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Haiti Liberte 27 Decembre 2023

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A Travers <strong>Haiti</strong><br />

Ressurgir dans la dignité, ultime posture d’intelligence<br />

collective pour Haïti<br />

Par Erno Renoncourt<br />

Haïti s’apprête à poser un nouveau<br />

jalon dans sa chute vers l’indigence<br />

en se verrouillant un peu plus dans<br />

la déshumanisation par une nouvelle<br />

assistance internationale que<br />

l’ONU souhaite déployer au premier<br />

trimestre de l’année 2024. Paradoxalement,<br />

le 1er janvier 2024 ramène<br />

la commémoration de l’indépendance<br />

de ce pays. Un jalon qui a marqué<br />

l’envol historique d’un collectif<br />

d’hommes dignes assumant la liberté<br />

et éclairant la voie des peuples vers<br />

un humanisme profond, sans imposture.<br />

Mais c’était, il y a 220 ans. Que restet-il<br />

de cette indépendance ? A-t-elle<br />

été jamais effective ? Quel bilan sur<br />

220 ans d’une histoire qui a évolué à<br />

rebours de l’histoire et à contre sens<br />

de la dignité ? Voici un texte assez<br />

long, mais qui vaut la peine d’être lu<br />

et d’être partagé. Du moins pour ceux<br />

et celles qui sont concernés par le devenir<br />

digne d’Haïti.<br />

Débuter 2024 sur un air<br />

de bilan<br />

Comme un mouvement familier, les<br />

années s’en vont, d’autres viennent.<br />

Et dans leur succession, elles forment<br />

ce flux calendaire que les hommes<br />

utilisent pour dresser le bilan de leur<br />

existence. Existence parfois ponctuée<br />

de réussites et/ou d’échecs, souvent<br />

parsemée de victoires et/ou de défaites,<br />

mais toujours remplie d’incertitudes,<br />

de doutes et d’imprévus.<br />

Pour autant, le mouvement vital ne<br />

suit pas moins son élan vers l’avenir.<br />

Ainsi, intuitivement, pour une grande<br />

majorité d’êtres humains, vivre c’est<br />

s’orienter vers cette direction de « la<br />

flèche du temps », que l’on postule<br />

être orientée irréversiblement du passé<br />

vers l’avenir. Guidés par cet aiguillon<br />

temporel, les êtres humains vivent<br />

dans la conscience qu’évoluer dans<br />

l’existence, autrement dit vivre, c’est<br />

progresser vers l’avenir. Une certaine<br />

citation de Paul Dirac confirme cette<br />

perception : « Vivre, c’est contribuer<br />

d’une petite manière à cette chaine<br />

sans fin de progrès ». Et, chacun en<br />

vient à croire que le temps est l’unité<br />

de mesure, le grand marqueur qui permet<br />

d’évaluer ce progrès ?<br />

C’est du reste pourquoi chaque<br />

nouvelle année impose un devoir<br />

d’inventaire pour que chacun, chaque<br />

groupe, chaque peuple mesure l’exploitation<br />

des ressources que la nature<br />

rend disponible partout pour célébrer<br />

le miracle du vivant. Un tel miracle<br />

ne peut se perpétuer qu’en magnifiant<br />

l’intelligente reliance entre le<br />

vivant, dont l’homme est une infime<br />

part, et la nature si diversement riche<br />

et complexe. Et la nature dans sa<br />

générosité donne toujours. Les incertitudes,<br />

le chaos, les turbulences sont<br />

des épreuves qu’elle crée pour forcer<br />

le vivant à accéder à l’intelligence en<br />

sachant les affronter pour forger un<br />

levier d’équilibre permettant à la vie<br />

de progresser.<br />

La cadence du temps qui danse<br />

la mesure, sans jamais donner l’impression<br />

de revenir sur ses pas, résonne<br />

comme un glas, et rappelle<br />

