05.03.2013 Views

activité - Horizons

activité - Horizons

activité - Horizons

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Le réalisateur français<br />

Daniel Kupferstein est en<br />

Algérie pour réaliser<br />

dans le cadre de<br />

«Histoire, mémoire et<br />

politique», un<br />

documentaire témoignage sur ces<br />

Algériens tués ou blessés le 14 juillet<br />

1953 à Paris, soit 14 mois avant la<br />

guerre de libération nationale. Après<br />

une escale à Alger, le documentariste<br />

est parti accompagné de son assistant<br />

Ferhat Bouanou, vers la ville de Tigzirtsur-Mer<br />

dans la wilaya de Tizi Ouzou,<br />

pour filmer les premières séquences de<br />

ce qui sera son troisième documentaire<br />

après en avoir réalisé deux autres,<br />

toujours sur des évènements ayant trait<br />

à la guerre de libération.<br />

Daniel Kupferstein connu sur la<br />

scène cinématographique « engagée »<br />

dans le sens le plus large du terme, traite<br />

entre autres, des thèmes qui touchent<br />

les couches vulnérables de la société<br />

française, notamment les banlieues et<br />

la communauté humaine. Les premières<br />

prises de vue ont été faites au<br />

village Tamdecht dans la commune de<br />

Tifra, daïra de Tigzirt-sur-Mer sur la<br />

tombe de Tadjadit Amar. C’est dans<br />

cette localité montagneuse que Daniel<br />

Kupferstein a entamé ce qui est la première<br />

partie du documentaire sur les<br />

manifestants algériens tombés sous les<br />

balles de la police française, en cette<br />

date fatidique du 14 juillet 1953.<br />

Il faut rappeler que les repérages<br />

des lieux s’est fait il y a quelques<br />

années, grâce à Ferhat Bouanou, originaire<br />

de la région, qui a une première<br />

fois, photographié la tombe et pris<br />

contact avec la famille Tadjadit.<br />

«Nous travaillons avec nos<br />

propres moyens», signale le<br />

documentariste pour expliquer<br />

que le premier à avoir<br />

témoigné face à la caméra de<br />

Daniel Kupferstein sur ce<br />

triste évènement de l’été 1953<br />

est monsieur Oudelki Moh<br />

Lounès, du village Ighil<br />

Boussouel (Ifflissen). Soixante<br />

ans après, le vieil homme, les<br />

souvenirs encore présents, rap-<br />

16 CULTURE<br />

HORIZONS • Vendredi 4 - Samedi 5 Mai 2012<br />

Un film documentaire<br />

sur un 14 juillet 1953 sanglant<br />

Résurrection des morts de<br />

la place de la Nation à Paris<br />

Reportage réalisé par Leïla Nekachtali<br />

L’inhumation<br />

d’Amar<br />

Tadjadit<br />

à Tifra<br />

porte des détails de ce que furent les<br />

derniers instants de Tadjadit Amar,<br />

grièvement blessé par un policier français<br />

qui tira sur lui à bout portant. Le<br />

jeune homme rendra son dernier<br />

souffle à peine le seuil de l’hôpital Saint<br />

Louis franchi. Ensuite, ce fut au tour<br />

des frères du chahid, Arezki et Lounès<br />

de raconter comment se sont déroulées<br />

les funérailles, le 19 juillet.<br />

Une cérémonie sous haute surveillance<br />

de la Garde Mobile. A 17 h, le<br />

documentariste n’avait pas encore fini<br />

de filmer les témoignages des uns et<br />

des autres. Daniel Kupferstein devait<br />

ensuite compléter son tournage jusqu’au<br />

27 avril à Boukhalfa, Béjaïa et<br />

Guenzet.<br />

La deuxième partie, sur les tués de<br />

la Place de la Nation dans la capitale<br />

française, de son film, reprendra au<br />

mois de juin prochain et axera sur<br />

d’autres régions du pays, notamment<br />

l’ouest du pays.<br />

Daniel Kupferstein a, à son actif une<br />

quinzaine de documentaires, dont<br />

deux traitant de la répression, perpétrée<br />

au cours de manifestations pacifiques<br />

qui ont coûté la vie à des<br />

dizaines d’Algériens. «17 octobre<br />

1961 : dissimulation d’un massacre » et<br />

« Mourir à Charonne pourquoi ? » sont<br />

des films qui interpellent la société<br />

française sur des évènements très<br />

graves s’étant déroulés sur le sol français.<br />

De même que ce travail de mémoire<br />

par films interposés, se veut une<br />

prise de conscience sur l’amnésie qui<br />

plane et qui a plané sur une partie de «<br />

l’histoire contemporaine de<br />

France ».<br />

«Plus de 1000 personnes sont venues<br />

aux funérailles de mon frère dont la<br />

dépouille était arrivée le 18 juillet», se<br />

