Zibeline n° 55 en PDF
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68 ARTS VISUELS ART-O-RAMA<br />
Garder le cap<br />
Accueilli à la Friche depuis sa création <strong>en</strong> 2007,<br />
le projet de Gaïd Beaulieu-Lambert et Jérôme<br />
Pantalacci r<strong>en</strong>contre un succès régulier. L’édition<br />
2012 franchit indéniablem<strong>en</strong>t un palier de<br />
maturité, plus conforme à l’univers marchand <strong>en</strong><br />
vigueur, ce qui n’est pas forcém<strong>en</strong>t un handicap.<br />
Car la mise <strong>en</strong> espace s’est professionnalisée,<br />
pour se substituer aux efforts d’occupation quelque<br />
peu anarchiques des débuts dans une Cartonnerie<br />
plutôt à l’état brut. Certains ont regretté cet<br />
aspect expérim<strong>en</strong>tal ouvert, mais le nombre de<br />
galeries et d’artistes représ<strong>en</strong>tés, et de collectionneurs<br />
v<strong>en</strong>us visiter et acheter (même si les chiffres<br />
ne sont pas <strong>en</strong>core très précis), a progressé au<br />
point que pour la première fois depuis cette année<br />
les exposants doiv<strong>en</strong>t s’acquitter d’un droit d’<strong>en</strong>-<br />
Une des responsabilités que s’est<br />
donnée Art-O-Rama est le souti<strong>en</strong> et<br />
l’accompagnem<strong>en</strong>t des artistes. Ce<br />
dont a bénéficié Caroline Duchatelet<br />
choisie parmi les artistes de l’édition<br />
passée. «Art-0-Rama a été une très<br />
bonne surprise pour moi, l’année<br />
dernière avec le show-room et maint<strong>en</strong>ant<br />
comme artiste invitée. J’ai<br />
noué des contacts intéressants et<br />
des projets sont à v<strong>en</strong>ir. J’ai fait un<br />
livre aux éditions P et un autre chez<br />
Analogues, et un collectionneur<br />
parisi<strong>en</strong> a acheté deux de mes films<br />
récemm<strong>en</strong>t.»<br />
En marge de l’effervesc<strong>en</strong>ce du salon,<br />
ses deux nouvelles créations<br />
vidéos constitu<strong>en</strong>t un véritable havre<br />
de paix, hors du temps. Mardi 03 novembre<br />
et Lundi 26 avril ont été<br />
trée de 1 000 euros. Somme <strong>en</strong>core modeste,<br />
mais qui chiffre le désir d’exposer là.<br />
Jérôme Pantalacci désormais seul aux commandes<br />
confirme : «Nous sommes arrivés à un niveau<br />
qui correspond plutôt bi<strong>en</strong> à notre projet de<br />
départ. Avec vingt galeries pour une quinzaine<br />
l’année dernière et tout ce que cela représ<strong>en</strong>te<br />
d’organisation, c’est un format de foire que nous<br />
pouvons <strong>en</strong>core maitriser.» Le budget approcherait<br />
les 100 000 euros, la part publique représ<strong>en</strong>tant<br />
69 000 euros (24 de la ville de Marseille, 35 du<br />
Départem<strong>en</strong>t et 10 de la Région), les apports<br />
privés et de mécénat 15 000 euros, les prestations<br />
directes le reste. Ce qui n’est pas énorme et<br />
représ<strong>en</strong>te un bel équilibre.<br />
Reste à évaluer l’impact de l’évènem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> ter-<br />
L’instant esthétique<br />
conçus dans la continuité de son<br />
travail <strong>en</strong>trepris dans les années<br />
2009 lors de son séjour à la Villa<br />
Médicis, lorsque l’artiste <strong>en</strong> vi<strong>en</strong>t à<br />
capter l’apparition de l’aube. Nous<br />
retrouvons les jeux l<strong>en</strong>ts et subtils<br />
modelant la fluidité du temps et de<br />
l’espace pour inviter à une percep-<br />
mes économiques et les retombées pour les<br />
galeries, le bénéfice pour les artistes, sans oublier<br />
la part de l’art lui-même qui fonde l’exist<strong>en</strong>ce de<br />
l’évènem<strong>en</strong>t, et son financem<strong>en</strong>t semi-public. On<br />
pourra discuter des choix des œuvres effectués<br />
par les galeries ret<strong>en</strong>ues qui ont toujours bénéficié<br />
du principe d’une carte blanche. Impression<br />
de déjà vu, manque d’ampleur pour certaines<br />
pièces (qu’on désigne rarem<strong>en</strong>t par la terminologie<br />
traditionnelle d’«œuvre» sauf à tomber sur<br />
un master-piece !), cadres retournés-vides-posés<br />
au sol, peinture/ dégoulinure, néo-urinoir, assemblage<br />
hasardeux peuv<strong>en</strong>t décevoir certaines<br />
s<strong>en</strong>sibilités… mais, c’est aussi le chall<strong>en</strong>ge, on<br />
peut y faire de belles r<strong>en</strong>contres !<br />
CLAUDE LORIN<br />
Mardi 3 novembre, 2009-2012, video 4'20 © Caroline Duchatelet<br />
Lundi 26 avril, 2010-2012, video 9'25 © Caroline Duchatelet<br />
tion <strong>en</strong> lâcher prise. Si on p<strong>en</strong>se à<br />
Bachelard, Duchatelet évoque volontiers<br />
une p<strong>en</strong>sée proche de la<br />
s<strong>en</strong>sibilité ori<strong>en</strong>tale avec le philosophe<br />
François Julli<strong>en</strong>. «Je ne travaille<br />
pas à partir d’idées ou de concepts.<br />
C‘est plus de l’ordre de l’intuition,<br />
d’une résonnance organique. Je<br />
suis sculpteur à l’origine mais je<br />
travaille <strong>en</strong> aveugle, de façon haptique<br />
pour faire <strong>en</strong> sorte que les<br />
choses advi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t.»<br />
Avec Lundi 26 avril, pour une fois,<br />
l’espace, se dévoilant dans l’apparition<br />
l<strong>en</strong>te de la lumière, latérale<br />
comme chez un Vermeer, creuse<br />
une perspective dans l’ombre, annonce<br />
de la couleur, frôle une réalité<br />
plus objective qu’à l’habitude d’un<br />
intérieur inhabité. En faisant <strong>en</strong><br />
sorte qu’il n’y ait aucune prés<strong>en</strong>ce,<br />
ni bande son et si peu de lumière,<br />
l’artiste préfère s’arrêter juste «avant<br />
que mes films fass<strong>en</strong>t des images,<br />
que comm<strong>en</strong>ce une narration».<br />
C’est pourquoi il ne faut pas confondre<br />
l’aube et l’aurore. Seulem<strong>en</strong>t<br />
partager ce qui est <strong>en</strong> train d’adv<strong>en</strong>ir,<br />
la montée des choses avant leur<br />
passage <strong>en</strong> plein jour et <strong>en</strong>trer dans<br />
le quotidi<strong>en</strong>. Caroline Duchatelet<br />
invite là <strong>en</strong>core à une expéri<strong>en</strong>ce de<br />
l’instant vécu à contrario de l’espace<br />
arp<strong>en</strong>té et du temps mesuré. En<br />
quelque sorte une esthétique ténue<br />
de la dé-mesure.<br />
C.L.<br />
Art-O-Rama<br />
jusqu’au 16 sept<br />
Cartonnerie, La Friche<br />
www.art-o-rama.fr