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Kreizh Breizh Akadémi 2Le modal en modèleReportage - mondomix.com - 31La Kreizh Breizh Akadémi 2 avec Erik Marchand (debout à droite) et Medi Haddab (premier à gauche du premier rang)E.C.Sur une initiative d’Erik Marchand, la Kreizh Breizh Akadémi 2réunit une douzaine de jeunes musiciens bretons et remet augoût du jour la musique bretonne telle qu’elle se pratiquait il ya près d’un siècle. Entre innovation et transmission, le projet proposeà travers la modalité, une intéressante ouverture du patrimoinepopulaire breton aux musiques de la Méditerranée ou du Moyen-Orient.Reportage en Bretagne par Églantine Chabasseur.Les musiciens se retrouvent petit à petit autour d’un café léger et de tartinesau beurre salé. Erik Marchand les salue chaleureusement et décide ce matinde concentrer son attention sur les deux chanteuses. L’une d’elles arrive deloin : hier soir, elle a chanté du kan ha diskan à Brest avec sa mère, “le chantet déchant” si populaire dans la région. Bientôt, la Kreizh Breizh Akadémi est aucomplet. “L’Académie de Centre Bretagne” entame ce matin le troisième jour desa seconde session de travail, dirigée cette fois-ci par le joueur de oud MehdiHaddab. Créée en 2005 sur une initiative d’Erik Marchand, la KBA articule sontravail autour de la transmission et l’innovation, et se situe évidemment assezloin de l’autre académie, aux visées nettement moins culturelles.Erik Marchand, chanteur, joueur de treujenn gaol, la clarinette bretonne, etpersonnage incontournable de la culture bretonne, a collecté pendant desannées des chants d’anciens, des kan ha diskan ou des gwerz chantées,dans toute la Bretagne. Avec une douzaine de jeunes musiciens, il travaillece répertoire populaire local, en partant du matériau a cappella, pour ensuitemettre en place une orchestration. Cette année, la priorité a été donnée auxcordes. Ainsi, mandoline, laoud, guitares, harpe, violons, contrebasse donnent laréplique aux flûtes, au cajon et aux voix. Le premier collectif de la Kreizh BreizhAcadémi, en 2005/2006, s’appelait d’ailleurs “Norkst”, “un orchestre” en breton.Le second cherche toujours son nom…Le cœur de l’initiative d’Erik Marchand est de refaire de la musique bretonneune musique modale. Il y a un siècle, la musique bretonne —comme bonnombre de musiques populaires européennes— n’avait en effet pas suivi ledéveloppement harmonique de la majorité des musiques occidentales. Ellen’utilisait pas gammes et grilles d’accord. Erik Marchand explique : “La musiquebretonne est modale, mais dans son histoire récente, soit environ ces quatrevingtdernières années, toute son évolution a été orientée vers l’adaptation del’harmonie. Notre travail ici est de faire en sorte de créer une musique modernebretonne mais qui s’attache à des formes locales plutôt anciennes toujoursutilisées par les chanteurs de kan ha diskan dans la région, mais jamais dansla musique d’orchestre”. Pour apporter de nouveaux regards sur cette musiquebretonne, Erik Marchand fait intervenir des musiciens dont le langage est modalpar essence. L’Orient, le bassin méditerranéen, les pays du Moyen-Orient oucertaines formes de musiques populaires européennes n’ont en effet pas connuce que Mehdi Haddab appelle “le joug harmonique”. Ainsi, l’année dernière,Thierry Robin, Keyvan Chemirani ou Danyel Waro avaient proposé leur proprevision de la modalité aux musiciens de “Norkst” lors d’ateliers ou de masterclass.Mehdi Haddab possède une large culture musicale et dirige avec énergie cestrois jours de travail. Il laisse la majeure partie du temps son oud psychédéliquedans son étui et préfère faire travailler précisément les différentes sectionsentre elles. Toute la difficulté réside dans le respect du thème initial et dans lapertinence des arrangements. Lors d’une petite pause, sous le soleil éclatantde Bretagne, il explique : "On prend les morceaux au niveau zéro. Dans ceque nous propose Erik, il y a un thème mais pas forcément de rythme puisquece sont des morceaux chantés. Résultat : on a une liberté totale pour lesarrangements rythmiques. Ensuite, il faut bien sûr respecter les identités dechacun…”. Un autre challenge que Mehdi Haddab relève avec enthousiasme.Les musiciens de la Kreizh Breizh 2 ont entre 20 ans et 28 ans, possèdent desparcours extrêmement diversifiés, entre apprentissage académique et approchespontanée de la musique. Tous ont dû adapter leurs instruments aux quarts deton présents dans la musique modale et se faire l’oreille à ces nouveaux modesde jeu.Après quelques autres séances de travail à La Grande Boutique, “friche articole”de Langonnet, la Kreizh Breizh AKadémi 2 sera apte à présenter son répertoiresur les scènes de festivals. Le label Innacor, “haut-parleur des cultures deBretagne et du monde”, fondé par Erik Marchand, Bertrand Dupont, et JackyMolard, sortira sans doute le résultat de ce travail de revalorisation du répertoirepopulaire breton. À suivre !