souvient Lounès Tadjadit qui avait 9 ans<br />

en 1953. «Le 19 juillet, jour de l’inhumation,<br />

le rassemblement de ces<br />

dizaines d’hommes et de femmes fit<br />

peur aux autorités françaises de Tigzirt<br />

qui firent appel à des contingents de<br />

Garde mobile dépêchés de Tizi Ouzou.<br />

On intima l’ordre à mon père de prier<br />

les gens de repartir et que la cérémonie de l’enterrement soit<br />

écourtée. Ce qui se passa. On enterra mon frère dans la précipitation,<br />

juste dans un trou creusé à la hâte. Le lendemain,<br />

quatre hommes sont venus à la maison, des responsables du<br />

MTLD pour nous présenter leurs condoléances. Avant de<br />

repartir, ils remirent à mon père un billet de 5000 anciens<br />

francs. L’après-midi même de cette journée, mon père a été<br />

DANIEL KUPFERSTEIN,<br />

DOCUMENTARISTE FRANÇAIS<br />

EST VENU EN CETTE MI-AVRIL,<br />

EN ALGÉRIE POUR RÉALISER<br />

UN FILM SUR LES<br />

ÉVÈNEMENTS DRAMATIQUES<br />

QUI ONT COÛTÉ LA VIE À DES<br />

MARCHEURS POUR<br />

L’INDÉPENDANCE ALGÉRIENNE<br />

UN CERTAIN 14 JUILLET 1953.<br />

SES PREMIÈRES PRISES DE<br />

VUE SE SONT CONCRÉTISÉES<br />

EN HAUTE ET BASSE KABYLIE<br />

ET L’ONT AMENÉ JUSQU’À<br />

GUENZET. LA REPRISE DU FILM<br />

SE FERA AU DÉBUT DU MOIS<br />

DE JUILLET PROCHAIN DANS<br />

L’OUEST DU PAYS OÙ LE<br />

RÉALISATEUR IRA ÉGALEMENT<br />

À LA RENCONTRE DES<br />

RESCAPÉS DE CETTE JOURNÉE<br />

FATIDIQUE.<br />

CHRONIQUE ET HISTOIRE<br />

Un retour sur le 14 juillet 1953<br />

« Comme si c’était aujourd’hui » par Oudelki Moh Lounès<br />

« Nous sommes partis aux environs de 8 heures du matin de la Bastille vers la<br />

place de la Nation, pour encadrer de jeunes militants algériens. Faisant partie des<br />

responsables de section du MTLD, Amar Tadjadit et moi, portions des brassards<br />

aux couleurs algériennes. Une jeune fille oranaise portait une pancarte<br />

avec le portrait de Messali Hadj. Des policiers français se ruèrent sur<br />

elle et l’ont molestée. Fous de rage, nous avons répliqué par des<br />

Daniel<br />

Kupferstein<br />

Réalisateur de nombreux films<br />

documentaires, il est également<br />

enseignant à l'Ecole Internationale de<br />

Création Audiovisuelle et de<br />

Réalisation (EICAR) sur l’écriture. Sa<br />

production filmographique et les<br />

séries TV comprennent notamment<br />

«L'Amitié plus forte que la haine»<br />

«Une maison pour les parents»<br />

«Le 17 octobre 1961 dissimulation<br />

d’un massacre» et «Mourir à<br />

Charonne pourquoi ?»<br />

n L. N.<br />

slogans indépendantistes et l’on a tiré sur nous avec des balles<br />

réelles. Ce fut la débandade. Il y eut des tirs de partout atteignant<br />

les manifestants. Alors que nous avons essayé de nous<br />

sauver, on a vu un policier braquer son arme sur Amar et<br />

tirer.<br />

Au cours de cette journée du 14 juillet 1953, il y eut 7 morts<br />

dont Mouhoub Illoul de Oued Amizour (Bejaïa) Tahar<br />

Madjine de Lafayette (Bougaâ), Abdelkader Trari<br />

(Nedroma) Larbi Daoui (Oran) Amar Tadjadit (Tigzirtsur-Mer),<br />

Abdellah Bacha (M’chedellah) et enfin Maurice<br />

Lurot, syndicaliste à Paris. Amar et moi, distribuions<br />

toutes les semaines, sous le manteau à l’époque, 300<br />

numéros du journal «Algérie Libre». Malgré le risque,<br />

nous allions là où se trouvaient nos compatriotes pour leur<br />

donner des exemplaires.»<br />

n L. N.<br />

convoqué au commissariat de police de<br />

Tigzirt-sur-Mer. Il avait des appréhensions<br />

en franchissant le seuil de l’enceinte.<br />

Le commissaire de police lui posa des<br />

questions sur les militants venus la<br />

veille et sur la somme d’argent reçue.<br />

Mon père ne put répondre sur l’identité<br />

des inconnus, mais affirma avoir perçu<br />

un pécule et remit le billet au responsable<br />

de la sécurité. Ce dernier, ému par<br />

l’affliction de mon père, lui déclara qu’il<br />

ne faisait que son travail de représentant de la loi en le convoquant<br />

mais qu’il n’avait rien à craindre de sa part. Il lui remit<br />

son argent et lui offrit un autre billet de 5000 anciens francs…»<br />

Arezki Tadjadit a rappelé la présence aux funérailles de son<br />

frère aîné, de Krim Belkacem, responsable alors pour toute la<br />

Kabylie du P.P.A-M.T.L.D.<br />

n L. N.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!