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Télécharger ActuaLitté, le papiel, #4 de novembre

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Pour s’entretenir« Le livre ne se consomme pascomme un CD »Interview <strong>de</strong> John ConnollyPropos recueillis par Nicolas Gary© Nicolas Gary« Optimiste je suis », concernant <strong>le</strong> livre numérique, parce que selonlui, <strong>le</strong>s comparaisons avec <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la musique sont complètementfaussées. « Le livre n’est pas un CD, ça ne se consomme pas pareil ! »L’artefact papier a plus <strong>de</strong> force que <strong>le</strong> support musical, qui a changéterrib<strong>le</strong>ment en une trentaine d’années. « Alors pour moi, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>uxsupports, numérique et papier, vont coexister. Et puis, j’ai bon espoirque <strong>le</strong>s eRea<strong>de</strong>rs ramènent <strong>de</strong>s <strong>le</strong>cteurs vers <strong>le</strong>s livres. Mais <strong>le</strong>ursacheteurs se rendront compte bien vite qu’ils ne peuvent pas avoir sous<strong>le</strong>s yeux <strong>le</strong>ur bibliothèque, sans allumer <strong>le</strong>ur machine. Et d’un autre côté,<strong>le</strong>s livres-poubel<strong>le</strong>s, que l’on ne veut pas gar<strong>de</strong>r après <strong>le</strong>s avoir finisn’encombreront pas <strong>le</strong>s étagères avec <strong>le</strong> numérique », lance-t-il avecun éclat <strong>de</strong> rire.Car <strong>le</strong> moins que l’on puisse dire, c’est que John a une idée très claire<strong>de</strong> la situation. « Le livre que j’expose à la vue <strong>de</strong> mes invités, chez moi,c’est aussi un gage <strong>de</strong> savoir, <strong>de</strong> connaissance. Cela nous renvoie àl’affect lié à l’objet, mais surtout, ça en dit long sur moi. C’est aussi çaun livre : un indicateur <strong>de</strong> mes goûts, <strong>de</strong> ma culture. Dans une machine,l’effet social n’est pas vraiment <strong>le</strong> même. » D’ail<strong>le</strong>urs, avec ces machines,on perd sûrement une part <strong>de</strong> plaisir. Mais, <strong>de</strong> même qu’en librairie, unchoix s’exerce dans <strong>le</strong>s livres proposés, <strong>de</strong> même, l’accès à <strong>de</strong>s ebooksreprésente une avancée d’envergure pour <strong>le</strong> développement <strong>de</strong> la <strong>le</strong>cture.Racontant l’histoire d’un <strong>de</strong> ses amis, qui tentait <strong>de</strong> <strong>le</strong> convaincre dubien-fondé <strong>de</strong>s <strong>le</strong>cteurs ebook, en lui expliquant qu’il avait ses 200 livressur lui, quand il allait à la Poste, John reste circonspect. « Mais tu vasacheter quoi, à la Poste, pour avoir besoin <strong>de</strong> 200 livres ? Un timbre ?Change <strong>de</strong> bureau plutôt ! »D’ail<strong>le</strong>urs, dans <strong>le</strong> domaine jeunesse, <strong>le</strong> livre numérique a bien <strong>de</strong>schoses à prouver et créer… « On n’en peut plus, <strong>de</strong>s livres signés par<strong>de</strong>s peop<strong>le</strong>s, dont arrosent <strong>le</strong>s éditeurs. Et la liste est longue. »Sauf que ces ventes permettent un apport <strong>de</strong> trésorerie. « Tout cet argentest réinjecté dans l’industrie, pour d’autres livres, alors, ça sert. Et puis,il y a <strong>de</strong>s <strong>le</strong>cteurs pour ça, donc il faut <strong>de</strong>s livres pour eux. Mais vousvoyez, entre <strong>le</strong> livre pour enfants <strong>de</strong> Barack Obama et certains <strong>de</strong>mes livres, je ne vois pas <strong>de</strong> concurrence. Plutôt une complémentarité. »Par contre, <strong>le</strong>s livres politiques, ce n’est pas vraiment son truc : « C’esttoujours <strong>le</strong> ca<strong>de</strong>au pourri que l’on reçoit à Noël et qu’on ne lira jamais… »Pour qu’un livre jeunesse marche en Ang<strong>le</strong>terre, il doit avant tout être« lisib<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s adultes. Ce sont eux qui achètent <strong>le</strong>s livres à <strong>le</strong>ursenfants. L’ebook