Vers des villes durables Amérique du Nord, Europe du ... - Urbamet

I- Les fondements des conceptions du développement durable, de
la ville et de la ville durable en Suède et à Stockholm
Le caractère vague de la notion de développement durable a conduit à son appropriation et
ainsi à l’émergence d’une conception spécifique nourrie d’éléments clés de la culture et de
l’identité suédoises.
En effet, la Suède est un pays avec une culture fortement enracinée d’autant plus que le pays
est localisé en périphérie de l’Europe, relativement isolé par un climat et par un paysage
difficiles pendant une bonne partie de l’année. Le XXème siècle a été celui durant lequel la
Suède s’est construite en marge du monde européen (entrée tardive dans la révolution
industrielle, dans la seconde guerre mondiale, dans la société de consommation) et en joignant
l’Union Européenne seulement 40 ans après sa création.
Pour appréhender les spécificités de la conception suédoise du développement durable, nous
nous appuierons sur l’existence de concepts spécifiquement suédois qui révèlent en tant que
tels des aspects majeurs de l’identité suédoise.
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I.1. Une conception du monde fondée sur un rapport particulier à la
nature
Les suédois entretiennent un rapport particulier avec la nature particulièrement éclairant si
l’on veut comprendre la conception suédoise du développement durable. Ce rapport nous
semble pouvoir être illustré à l’aide du concept du friluftsliv 46 . Véritable philosophie de vie, le
friluftsliv est au cœur de la culture scandinave, mais plus particulièrement au cœur des
cultures norvégienne et suédoise. Le terme est utilisé la première fois au XIXème siècle par le
poète et dramaturge norvégien Henrik Ibsen et repris en Suède dans les années 1930 au
moment de l’élaboration de ce qui deviendra le modèle suédois autour de la notion de
folhemmet (le pays comme maison du peuple) nécessairement proche de la nature.
Le friluftsliv constitue un pilier de la culture suédoise voire de son identité. Il revêt une
dimension philosophique fondée sur « l’expérience du sentiment de liberté que procure la
nature et la connexion spirituelle avec le paysage » (Gelter, 2000). La spécificité de la
philosophie du friluftsliv est qu’elle envisage l’homme comme un élément du paysage dans le
sens où l’homme appartient à un monde qui dépasse la dimension humaine.
Les racines culturelles du friluftsliv proviennent d’abord selon Gelter de l’image que les
scandinaves ont d’eux-mêmes comme des amoureux de la nature. Cette image serait liée au
fait, que dans ces pays, en raison des faibles densités de population, les paysages
caractéristiques ne sont pas des paysages humanisés. Ainsi l’espace de référence est un espace
naturel, ce qui explique comme nous le verrons par la suite, les modes de conception des
villes à l’œuvre en Suède.
Le friluftsliv est d’autant plus fort que la majorité de la population urbaine conserve de fortes
attaches rurales en raison de l’urbanisation tardive du pays et que les villes ne sont jamais loin
de zones naturelles. Dans le cas de Stockholm, le caractère exceptionnel du site de
Stockholm : les 20 000 îles de l’archipel, l’omniprésence de l’eau dans la ville, contribuent
46 Qui signifie littéralement « vie en plein air »