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Le Scoop de WATRIN<br />
Comment devenir riche<br />
et sauver le monde<br />
en libéralisant sa famille<br />
pour son bien ?<br />
Dominique Watrin<br />
MARS 2016 / Même pas peur N o 6 / 7<br />
Les sociologues pertinents sont unanimes<br />
à l’affirmer : la famille nucléaire<br />
n’est plus viable. Attention ! La famille<br />
nucléaire, ce n’est pas le ménage qui<br />
habite le plus près de la centrale de Doel<br />
ou de Tihange. C’est la forme de cohabitation<br />
issue de la formule mathématique :<br />
papa + maman + enfants = x problèmes +<br />
tête au carré. Comme le petit commerce<br />
de proximité, la famille version classique<br />
n’est pas rentable. Trop minuscule,<br />
trop artisanale, trop peu organisée, cette<br />
famille n’est plus en phase avec son temps.<br />
L’heure est aujourd’hui à la famille de la<br />
liberté, celle où chacun fait ce qu’il veut<br />
s’il est chef et où l’argent est le moteur de<br />
tous, primant sur des valeurs désuètes<br />
comme l’amour, l’entraide et le geste gratuit,<br />
pardon pour les gros mots.<br />
Alors, si vous ne voulez pas être en<br />
retard d’une guerre (mondiale) sur<br />
l’avancée planétaire, il est temps de libéraliser<br />
au plus tôt votre famille. Prenonsen<br />
conscience ensemble : si la religion<br />
est l’opium du peuple, le libéralisme est<br />
la vitamine des vainqueurs. Voici trois<br />
mesures pour adapter la famille au<br />
monde d’aujourd’hui, de demain et du<br />
lendemain, comme la pilule du même<br />
nom !<br />
Première mesure : rétablir la<br />
compétitivité des enfants<br />
Les pédagogues, qui feraient mieux de<br />
s’occuper de leurs propres rejetons, ont<br />
beau jeu de dire que l’éducation et l’instruction<br />
des jeunes sont importantes,<br />
quand la majorité des élèves terminent<br />
un cycle de scolarité sans pouvoir citer<br />
le moindre vainqueur d’émission de téléréalité<br />
organisée deux ans plus tôt, il y a<br />
de quoi se poser des questions. Le devoir<br />
de rendement des parents responsables<br />
impose donc de ne pas perdre son temps<br />
et son argent pour des enfants improductifs.<br />
Instaurons, dès lors, tous une<br />
concurrence entre les enfants de notre<br />
famille. Celui (ou celle, pour les parents<br />
qui pensent toujours que l’éducation des<br />
filles est profitable, ne riez pas, il en existe<br />
encore) qui obtient les moins bons résultats<br />
durant l’année scolaire est éliminé<br />
des études… jusqu’à ce qu’il n’en reste<br />
plus qu’un. C’est ludique pour les enfants<br />
et ça évite le non-retour sur investissement<br />
pour les parents.<br />
Deuxième mesure : rentabiliser<br />
les proches improductifs<br />
Par essence, le vieux est improductif.<br />
Tout comme la mère au foyer ou le parent<br />
handicapé. Mais cela signifie-t-il qu’on ne<br />
peut pas néanmoins en retirer un profit<br />
minimal ? Non, bien sûr ! Un vieux même<br />
paralysé ou alité peut encore rendre de<br />
multiples services. Le tout est de lui assigner<br />
une fonction à la mesure de son<br />
potentiel. Transformé, par exemple, en<br />
lampadaire s’il tient debout, en support<br />
d’écran plat s’il est assis ou même en parcours<br />
de minigolf s’il agonise la bouche<br />
ouverte. Et pareil pour la mère au foyer<br />
qui peut se prostituer pendant son travail<br />
de repassage, pour le parkinsonien<br />
qui peut secouer le biberon du nouveauné<br />
ou pour l’Alzheimerien qui peut servir<br />
de support à post-it, pour peu qu’on<br />
le ligote naturellement, une fameuse<br />
revanche sur la dégénérescence de sa<br />
mémoire !<br />
Troisième mesure : créer un<br />
niveau d’alerte<br />
Par les temps qui courent, qui<br />
marchent et surtout qui ne marchent<br />
pas, la menace est omniprésente.<br />
Particulièrement dans la famille !<br />
Un enfant, un conjoint ou un animal<br />
domestique peut à tout moment<br />
se radicaliser et devenir socialiste<br />
honnête (ouch, la tuile), écologiste<br />
réaliste (ouch, la toiture passive),<br />
pacifiste, voire Royal Caniniste ou coucouche-panieriste<br />
pour les chiens les plus<br />
rebelles. Pour contrer la solidarité, source<br />
de pertes de profit, rien de tel que la peur<br />
qui calme tout le monde sur-le-champ,<br />
même ceux qui ne sont pas agriculteurs.<br />
Établissons donc 4 niveaux d’alerte dans<br />
la maison familiale :<br />
- niveau 1 : si un membre de votre famille<br />
dit « merci », « c’est cadeau », ou « warf,<br />
warf » (« prends ma baballe ») si c’est un<br />
chien, c’est dans le coin, les mains sur la<br />
tête ou les papattes en l’air.<br />
- niveau 2 : si l’individu radicalisé récidive<br />
en offrant son dessert (ou en ne grondant<br />
pas quand on touche son écuelle de<br />
pâtée), c’est file dans ta chambre (ou dans<br />
ta niche, et soyez attentifs à ne pas inverser<br />
chiens et enfants) !<br />
- niveau 3 : si le récalcitrant s’entête à<br />
manifester des signes d’affection excessive,<br />
en embrassant exagérément ou<br />
en battant trop de la queue (là aussi,<br />
attention aux inversions entre humains<br />
et chiens), envoyez-le en stage de jeux<br />
vidéos violents ou au dressage à l’attaque.<br />
- niveau 4 : le stade ultime de la perversion,<br />
le sacrifice pour une cause comme<br />
les pauvres, les étrangers, les lépreux,<br />
les beaux preux, les sclérosés en plaque,<br />
les trisomiques 21, 22, 23 (numéro complémentaire,<br />
le Cap 48), ou le sauvetage<br />
d’une petite vieille de la noyade chez les<br />
chiens, requiert une mesure d’urgence<br />
exemplaire : le renvoi ! Au chenil pour le<br />
chien, au fond de sa mère pour l’humain,<br />
mais sans chaloupe de fortune, on a trop<br />
vu en Méditerranée comme ça peut être<br />
source d’ennuis pour les riverains.<br />
Bonne libéralisation à tous !<br />
La répartition des richesses doit se<br />
faire entre les nantis : il est insupportable<br />
que des fortunes soient<br />
supérieures à d’autres.<br />
Éric Dejaeger