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the red bulletin : Par le passé, vous avez fait<br />
croire à nos collègues de Ouest France que vous<br />
intégriez une émission de télé réalité genre Pop<br />
Star, et ils ont plongé tête en avant, comme<br />
certains joueurs qui simulent… C’est vrai ?<br />
griedge mbock : (Rires) Ils ont enquêté pour en<br />
savoir plus, oui… Poisson d’avril !<br />
« En foot féminin,<br />
il y a beaucoup<br />
d’engagement, de<br />
duels, de la qualité<br />
technique. »<br />
Au-delà de cette bonne blague, comme disait le<br />
chanteur Claude Dubois dans Starmania, vous<br />
auriez « voulu être une artiste » ?<br />
Je ne sais pas si j’aurais pu en être capable, mais les<br />
artistes et les footballeuses ont des points communs.<br />
On vit tous de notre passion, c’est une chance.<br />
j’ai intégré l’AS Brestoise, pour quatre ans, toujours<br />
avec des garçons. On s’est qualifié pour la DH Elite,<br />
un bon niveau, et à partir de quinze ans j’ai dû basculer<br />
avec les filles, dans le pôle espoir de Rennes.<br />
En parallèle, je jouais à St Brieuc/Guingamp. Enfin,<br />
en 2015, j’ai signé à l’OL.<br />
GETTY IMAGES<br />
Palmarès<br />
Ballon d’or U-17<br />
2012<br />
Ballon d’argent<br />
U-20 2014<br />
Vainqueur de<br />
la Ligue<br />
des champions<br />
avec Lyon<br />
2016, 2017 et 2018<br />
Actuelle<br />
championne<br />
de France<br />
avec Lyon<br />
46 sélections<br />
en équipe<br />
de France<br />
Quand les artistes sont bons, innovants, créatifs,<br />
souvent ils deviennent connus, voire très connus.<br />
Vous avez tous ces atouts, mais les médias, nous<br />
inclus, s’intéressent à vous à un stade où vous<br />
avez déjà construit énormément de choses : alors,<br />
pourquoi on ne se parle qu’aujourd’hui ?<br />
L’intérêt pour le football féminin est assez récent. Il<br />
est beaucoup plus attractif, les chaînes essayent de<br />
plus en plus d’être présentes sur cette discipline. Le<br />
championnat de France a pris une place importante<br />
au niveau européen, et mon équipe, l’Olympique<br />
lyonnais, a beaucoup aidé en remportant de nombreux<br />
titres comme la Ligue des champions. Ce<br />
championnat est relevé, il y a de grosses équipes,<br />
en Allemagne, en Angleterre, ou en Espagne.<br />
L’équipe de France a-t-elle aussi des atouts ?<br />
Elle bénéficie d’un mix des « générations » très intéressant,<br />
avec des joueuses plus expérimentées qui ont<br />
déjà quelques compétitions à leur actif, et de jeunes<br />
joueuses qui viennent se greffer au collectif avec déjà<br />
une expérience du haut niveau. C’est le cas des<br />
joueuses du PSG ou de Lyon. Il y a une très bonne<br />
dynamique.<br />
Qu’est-ce qui fait la saveur du football féminin<br />
en <strong>2019</strong>, selon vous ?<br />
Il y a beaucoup d’engagement, beaucoup de duels, de<br />
la qualité technique. Le football féminin a beaucoup<br />
progressé techniquement. Les gens qui recherchent<br />
du spectacle ne sont pas déçus, il y a beaucoup de<br />
buts, de dribbles et d’actions.<br />
Quand avez-vous eu l’envie de devenir joueuse ?<br />
J’ai commencé très jeune, petite déjà je jouais dans<br />
le quartier avec mon grand frère qui m’a transmis<br />
sa passion, et m’a toujours intégrée partout, dans le<br />
quartier, à l’école, en club. J’ai donc eu plus de facilités<br />
à trouver ma place. Je me suis tout de suite bien<br />
sentie avec les garçons.<br />
Quand avez-vous commencé à jouer en club ?<br />
À six ans, avec le FC Pontanézen, à Brest, avec des<br />
garçons, dont mon frère. J’y ai joué trois ans, puis<br />
Aujourd’hui, une fille âgée de cinq ou six ans va<br />
de suite jouer avec des équipes uniquement<br />
constituées de filles ?<br />
Ça a changé, oui, les filles peuvent jouer entre elles,<br />
et ne pas subir les moqueries potentielles des garçons.<br />
C’est une bonne chose, ça aide à développer le<br />
foot féminin, plus de petites filles passent le pas.<br />
Votre frère a été un moteur, mais est-ce que, à<br />
l’inverse, des gens ont tenté de vous freiner, vous<br />
dissuader, ou se sont moqués de vous, justement ?<br />
Je n’ai pas trop vécu ce genre de situation. <strong>Mai</strong>s je me<br />
souviens d’une prof de maths en 4 e , en section sportétudes,<br />
qui m’avait dit ainsi qu’à mes amies : « Si vous<br />
aviez déjà dû signer dans un centre de formation,<br />
vous ne seriez plus là. » Elle voulait que l’on travaille<br />
plus en classe, ce qui est normal, mais elle ne comprenait<br />
pas que l’on pouvait aussi s’épanouir dans<br />
notre passion. <strong>Mai</strong>s moi, je savais où je voulais aller.<br />
Elle trouvait incongru que des filles veulent devenir<br />
des joueuses de football professionnelles ?<br />
C’est vrai qu’à l’époque, ce n’était pas encore rentré<br />
dans les mœurs, et on n’était pas sûr que les filles<br />
deviennent professionnelles, c’était donc plutôt<br />
risqué. <strong>Mai</strong>s ça ne m’a pas fait peur, cette passion<br />
du football, je voulais en faire mon métier, tout<br />
simplement.<br />
Aujourd’hui, une gamine à laquelle elle tiendrait<br />
les mêmes propos pourrait lui répondre : « Si<br />
Madame, regardez, il y a Griedge et les autres,<br />
c’est une réalité ! » Avez-vous le sentiment d’être<br />
une preuve « vivante » que le football féminin<br />
professionnel de haut niveau existe ?<br />
Ça aide, bien sûr. Quand on était jeunes on n’avait<br />
pas forcément de références féminines auxquelles<br />
s’identifier, je ne savais même pas que l’équipe de<br />
France féminine existait !<br />
Êtes-vous au contact des ces nouvelles générations<br />
de jeunes footballeurs, ou de futurs footballeurs<br />
et footballeuses chez qui la passion du ballon<br />
commence à se manifester ?<br />
THE RED BULLETIN 51