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JAD 13

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Au cœur de son cycle de conférences, l’historienne et<br />

écrivain Anne-Marie Royer-Pantin nous parlera de ces légumes anciens.<br />

Passionnée et passionnante, les Orléanais l’adorent et en redemandent…<br />

Cet été au parc floral de La Source, elle nous parlera aussi de ces fruits<br />

et de certains arbres que nous avons oubliés,<br />

ou dont nous ne savons plus la provenance.<br />

Ces végétaux ont une histoire et des origines parfois étonnantes, et<br />

ont souvent fait la renommée du Loiret.<br />

Tomate, patate, cresson, asperge, tout<br />

le monde connait. Mais l’igname ou le<br />

crosne, un peu moins sans doute.<br />

Tous ces légumes sont anciens et l’on a<br />

oublié, c’est bien naturel, leur provenance.<br />

Qui se souvient que la tomate arrive<br />

en Europe, en traversée directe des<br />

Amériques Centrale et du Sud. « A vrai<br />

dire, elle ne passionne pas les foules à<br />

son arrivée, explique Anne-Marie Royer-<br />

Pantin. Et pour cause, elle est toxique ».<br />

La tomate est de la famille des Solanines,<br />

qui contiennent une molécule qui rend<br />

fou, dit-on, ce qui n’est pas loin de la<br />

vérité. Alors pourquoi l’avoir importée ?<br />

Par curiosité. Les explorateurs sont<br />

accompagnés dans leurs traversées, de<br />

scientifiques et de botanistes, en charge de<br />

récolter les informations sur de nouvelles<br />

espèces, et les curiosités de toutes natures,<br />

inconnues en Europe. Les végétaux<br />

d’une façon générale en font partie. La<br />

tomate est largement décrite au Jardin<br />

des Apothicaires d’Orléans au début du<br />

XVI ème siècle, avec force dessins et écritures<br />

manuscrites.<br />

Ce n’est qu’en croisant et en recroisant<br />

les espèces de tomates que l’on finit par<br />

trouver, sans doute un peu par hasard,<br />

les tomates que nous connaissons<br />

aujourd’hui.<br />

Il aura fallu par ailleurs développer la<br />

culture des légumes sous châssis pour<br />

les obtenir de façon régulière sous<br />

nos latitudes. La tomate est gélive, ce<br />

n’est un secret pour personne, ce qui<br />

explique que seuls les italiens et les pays<br />

du Sud de la France s’y intéressent au<br />

début. Mais n’oublions pas qu’Orléans<br />

était une ville de garnison. Des milliers<br />

de chevaux produisaient donc des<br />

quantités impressionnantes de fumier<br />

qui génère de la chaleur, idéale pour les<br />

cultures, au point que les quartiers sont<br />

le coeur d’adjudications pour ce précieux<br />

combustible.<br />

Ce n’est qu’à la fin du XVIII ème siècle<br />

que la tomate entre dans nos plats,<br />

grâce notamment à la carte de célèbres<br />

restaurants parisiens.<br />

La patate…<br />

aux soldats prussiens<br />

Anne-Marie Royer-Pantin est intarissable<br />

sur la pomme de terre. « Ce n’est qu’au<br />

XIX ème siècle qu’on s’y intéresse pour la<br />

cuisine. Avant, seuls les cochons et les<br />

soldats prussiens en consomment !" C’est<br />

aux vignerons que l’on doit cette culture<br />

inattendue. Ils découvrent que la pomme<br />

de terre se plante facilement entre les<br />

rangs de vigne ; facile à arracher sans en<br />

endommager les pieds. Ainsi viendront<br />

les pommes de terre nouvelles et pomme<br />

de terre de semence à Chécy notamment,<br />

qui deviendra une spécialité nationale.<br />

La région de Puiseaux dans le Gâtinais<br />

comptait alors beaucoup de vignes,<br />

jusqu’en 1870 environ où le phylloxera<br />

la décime. Elle sera remplacée par une<br />

pomme de terre typique appelée la<br />

Saucisse rouge du Gâtinais !<br />

L’asperge de Sologne est aussi célèbre.<br />

Dès le XVIII ème siècle elle est un plat raffiné<br />

que l’on trouve sur la table de l’évêque<br />

d’Orléans. On retrouve une demande<br />

d’autorisation des vignerons, encore eux,<br />

qui les plantent aussi dans les vignes, pour<br />

les vendre sur les marchés. A la même<br />

époque, les épinards sont un plat de<br />

pauvre que les étudiants mangent sous<br />

la forme de boulettes sucrées.<br />

Dans un tout autre genre, le crosne - ou<br />

cerfeuil tubéreux - est importé du Japon<br />

en 1840. Paul Chatelier, correspondant de<br />

l’académie des sciences, le cultive chez lui,<br />

au château de la Commanderie à Chécy.<br />

Le succès est immense, le crosne se cultive<br />

en grande quantité à Sully et fera les belles<br />

heures de certaines tables parisiennes.<br />

Que dire enfin du Cresson Alénois, planté<br />

dans la terre ? Rabelais l’avait baptisé le<br />

Nasitort. Ce cresson est en effet membre<br />

de la famille des crucifères, donc des<br />

moutardes ! Charlemagne avait prescrit de<br />

le planter dans les jardins impériaux, et de<br />

surcroit, ce cresson est autorisé pendant le<br />

carême ! Il sera longtemps lui aussi<br />

une spécialité légumière du Loiret.<br />

Des histoires comme celles-ci, Anne -Marie<br />

Royer-Pantin en a plein son cabas. C’est un<br />

bonheur de l’écouter…<br />

Alors ne manquez pas ce rendez-vous au<br />

Parc floral de la Source ! n<br />

Magazine <strong>JAD</strong> / 45

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