aux êtres apprenants qu’au cœur<br />

des sociétés humaines bat le rythme<br />

lent et turbulent d’une exigence de<br />

transformation et d’innovation. Une<br />

transformation qui, parce qu’elle<br />

s’inscrit dans le temps long de l’apprentissage,<br />

offre à l’intelligence du<br />

vivant un créneau pour s’autoévaluer<br />

et se régénérer. Mais cette régénération<br />

ne peut avoir de sens et de pertinence<br />

que si elle suit le référentiel de<br />

la boussole des possibles. Référentiel<br />

dont les axes sont enchevêtrés dans<br />

une reliance entre apprentissage et<br />

transmission pour orienter la vie hors<br />

de la stagnation, loin de la régression,<br />

toujours plus près de l’innovation.<br />

Référentiel qui reproduit l’entrelacement<br />

des brins de la double hélice<br />

symbolisant le génome de la nature<br />

qu’Alain Caillé considère comme celui<br />

du don et du contredon (Que donne la<br />

nature ? L’écologie par le don, 2013).<br />

Un génome qui, de ce fait, ne peut se<br />

matérialiser qu’en garantissant que,<br />

pour chaque boucle du flux calendaire<br />

qui revient comme un saut, le jalon de<br />

la chute finale ne doit jamais être ni en<br />

deçà, ni au même point que celui de<br />

l’envol initial. Car la spirale chaotique<br />

de la nature décompose et dégénère<br />

ceux qui ne se régénèrent pas.<br />

Il y a comme l’évidence d’un<br />

axiome qui impose au vivant le devoir<br />

de l’apprentissage pour être en<br />

mesure de trouver les lignes de fuite<br />

des brèches de la boussole des possibles<br />

pour s’extraire des pièges des<br />

bulles temporelles stagnantes. Qui ne<br />

change pas se fossilise et dérive dans<br />

les abysses de l’histoire sous l’impétuosité<br />

de ce flux temporel sinueux. Flux<br />

souvent majestueux et bienveillant<br />

envers ceux qui apprennent, se transforment,<br />

transmettent et bonifient le<br />

don qu’ils ont reçu en héritage. Flux<br />

toujours tortueux et inclément envers<br />

ceux qui s’encanaillent, végètent, monopolisent<br />

et laissent en déshérence le<br />

don (abandonnent) qu’ils ont reçu en<br />

héritage. Autrement dit, qui reste invariant<br />

n’existe pas. Mais qu’on se le<br />

tienne pour dit, ne pas exister ne veut<br />

pas dire disparaitre totalement. Ne pas<br />

exister, dans ce contexte, c’est se retrouver<br />

prisonnier du tunnel récursif<br />

temporel, au point de n’avoir que le<br />

point fixe de son envol dans le passé<br />

comme bilan. Ainsi, il est permis de<br />

dire avec Christophe Wargny qu’Haïti<br />

n’existe pas (Haïti deux cents ans de<br />

solitude, 2008). Et pour cause, car le<br />

verbe exister a pour étymologie latine<br />

ex-sistere, et signifie s’extraire de<br />

l’immobilité et se mettre en mouvement<br />

dans une direction déterminée.<br />

En toute logique anthropologique,<br />

tout collectif humain non apprenant<br />

et invariant sort de l’histoire et cesse<br />

d’exister comme cette part du vivant<br />

qui, plongée dans une nature, par essence<br />

tumultueuse et paradoxale, est<br />

appelée à innover son écosystème<br />

pour magnifier l’existence, dont le<br />

mouvement permanent rend éloge à<br />

la nature.<br />

Mais qu’est-ce que le progrès ?<br />

Et surtout comment le mesurer à<br />

l’échelle anthropologique pour qu’il<br />

reflète le cheminement responsable,<br />

digne et intelligent d’une nation ?<br />

Peut-on construire un système objectif<br />

de mesure du progrès collectif<br />

