La Bible Aujourd'hui ! [automne 2020]
La Bible Aujourd'hui ! est le magazine d'information de la Société biblique francophone de Belgique. Au sommaire de cette édition : Edito / Prodigieux voyage d'écriture Traduction, édition, créativité / L'instant du mieux-vivre / Bref
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p. 2
Édito.
Quelque part vers la fin de l’été, je me penchais
sur les sols en chantier de notre nouvel espace à
Charleroi, genre grattoir à la main, gants, poussières,
gravats et miettes de plâtres éparpillés tout
partout alentour. Ce que l’entrepreneur appelle le
poste démolition s’achevait bientôt, avec un ami
nous étions affairés à défaire les choses anciennes
à coups de brosses, masses et marteaux pour faire
place à la chose nouvelle, à ce qui devient, en préparant
et semant les
limites et le contexte
d’un nouveau territoire.
À vrai dire,
la métaphore de la
rénovation d’un lieu
m’a toujours semblée
limpide, contradictoire
à cause de
la fatigue qu’elle
cause, mais profondément révélatrice du mouvement
de vie qui parcourt la Bible de bout en bout.
Car en vrai, et pour tenter de le dire humblement :
oui nous préparons un terrain sur lequel semer nouvellement,
et ce n’est pas rien.
Jésus disait encore : « Voici à quoi ressemble le
règne de Dieu : quelqu’un jette de la semence dans
son champ. Nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se
lève, les graines germent et poussent sans qu’il
sache comment. La terre fait pousser d’elle-même
d’abord la tige des plantes, puis l’épi, et enfin plein
de blé dans l’épi. Dès que le blé est mûr, on se met
au travail avec la faucille, car le moment de la
moisson est arrivé » (Marc 4.26-29, NFC).
Ces paraboles sont fascinantes. Celle-ci, on lui a
même donné un petit nom : parabole de la semence
qui pousse toute seule. Pile comme toujours dans
une saison notre vie où s’opère un mouvement de
transition, nous aimons savoir comment la chose
nouvelle va être nouvelle, quel sera son visage, sa
forme, son fonctionnement, sa manière d’être, nous
voudrions figurer ce qui va se passer et comment. Et
oui bien sûr elle est absurde cette intention-là, ce
désir de contrôle. Semer est un geste intentionnel,
mais vouloir garder la main sur la transformation
est un geste vain. Au verset 28, Jésus pose ça : la
terre ensemencée fait croitre d’elle-même, du grec
automatè. Il dit quoi ? Il dit que ce désir de maitrise
abîme la fécondité, perturbe ce processus beau et
patient de la croissance du vivant, pour les choses
comme pour les gens.
Les paroles de Jésus, et les images parfois paradoxales,
insaisissables ou brutales auxquelles elles
nous renvoient se révèlent sur la longueur, alors
qu’on les laisse rebondir en les mâchouillant lentement,
dans la patience, la constance et l’émerveillement.
En les laissant infuser en nous elles deviennent
pour notre appétit de vie comme du pain la
tendre mie, et cette Parole donnée devient douceur
pour notre langue et nos sens, ou — comme le clament
les prophètes — du miel pour notre bouche.
Vous aimez le miel, au moins ? Et le
bon pain ? Alors on se comprend.
Donc ? Dans ce cas-ci, semer nouvellement
vient magnifier un terme trop
plat : déménagement. Dans l’ici et
maintenant, les rêves, les idées, les
projets concrets et les gestes posés, il
y a d’abord le désir fort d’ensemencer
le terrain de la mission, avec cœur et
créativité, enthousiasme et mesure de
la réalité.