augmenté <strong>de</strong>vra être convaincant pour <strong>le</strong>s jeuneset <strong>le</strong>urs parents. À la différence que cette génération qui arrive est unegénération d’écran. Nous, ça nous rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong> travail, et pas question<strong>de</strong> passer son temps <strong>de</strong>vant un nouvel écran. »Et pourtant, quel<strong>le</strong> fabu<strong>le</strong>use ressource que <strong>le</strong> net ! Fabu<strong>le</strong>use etdangereuse. « Goog<strong>le</strong> ne nous a peut-être pas rendus complètement idiots,mais il nous a appris à <strong>de</strong>venir fainéants. Le partage <strong>de</strong> l’information,l’accès à la culture, c’est bien beau, mais <strong>le</strong> moteur <strong>de</strong> recherche n’estqu’une <strong>de</strong>s fenêtres que l’on peut ouvrir sur la Toi<strong>le</strong>. Si on y réfléchit,internet vu par <strong>le</strong> prisme Goog<strong>le</strong>, c’est une autre manière <strong>de</strong> choisirce que l’on donne à voir. Comme mes libraires <strong>de</strong> tout à l’heure, quine veu<strong>le</strong>nt pas certains livres, alors ne <strong>le</strong>s présentent pas au public.Moi, je n’ai jamais été censuré, à proprement par<strong>le</strong>r. Mais certaineschaînes ne ven<strong>de</strong>nt pas mes ouvrages. Alors, évi<strong>de</strong>mment, internet,c’est une ressource incroyab<strong>le</strong>. Mais encore faut-il savoir l’utiliser…Vous avez déjà consulté la 98 ème page dans votre recherche ? »Et <strong>le</strong>s réseaux sociaux, John ? Tu veux mon Facebook, avoir <strong>de</strong>sfollowers, comme Margaret Atwood ? Il sourit, et finit par rire aux éclats :« Twitter, c’est parfait si, comme el<strong>le</strong>, on n’aime pas rencontrer ses<strong>le</strong>cteurs, et que l’on n’aime pas <strong>le</strong>s gens. Moi j’aime ça, <strong>le</strong> contact.Si je ne doute pas <strong>de</strong> l’impact que cela peut avoir sur la promotion d’unlivre, moi, ce n’est pas mon boulot. Le marketing viral sur <strong>le</strong> net, je luipréfère <strong>le</strong> bouche-à-oreil<strong>le</strong>, en fait. C’est comme ça que Le Livre <strong>de</strong>schoses perdues s’est vendu. »Cependant, John a conscience <strong>de</strong> l’importance que cela peut avoir.En particulier pour <strong>le</strong>s auteurs indépendants. « C’est <strong>de</strong> plus en plus dur.Les à-valoir diminuent, en répercussion aux crises <strong>de</strong>s éditeurs.Ça accompagne <strong>le</strong>s licenciements. Alors, je comprends <strong>le</strong>s auteursqui préfèrent prendre <strong>le</strong>ur envol, seuls. » Simp<strong>le</strong>ment, même pour <strong>de</strong>sauteurs confirmés, <strong>le</strong> filtre que représente l’éditeur est précieux. « Dans unmon<strong>de</strong> idéal, l’édition indépendante ne poserait pas <strong>de</strong> problèmes. Maistrès sérieusement : si dans l’édition, on trouve déjà <strong>de</strong>s trucs pas très nets,dans l’édition indépendante, c’est assez souvent du délire. »Lui, il est resté fidè<strong>le</strong> à ses éditeurs, parce qu’il croit en cette collaborationprécieuse. Au point <strong>de</strong> considérer ce lien comme réel<strong>le</strong>ment indispensab<strong>le</strong>.« Mais la vérité, c’est que personne ne m’a fait une propositioncommercia<strong>le</strong> plus intéressante », conclut-il, toujours hilare. « Je ne suistel<strong>le</strong>ment pas sûr que d’autres veuil<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> moi, que je préfère rester gentilavec ceux qui m’aiment bien. »Bien noté, John…34John Connolly, auteur d’un diab<strong>le</strong> <strong>de</strong> roman paru à l’Archipel,Les portes, est un sacré phénomène. « Tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> en Irlan<strong>de</strong> estécrivain. Dans <strong>le</strong> pays, si vous faites quelque chose d’uti<strong>le</strong>, vous êtesune exception. » Alors, pour se conformer à ce que l’on attendait <strong>de</strong>lui, il s’est mis à écrire…

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