réalisé par un peuple, sans que ce<br />

progrès ne soit confondu avec ces petites<br />

réussites individuelles précaires<br />

que chacun célèbre, chaque année,<br />

alors qu’elles contribuent à verrouiller<br />

dans une invariance déshumanisante<br />

le collectif auquel ces individus<br />

appartiennent ? Question encore plus<br />

pertinente pour Haïti, puisque toutes<br />

les analyses laissent croire que la<br />

‘‘gang-grénisation’’ présente, dans<br />

laquelle le pays agonise, est une crise<br />

de gouvernance : comment gouverner<br />

ce mouvement vers le progrès ?<br />

Peut-on suivre la direction définie par<br />

d’autres, prise par d’autres ? Existe-til<br />

une direction universelle qu’il faut<br />

suivre pour trouver sa voie ?<br />

Des raisons de se remettre<br />

en question<br />

Voilà quelques-unes des questions,<br />

extraites de la raisonnance axiomatique<br />

sur l’indigence que je module<br />

depuis quelques années déjà, et qui,<br />

par leur pertinence, s’imposent à ma<br />

conscience intranquille, en cette fin<br />

d’année <strong>2023</strong>, comme une exigence<br />

de bilan pour évaluer le cheminement<br />

anthropologique de ce lieu que j’habite<br />

depuis mes 56 ans d’existence. Lieu<br />

qui dans mon angoisse existentielle<br />

présente impose, par-delà la mémoire,<br />

un devoir de responsabilité, puisqu’il<br />

s’est affirmé au monde, avec impertinence<br />

et insolence, un 1 er janvier<br />

1804, en se re-situant humainement<br />

sur une trajectoire autre que celle<br />

déshumanisante sur laquelle l’ordre<br />

mondial d’alors voulait le situer à jamais.<br />

Ce bilan anthropologique est<br />

indispensable et doit être fait sans<br />

complaisance pour au moins trois raisons.<br />

• La première est qu’à l’aube<br />

des 220 ans de cette reconfiguration<br />

humano-spatio-temporelle, il y<br />

a lieu d’évaluer si l’envol historique<br />

de 1804 a maintenu, ‘‘sur la route du<br />

temps’’, au point d’ancrage de ce nouveau<br />

jalon qui se dressera en 2024,<br />

la trajectoire de la dignité voulue par<br />

les pères de l’indépendance haïtienne.<br />

• S’il est vrai que 220 ans<br />

représentent un temps très court à<br />

l’échelle géologique, mais à l’échelle<br />

des générations de vies humaines, ce<br />

temps n’est pas rien. Et il commande<br />

un bilan honnête, au-delà du rituel<br />

de célébrer ‘‘la soupe joumou’’ comme<br />

symbole de liberté. Car, il y a des<br />

doutes qu’Haïti soit encore libre, si jamais<br />

il l’a été à un moment, malgré<br />

l’indépendance.<br />

• La seconde, découle de la<br />

première, Car avec cette nouvelle assistance<br />

internationale prévue pour<br />

2024, selon les injonctions des tuteurs<br />

d’Haïti et les vœux des élites<br />

dépendantes de ces tuteurs, il est plus<br />

que certain qu’Haïti évolue à perte de<br />

sens, sinon à contre sens de la trajectoire<br />

de la dignité. Tant son destin et<br />

sa souveraineté lui échappent.<br />

La troisième est que les rituels<br />

des célébrations de l’indépendance<br />

auxquels se livre Haïti chaque<br />

1 er janvier, les réussites littéraires,<br />

académiques, culturelles dont Haïti<br />

s’enorgueillit ne sont que des enfumages<br />

par rapport auxquels le pays doit<br />

apprendre à se re-situer. Pour cause,<br />

ni ces rituels ni ces réussites individuelles<br />

n’ont aucune incidence sur l’évolution<br />

erratique du pays.<br />

De fait, les réussites éclatantes<br />

