Quelques artistes de - Unima

que manque d’envie d’être un témoin oculaire du spectacle. Il disparu de ma vue en s’enfonçant dans une
rue. Je n’avais pas fini de me lamenter d’avoir raté le spectacle tant désiré, que je vis dans ma main le panier
contenant les condiments. Et les lampadaires s’illuminaient déjà. Je couru alors pour échapper à la correction
qui m’attend à la maison, mais en vain... »
Au moment où Adama BACCO terminait la narration de cette histoire, elle se tordait de rire les yeux remplis de
larmes.
Adama BACCO et la découverte de la marionnette :
C’est à l’occasion de la tournée d’une compagnie ghanéenne qu’Adama Bacco a découvert le théâtre de
marionnette pour la première fois.
C’était en 1968 dans la ville de Dapaong au nord du Togo. La compagnie ghanéenne composée de deux
marionnettistes était en accord avec l’administration de son école (l’École Centrale Primaire de Dapaong)
pour donner le spectacle dans l’enceinte de l’établissement. Une annonce avait été faite et le ticket coûtait 10f,
qu’elle a pu avoir auprès de ses parents.
Le spectacle commença le matin aux environs de 9h, et se déroula pendant plus d’une heure de temps.
Adama était là avec ces camarades de classe de CE2 et beaucoup d’autres écoliers de l’école fondamentale.
C’était la surprise. « Comment ces petits bonhommes pouvaient rendre tous ces mouvements dans un
comportement aussi comique? Ils se regardaient entre eux de temps en temps et parfais, ils nous regardaient
comme pour se renseigner si suivons ce qu’ils faisaient. »
Fortement impressionnée, elle fut emportée par la magie de ce
spectacle de marionnettes. Elle a été surtout frappée par le fait
que les deux petits personnages mis en scène, dansaient en
parfaite harmonie avec les chants bien rythmés qu’entonnaient
les deux marionnettistes. Elles étaient si attrayantes, les
marionnettes qu’Adama ne se rappelle guère avoir vu les deux
magiciens ghanéens qu’au début et à la fin du spectacle. Et
comme si le sort venait de lui montrer la voie de son destin, le
souvenir émouvant de ce spectacle ne la quittera jamais. Tous
les écoliers présents avaient bien apprécié ce théâtre de rêve.
Mais c’était peu pour elle, les commentaires qu’ils en faisaient
entre camarades de classe pendant la récréation, ou en famille
auprès des frères et parents. Adama Bacco, profondément
marquée par le spectacle, se mit à confectionner des
marionnettes avec les pots de yaourt qu’elle ramassait dans la
rue, des chiffons et coupons de tissus qu’elle récupérait dans
les poubelles des tailleurs. Ces marionnettes ne ressemblaient
pas à celles qu’elle avait vues dans la cour de l’école. Mais elle
s’attacha éperdument à ces créatures façonnées de ses propres Une marionnette de la Troupe BOUAM.
mains, et qu’elle faisait danser en fredonnant le chant
‘’Kéti ébako, kéti néyi ébako, ébako, ébako", cette chanson des deux marionnettistes ghanéens qu’elle garde
encore dans sa tête, 43 ans après le spectacle, comme si c’était hier. Sans peut être le savoir, ce spectacle de
marionnettes marqua le début de l’accomplissement de son destin de marionnettiste. Mais c’était également
pour elle le début d’un calvaire. Un calvaire devant lequel de nombreuses femmes africaines, par manque
caractère, ont vu leur vie brisée pour avoir renoncé a une activité relevant leur aptitude, de leur passion, sous
la pression de la société. Sur ce point elle nous dit ce qui suit : « J'ai été très souvent punie à la maison parce
que je suis restée dehors pour suivre une soirée de percussion et de danse, bref pour toutes activités
artistiques et culturelles. J'étais mal jugée par la société. J'avais toutes les injures du monde : une prostituée,
une vadrouilleuse, une fille légère, j’en oublie volontiers. « ... » Ce n'était pas facile à une fille togolaise de
pratiquer une activité artistique et culturelle... ». Adama a résisté parce qu’elle aimait et croyait en ce qu’elle
faisait. Elle s’imaginait mal dans la vie sans les arts de la scène comme le théâtre de marionnettes. C’est son
domaine à travers lequel elle peut s’exprimer pour donner du plaisir aux autres.
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