

Il y a tout d'abord <strong>le</strong>s clichés profondément ancrés qui amènent bien<br />

des "sédentaires" à adoptcr une attitude de méfiance à <strong>le</strong>ur égard .<br />

Ces clichés sont parfois amplifiés, à l'occasion de tel ou tel délit dont<br />

on soupçonne que l'auteur est Tsigane. Dans la dernière période, <strong>le</strong>s<br />

organisations antiracistes et <strong>le</strong>s associations tsiganes ont dû intervenir<br />

contre certains journaux qui incitaient directement à la hainc<br />

racia<strong>le</strong>.<br />

Mais <strong>le</strong>s problèmes <strong>le</strong>s plus importants sont liés au stationnement et à<br />

la scolarisation des enfants. Si tout <strong>le</strong> monde ne va pas, comme M.<br />

Lecuyer, conseil<strong>le</strong>r général <strong>du</strong> Puy-de-Dôme, jusqu'à proposer de<br />

"<strong>le</strong>ur faire une î<strong>le</strong> d'où ils ne pourraient pas sortir" (session <strong>du</strong> Conseil<br />

Général <strong>du</strong> 14/ 6/78), <strong>le</strong>s cas d'interdiction de stationnement<br />

(illéga<strong>le</strong>.s) ne sont pas rares. On a vu éga<strong>le</strong>ment une municipalité<br />

constrUire, autour <strong>du</strong> camp de stationnement, un véritab<strong>le</strong> rempart<br />

pour éviter <strong>le</strong> contact entre sédentaires et nomades.<br />

11 arrive enfin que des enfants soient refusés dans des classes et <strong>le</strong>s<br />

expériences d'éco<strong>le</strong>s itinérantes sont encore trop rares.<br />

La marginalisation des nomades, la non-adaptation de la société à<br />

<strong>le</strong>urs particularités en entraine bon nombre à abandonner <strong>le</strong>urs habitudes<br />

de vie. Contre <strong>le</strong>ur gré et contre l'intérêt qu'à la société à maintenir<br />

la richesse <strong>du</strong> pluralisme.<br />

Dossier réalisé par Robert P AC<br />

----- BIBLIOGRA PHIE ____ _<br />

• LIVRES<br />

Les Tsiganes - "Que sais-je ?" - N ° 580, P. u.F.<br />

Les Gitans - Maurice Colignon - Ed. Morel.<br />

Les Tsiganes - Jean-Pierre Liégeois - Ed. Le Seuil.<br />

Une éco<strong>le</strong> chez <strong>le</strong>s Tsiganes - Jean-Claude Sagan - Editions "Droit et<br />

Liberté".<br />

Les Tsiganes dans l'ancienne France - François de Vaux de Fo<strong>le</strong>tier­<br />

Connaissance <strong>du</strong> Monde 196/.<br />

Mil<strong>le</strong> ans d'histoire des Tsiganes - François de Vaux de Fo<strong>le</strong>tier _<br />

Fayard Ed.<br />

L'holocauste oublié - Christian Bernadac - Ed. France-Empire.<br />

Le massacre des Tsiganes - Christian Bernadac - Ed. Arthaud.<br />

Pour <strong>le</strong>s enfants:<br />

DJANGO - par Frans Haacken - Coll. "A lire et à éCOU<strong>le</strong>r" - Ed.<br />

Hatier. A vec un disque de 4 enregistrements <strong>du</strong> Quintet <strong>du</strong> Hot Club<br />

de France.<br />

• ARTICLES et DOCUMENTS<br />

Etudes Tsiganes - revue trimestriel<strong>le</strong>, 5, rue Las Casas, Paris 7e.<br />

H~mmes et migrations - <strong>document</strong>s nO 91/ - 15.9.76. A propos des<br />

TSiganes - Aperçu historique, ethnologique. Problèmes actuels par<br />

Degrange (M).<br />

Droit et Liberté - 120, rue St-Denis, 75002 Paris.<br />

N° 262. Mai 1967 - Les Gitans sans mystère.<br />

N° 376. Janvier 1979 - Voyage hors des préjugés.<br />

Le génocide des Tsiganes sous <strong>le</strong> régime nazi. Plaquette éditée par <strong>le</strong><br />

Comité pour l'érection <strong>du</strong> Monument en mémoire des Tsiganes<br />

assassinés à Auschwitz.<br />

Fiche pédagogique réalisée par la Commission Enseignants <strong>du</strong><br />

<strong>MRAP</strong> - Les gens <strong>du</strong> voyage.<br />

38<br />

39

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!