de Dany Laferrière, accédant à l’immortalité<br />

à l’Académie française, de<br />

Yanick Lahens, rayonnante dans<br />

son statut professoral au Collège de<br />

France, d’Emmelie Prophète, obtenant<br />

une énième distinction littéraire,<br />

du Dr Jean William Pape, promu au<br />

conseil scientifique de l’Organisation<br />

Mondiale de la Santé, et on en passe,<br />

pour exceptionnelles que soient ces<br />

réussites, elles n’ont jusqu’à date pas<br />

su empêcher le pays de se précipiter<br />

dans l’enfer de la gangstérisation. Et<br />

elles sont à mille lieux de pouvoir<br />

permettre à la population de se situer<br />

sur la trajectoire de sa souveraineté,<br />

de prendre en mains son destin pour<br />

ressurgir dans la dignité qu’avait souhaité<br />

et initié pour elle les pères fondateurs<br />

de l’indépendance.<br />

On se doit de remettre ces réussites<br />

en question en se demandant :<br />

que valent les titres d’anoblissement<br />

et les distinctions honorifiques que<br />

l’Occident octroie aux Haïtiens quand<br />

ils n’empêchent pas l’impuissance de<br />

la population face à sa déshumanisation<br />

invariante ?<br />

Assumer le dissensus comme<br />

ferment d’intelligence<br />

Ce constat paradoxal interpelle l’intelligence<br />

et la dignité. Car, c’est affreusement<br />

déshumanisant pour<br />

un collectif, ayant hérité d’un flambeau<br />

aussi étincelant, de continuer à<br />

‘‘sous-vivre’’ dans l’enfumage d’une<br />

culture d’insignifiance qui brille par<br />

l’anoblissement de quelques-uns qui<br />

font vivre, avec force éloquence, pour<br />

leurs succès individuels, le mythe de<br />

la résilience du peuple haïtien, alors<br />

que celui-ci agonise d’impuissance<br />

dans son présent gangstérisé et assisté.<br />

Ce présent gangstérisé et assisté<br />

est d’autant plus problématique qu’il<br />

s’oriente vers un ‘‘futur rétrograde’’,<br />

car verrouillé sur la chaine de la<br />

dépendance. Chaine que le pays avait<br />

rompu le 1 er janvier 1804 pour affirmer<br />

son existence. Ce futur rétrograde<br />

est angoissant et indigent, car il rappelle<br />

la population sur la trajectoire du<br />

passé déshumanisé d’avant 1804.<br />

Le nœud gordien de la problématique<br />

que tente de résoudre la raisonnance<br />

axiomatique de l’indigence,<br />

dont cette tribune est extraite, s’articule<br />

autour d’une question principale<br />

: suffit-il pour un peuple d’avoir<br />

une belle histoire à raconter et une<br />

date à célébrer pour qu’il gomme<br />

et oublie la singularité de sa situation<br />

déshumanisante d’être en<br />

permanence en naufrage dans le<br />

malheur et d’être sans cesse pris<br />

en charge par une assistance internationale<br />

qui contribue à nourrir<br />

sa déshumanisation ?<br />

L’homme politique Québécois,<br />

René Levesque, écrivait justement : «<br />

un peuple dont le territoire, la sécurité,<br />

la justice, l’éducation, la santé sont<br />

pris en charge par d’autres, au profit<br />

d’autres, est réduit à l’insignifiance ».<br />

Aujourd’hui, l’immense majorité de la<br />

population haïtienne ‘‘aban-don-ne’’<br />

le territoire national pour fuir vers<br />

d’autres ailleurs plus intelligemment<br />

gouvernés. Peu d’Haïtiens sont capables<br />

de questionner le sens de cet<br />

‘‘aban-don’’ dans la déshumanisation<br />

du pays. Car il faut rappeler que cet<br />

‘‘aban-don’’, cette résiliation du devoir<br />

de s’enraciner sur son terroir pour y<br />

