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syndicom magazine No.30

Depuis longtemps déjà, nous nous engageons pour les droits du travail dans les domaines Logistique, Télécommunication et Médias. De bonnes conditions de travail résultent de succès communs. Joins notre mouvement et construis ton avenir avec nous. L’union fait la force!

Depuis longtemps déjà, nous nous engageons pour les droits du travail dans les domaines Logistique, Télécommunication et Médias. De bonnes conditions de travail résultent de succès communs. Joins notre mouvement et construis ton avenir avec nous. L’union fait la force!

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10 Dossier<br />

La parabole de l’éléphant<br />

On a longtemps cru avoir gagné la bataille<br />

pour la santé au travail. Erreur : elle vient de<br />

commencer.<br />

Texte : Oliver Fahrni<br />

En novembre, lorsque les meilleures équipes du monde se<br />

retrouveront pour la Coupe du monde de football au Qatar,<br />

les footballeurs millionnaires joueront sur des cimetières.<br />

Car plus de 6500 travailleurs migrants venus d’Inde,<br />

du Pakistan, du Népal, de Bangladesh et du Sri Lanka sont<br />

décédés dans le riche petit émirat arabe du Golfe depuis<br />

que la FIFA lui a confié l’organisation de la Coupe du<br />

monde de football. La plupart d’entre eux travaillaient à la<br />

construction des sept nouveaux stades et des infrastructures<br />

gigantesques de la Coupe du monde. C’est ce qu’ont<br />

révélé les recherches du quotidien britannique The Guardian<br />

.<br />

Les causes des décès ont généralement été dissimulées<br />

comme étant « naturelles ». Beaucoup ont succombé<br />

à la chaleur, d’autres sont morts d’épuisement, de chutes<br />

accidentelles, de décharges électriques ou suite à l’explosion<br />

d’appareils de soudage, certains ont été écrasés par<br />

des charges, des machines et des échafaudages qui se sont<br />

effondrés. Sur beaucoup de chantiers, il n’y avait même<br />

pas de casques. Là où aucun syndicat ne veille à la sécurité<br />

des rapports de travail, le travail sur les chantiers tue. Désespérés<br />

par leurs conditions de travail esclavagistes, un<br />

nombre inconnu de travailleurs se sont suicidés.<br />

La mortalité massive occultée pour cet événement à<br />

paillettes rappelle ce que l’on a volontiers refoulé dans les<br />

Etats européens dotés d’une protection au travail bien développée,<br />

du moins jusqu’à l’épidémie du coronavirus : au<br />

travail, la mort ou la maladie nous guette souvent.<br />

La lutte pour la sécurité et la santé a été à l’origine du<br />

mouvement syndical, et les caisses solidaires des travailleurs<br />

contre les accidents ont été les pionnières de toutes<br />

les assurances sociales. Regagner son domicile en bonne<br />

santé après le travail tient de la gageure et est d’une actualité<br />

brûlante, comme le montre le rapport d’expérience de<br />

la secrétaire de <strong>syndicom</strong> Valentina Smajli (page 14). La<br />

sécurité au travail est un droit fondamental garanti à<br />

l’échelle mondiale depuis le dernier congrès de l’Organisation<br />

internationale du travail (OIT). Pourtant, au moment<br />

où nous produisons ce <strong>magazine</strong>, des milliers de travailleurs<br />

de la construction en Suisse vivent l’enfer de la<br />

canicule et de l’ozone – et cela tout en endurant des journées<br />

de travail extrêmement longues. Le syndicat Unia<br />

exige l’arrêt des travaux dès 35 degrés, mais les entreprises<br />

se braquent, la rentabilité prime. Or les chiffres de<br />

l’assurance-accidents suisse SUVA sont clairs : à partir de<br />

30 degrés, les accidents augmentent de 7 % dans le secteur<br />

de la construction et dans les transports publics. Cela représente<br />

des centaines de victimes qui pourraient être<br />

évitées, sans compter les autres conséquences comme le<br />

cancer de la peau. C’est un sujet explosif, car avec le réchauffement<br />

climatique, les situations météorologiques<br />

extrêmes deviennent la norme. Les travailleurs viennent<br />

de faire pression sur les entreprises à travers une manifestation<br />

d’envergure pour inscrire de meilleures réglementations<br />

sur la chaleur et les intempéries dans la CCT de la<br />

construction (CN).<br />

La chaleur n’est qu’un risque parmi tant d’autres. Les<br />

poisons, les produits chimiques dangereux, les nanoparticules,<br />

la poussière, les charges lourdes, le bruit, les machines<br />

mal utilisées font des ravages. Mais aussi le stress,<br />

les horaires de travail à rallonge, le travail en trois-huits et<br />

de nuit. Et les virus. Et la circulation. Pour 2019, l’Office<br />

fédéral des statistiques fait état de 280 000 accidents du<br />

travail. Sont particulièrement exposés, après les travailleurs<br />

du bâtiment, ceux de l’industrie, les conducteurs et<br />

coursières, les mécaniciennes et mécaniciens. Mais il<br />

n’existe guère de métiers sans risques importants pour la<br />

santé.<br />

De plus, la SUVA recense environ 3500 cas de maladies<br />

professionnelles. Ce chiffre est trompeur. Certains dommages<br />

à la santé subis au travail ne sont pas pris en considération.<br />

En partie parce qu’ils ne comptent pas officiellement<br />

comme maladies professionnelles. En partie<br />

parce qu’ils sont acceptés comme étant inévitables. Par<br />

exemple les maux de tête des ouvrières de l’horlogerie, qui<br />

les poussaient à tartiner leurs sandwichs d’analgésiques<br />

le matin (« sandwich Saridon »). L’arthrose dont souffrent<br />

à la fois le personnel soignant et certains paysans. Ou les<br />

conséquences du stress et les troubles du sommeil des<br />

conductrices et conducteurs de bus (comme le démontre<br />

une étude commune menée par trois syndicats, page 17).<br />

Et bien d’autres troubles psychosomatiques, jusqu’aux<br />

dépressions et burn-out.<br />

Une lutte sans merci est actuellement engagée entre<br />

les syndicats, les lobbies d’employeurs et les assurances<br />

pour la reconnaissance du burn-out. Il y a beaucoup en<br />

jeu : les absences dues à des problèmes psychiques ont<br />

plus que doublé depuis 2010. Or ce n’est que lorsque certains<br />

dommages à la santé sont reconnus officiellement<br />

comme maladies professionnelles que les syndicats<br />

peuvent inscrire une prévoyance efficace dans les conventions<br />

collectives de travail et si nécessaire dans la loi. Mais<br />

les employeurs et les assurances tentent souvent d’empêcher<br />

cette reconnaissance – car alors des indemnités, des<br />

prestations d’assurance et des investissements d’exploitation<br />

(comme des augmentations de personnel) sont exigibles.<br />

Rentrer chez<br />

soi du travail<br />

en bonne<br />

santé est un<br />

droit fondamental.

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