'30-'50 - Centre for Historical Research and Documentation on War

48 À l'étrangerrelève au niveau des condamnations à mortpour désertion (1914-18: 48; 1945: environ15.000) n’est cependant pas directementliée à la présence des nationauxsocialistes,comme on pourrait le penser.Pour bien expliquer ce phénomène, il faut,selon Jahr, se pencher sur la soi-disantculpabilité du monde judiciaire dans lefameux “poignard dans le dos”. En effet,dans les années vingt, l’idée que l’inertiedes juges à l’égard des troubles dansl’armée allem<strong>and</strong>e a contribué à la défaitecommence à faire son chemin. Pour éviterle même reproche pendant la SecondeGuerre mondiale, les institutions judiciairesse montrèrent particulièrement sévères.La population civile était le thèmede la troisième section. Ute Daniel (TU-Braunschweig) y a présenté la contributionla plus intéressante. Elle s’est livréeà une analyse sexuée du Front et duHeimatfront. Toutes les contributionsconcernant l’occupation démontrentqu’une analyse comparative des deuxguerres reste un exercice difficile. L’absencede fil rouge a rendu la comparaisonentre la Belgique (Pierre Lierneux -ERM), le Nord de la France (LudgerTewes - Universität Bochum), la Pologne(Cezary Krol - Académie des Sciences)et la Biélorussie (Bernhard Chiari - MGFA) impossible. Les contributions de ladernière section étaient très diverses.C’est principalement la très fine analyseconceptuelle de la littérature relative à“guerre et violence” de Benjamin Ziemann(Universität Bochum) qui a retenul’attention. Le colloque s’est clôturé partrois contributions sur le travail demémoire de l’expérience de guerre dans lalittérature, la peinture et le film.Quelles conclusions peut-on tirer de cecolloque pour l’historiographie belge ?D’abord que l’étude comparative del’histoire des guerres en Belgique en estencore à ses premiers balbutiements. Orle fait exceptionnel que la Belgique aitété occupée à deux reprises pendant unelongue période, suscite un vif intérêt enAllemagne. On peut d’ailleurs y ajouterque la recherche sur la Belgique pendantla Première Guerre mondiale a connurécemment un <strong>for</strong>t regain d’intérêt outre-Rhin. Un ef<strong>for</strong>t s’impose donc aussi ducôté belge.Ensuite, la nouvelle histoire militaireallem<strong>and</strong>e peut être une source d’inspirationpour l’historiographie militaireen Belgique. L’histoire de l’expériencedu front reste encore à écrire; le casbelge, spécifique par rapport aux autrespays, nécessite une attention particulière.Le thème de la relation entre le frontet le front intérieur est encore en friche.Le phénomène de la désertion a étéessentiellement analysé dans le cadredu flamingantisme. Des sujets tels quel’ennui au front ou la réintégration dessoldats dans la société civile sont àpeine étudiés. Espérons que l’inventorisationen cours au Musée Royalde l’Armée de fonds importants jusqu’icifermés, va susciter un nouvelintérêt pour l’histoire militaire enBelgique. En effet, si les historiensmilitaires belges prennent leurs distancesd’une “histoire bataille” et s’oriententrésolument vers une histoire des“expériences” (Erfahrungsgeschichte)des militaires, cette discipline historiquea encore un bel avenir devant elle.Benoît Majerus et Antoon Vrints