ensemencer l’intelligence et le transformer<br />

dignement, est un processus<br />

entrepris depuis des décennies par<br />

des générations d’Haïtiens. IL ne fait<br />

que s’accélères aujourd’hui devant<br />

l’évidence de l’inexistence d’Haïti. Le<br />

drame est que la majorité de ceux qui<br />

fuient Haïti espèrent que des étrangers<br />

vont venir y faire régner la démocratie<br />

et la sécurité pour leur permettre de<br />

re-venir festoyer dans les bacchanales<br />

des fêtes champêtres. Au risque<br />

de mécontenter plus de monde encore<br />

et d’augmenter le nombre de mes<br />

détracteurs, j’ose dire qu’il y a dans<br />

cette posture d’aban-don de lourdes<br />

irresponsabilités, sinon de lourdes<br />

médiocrités. Il est donc intelligent<br />

d’assumer le dissensus pour re-situer<br />

les postures sur une trajectoire plus<br />

responsable et plus digne.<br />

Continuer de suivre la voie de la<br />

fuite pour en faire une stratégie durable<br />

de survie, c’est se situer à contre<br />

sens de la vraie résilience. Car celle-ci,<br />

dans son essence noble et digne, exige<br />

que « les sociétés qui connaissent<br />

de graves crises existentielles, faisant<br />

craindre leur disparition, […] [inventent]<br />

des mécanismes de régénération<br />

» (Sakanyi, Ubuntu et résilience<br />

des peuples africains, 2022, p. 13).<br />

Et nul ne peut se régénérer hors de<br />

ses racines historiques et culturelles.<br />

Pour paraphraser Simone Weil, se<br />

déraciner, c’est se déshumaniser. Car<br />

l’enracinement est le « prélude à une<br />

[assumation] des devoirs envers l’être<br />

humain » (L’enracinement. Prélude à<br />

une déclaration des devoirs envers<br />

l’être humain, 1949, p. 5)<br />

Forcément, pour ceux qui sont<br />

intelligents et dignes et qui ne se<br />

contentent pas de leur obsolescence<br />

anoblie, 2024 appelle à une rupture<br />

d’avec ce présent pour un réalignement<br />

des postures individuelles sur<br />

des finalités collectives et sur des trajectoires<br />

plus orientées sur la noblesse<br />

impertinente de l’envol historique de<br />

1804. C’est l’ultime moyen pour extraire<br />

Haïti de ces entrelacs insignifiants,<br />

du fonds desquels quelques-uns<br />

émergent dans les loques putrides de<br />

la reconnaissance internationale. La<br />

rupture d’avec la dépendance vis-àvis<br />

de l’assistance internationale est<br />

l’unique trajectoire qui peut permettre<br />

à la population haïtienne de ressurgir<br />

dans la dignité d’un peuple assumant<br />

son héritage de liberté et évoluant<br />

vers le destin des hommes-lumière.<br />

S’entêter à être digne<br />

Mais assumer cette rupture demande<br />

de l’intelligence, de la témérité et<br />

du courage. Du courage pour questionner<br />

et rompre les liens occultés<br />

qu’entretiennent ces succès individuels<br />

avec l’errance anthropologique<br />

qui déshumanise la population. De<br />

la témérité pour refuser la trajectoire<br />

de soumission et de servitude<br />

sur laquelle l’assistance internationale<br />

veut replacer le peuple haïtien.<br />

De l’intelligence pour saisir, dans les<br />

fissures de ce temps qui se reconfigure,<br />

les brèches qui orientent vers<br />

les lignes de fuite de la flèche du<br />

suite à la page(16)<br />

Vol 17 # 26 • Du <strong>27</strong> Décembre <strong>2023</strong> au 2 Janvier 2024<br />

<strong>Haiti</strong> Liberté/<strong>Haiti</strong>an Times<br />

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