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MANUEL GÉNÉRAL DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE - INRP

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.PARTIE <strong>GÉNÉRAL</strong>E<br />

hygiéniques défectueuses, souvent déplorables.<br />

Les dommages de la guerre ont été plus<br />

grands au point de vue intellectuel. Les classes<br />

ont été désorganisées par les nombreux vides<br />

résultant de la mobilisation des instituteurs.<br />

Sans m édire des je unes suppléants et suppléantes<br />

qui ont fait tout le possible, il faut bien constater<br />

que l'absence de maîtres expérimentés et jouissant<br />

d'une grande autorité morale ne pouvait<br />

manquer de causer un certain désarroi.<br />

Qu'est devenue durant la .guerre notre loi<br />

d'obligation, si impérative dans ses ternies etsi<br />

peu observée., môme avant 1914? Les lois sur<br />

le travail des enfants n'ont pas été appliquées.<br />

Les absences se sont faites plus fréquentes.,<br />

plus faciles encore, dans les campagnes surtout<br />

où., dès qu'on a huit ans, on peut se rendre<br />

utile.. Beaucoup, vers onze ou douze aas,oj^ dit<br />

à l'école un adieu probablement sans retour. A<br />

cette fréquentation irrégulière et raccourcie<br />

doit correspondre un bagage scolaire singulièrement<br />

amoindri. 'Comment en combler les lacunes?<br />

Pour l'enfant, la guerre s'est manifestée surtout<br />

par lés vidps qui se sont produits autour de<br />

lui. 11 a vu partir les hommes de .son village.<br />

Il a vu s'en aller son père, ses frères. 11 a<br />

connu la tristesse du foyer' où il manque quelqu'un,<br />

l'attente anxieuse des lettres qui n'arrivent<br />

pas. 11 a vu se gonfler les yeux de sa maman.<br />

Lui aussi a fait effort pour ne pas pleurer, premieressai<br />

de volonté, première manifestation de<br />

courage. D'autres, hélas ! trop nombreux, auront<br />

eu à pleurer tout de ton, car un jour on leur a<br />

dit que leur papa ne reviendrait plus.<br />

il serait téméraire, je crois, de se figurer<br />

que nos enfants n'ont point tant souffert moralement<br />

parce qu'ils n'ont pas cessé de jouer et<br />

de rire avec leurs camarades. Ne concluons pas<br />

hâtivement à l'indifférence de nos fils. Nousmêmes,nous<br />

n'avons pas toujours eu durant ces<br />

cinquante mois la mine attristée et le visage<br />

sévère. N'oublions pas surtout que 'la douleur<br />

n'est pas, pour l'enfant, ce qu'elle est pour<br />

l'homme fait. Chez nous, elle peut susciter une<br />

réaction de volonté; chez l'enfant, trop jeune<br />

et trop faible pour y résister, elle briserait le<br />

ressort et risquerait de laisser un pauvre être<br />

hébété du coup. :<br />

Autre effet de la guerre: la famille a été<br />

désorganisée! Chacun a dû aller de son côté :<br />

l'homme au front, la femme aux champs ou à<br />

l'usine, l'enfant à l'école ou dans là rue.<br />

Avouons-le, l'enfant, par la force des choses,<br />

s'est trouvé, pour ainsi dire, livré à lui-même,<br />

exposé au danger des mauvaises fréquentations,<br />

à celui encore plus grand des spectacles si peu<br />

moraux de la rue. N'avons-nous pas eu la tristesse<br />

de voir des gamins de douze ans, fumant<br />

la cigarette, tapageant, jurant,.d'une effronterie<br />

révoltante?<br />

C'est une exception sans doute, mais sans<br />

aller jusque-là, le nombre est grand de ceux à<br />

à qui fit défaut tout ensemble l'éducation de la<br />

famille, celle de. l'école, celle de tous les milieux<br />

moraux qui peuvent protéger l'enfance et<br />

les adolescents.<br />

•le ne veux quand même pas dire que seules<br />

des influences mauvaisesse sont fait jour. Soyons<br />

justes. Nos fils ont eu de beaux spectacles<br />

a contempler : l'unanimité des cœurs et des<br />

sentiments, le formidable travail de l'arrière,<br />

les œuvres d'assistance, l'héroïsme de nos soldats,<br />

leurs glorieuses blessures, leur sublime<br />

sacrifice... De tout cela aussi quelque chose<br />

est resté qui peut contre balancer beaucoup de<br />

mauvaises influences. Mais encore faudrait-il<br />

aider le bien à triompher du mal,et. à cet effet,<br />

soutenir l'enfant contre les tentations et les<br />

d-ëfail lances de toute sorte.<br />

Si toutes ces considérations sont exactes pour<br />

nos enfants en génê , elles le sont bien davantage<br />

pour ceux qui ont vu de près les horreurs<br />

de la guerre, c'est-à-dire pour ceux des régions<br />

envahies. Ceux-ci ont connu par surcroît la fuite<br />

douloureuse, la vie errante, l'incessant voisinage<br />

des soldats dont ils ont partagé les souffrances.^<br />

Mais là je veux céder la parole à un<br />

document pour ainsi dire officiel et qui n'en<br />

est que plus émouvant. C'est le rapport présenté<br />

à l'Académie de médecine par les docteurs Genevrier<br />

et Ilenger, après une enquête sur l'état<br />

sanitaire des enfants de ces régions.<br />

« Trois séries d'écoliers ont été examinés :<br />

ceux au-dessous de six ans, ceux de sept à<br />

douze ans et ceux de treize à quatorze ans. On<br />

a relevé, à Lille notamment, une notable insuffisance<br />

de poids chez tous les enfants des écoles<br />

maternelles et '80 0/0 de ceux fréquentant les<br />

écoles primaires élémentaires. Les thorax,<br />

tons trop étroits, se dilatent mal, la tension<br />

artérielle est très affaiblie. 20 0/0 des jeunes<br />

écoliers et de 60 à 75 0/0 des enfants âgés de<br />

huit à treize ans sont atteints d'adénopathie<br />

trachéo-bronchique. »<br />

Suivent d'autres détails enregistrés* par les<br />

savants en termes techniques. Et ils ajoutent:<br />

« Au point de vue pédagogique, tous les<br />

enfants de la région de Lille présentent un<br />

retard scolaire de deux ans au moins, souvent<br />

avec des signes dé débilité motrice et un nota- •<br />

Me retard du développement intellectuel. »<br />

Que faire là-contre ? Comment réagir? Ces<br />

docteurs demandent, entre autres mesures urgentes,<br />

l'établissement d'une inspection'médicale<br />

visant l'installation de cantines scolaires,<br />

bains, douches, écoles de plein air; assainissement<br />

ou reconstruction des locaux scolaires;<br />

enseignement de la gymnastique respiratoire et<br />

reprise énergique de toutes les œuvres scolaires<br />

et postscolaires.<br />

Plus que jamais, ajouterons-nous, il est nécessaire<br />

de reprendre en main ces jeuues<br />

esprits sur lesquels de mauvaises influences se<br />

saut appesanties. Plus que jamais, il faut que<br />

l'école et la famille s'entendent pour coordonner<br />

leur action. Les parents et les maîtres se<br />

verroct, ils causeront de l'enlànt, l'étudieront,<br />

s'entendront sur les moyens de le former.<br />

Surtout, il faut prolonger l'influence de l'école<br />

par des réunions, des causeries, des séances<br />

récréatives, par les cours d'adultes, par les<br />

cours professionnels, par des sociétés de gymnastique,<br />

de tir, de sports.<br />

Peut-on supposer qu'une telle œuvre sera<br />

l'œuvre d'une seule personnel? Quelle eri eur ce<br />

serait I Nul instituteur, à lui seul, n'y peut<br />

suffire. Mais la tàéhe s'impose à tous les bons<br />

citoyens : qu'ils unissent ieurs efforts! Il s'agit<br />

au fond d'assurer l'éducation d'une génération<br />

sur qui reposera un héritage lourd de gloire,<br />

mais aussi de responsabilités.<br />

G. SALVAN,<br />

Instituteur à'Cuzorn (Lot-et-Gftronne)<br />

0. FORSANT. L'ÉCOLE S O U S L E S OBUS. I volume in-I6 illustré. 4 50 Ma j° rat -<br />

comprise^

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