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<strong>Que</strong> <strong>faire</strong> ?<br />
— Un marronnier, je crois, répondit le journaliste stupéfait d’une question aussi<br />
saugrenue.<br />
— Oh ! parbleu !... alors !... si c’est un marronnier... mais, pardon !... Écoutez : si vos<br />
af<strong>faire</strong>s vont trop mal, je me souviendrai de votre offre généreuse de tout à l’heure !...<br />
Pas de circonstances atténuantes ; à mort !... à mort !... Après, on verra… Pourquoi<br />
couper… toujours couper des têtes… On verra… que diable… Guérissez, n’arrachez<br />
pas… Bonsoir. Goliath ! Goliath !... Et il s’éloigna.<br />
— Pauvre fou ! pensa le journaliste, Goliath ! que veut-il dire ? Est-ce moi qu’il appelle<br />
ainsi, parce que je suis plus grand que lui ?... Ce n’est pas difficile !... Il retomba dans<br />
ses pensées…<br />
Le vieux disparu dans la nuit ; de temps à autre, comme un écho de sa voix aigrelette, le<br />
même appel traversait l’espace : « Goliath ! Goliath ! »<br />
Le journaliste leva la tête. Il lui sembla tout à coup voir se détacher des marronniers et<br />
traverser l’air une ombre immense, fantastique, de forme indescriptible, quelque chose<br />
comme un hippogriffe, un monstre fabuleux qui, sans aucun bruit, s’évanouit aussitôt<br />
qu’entrevu.<br />
« Qu’est-ce ?... Un homme, un oiseau, un cheval ? »<br />
Et, dans l’impossibilité de donner un nom à cette forme, il se prit à frémir…<br />
« Ciel ! Deviendrai-je fou à mon tour ? Voici déjà des hallucinations ! Mais, non ! J’ai<br />
l’esprit troublé… et c’est la faim !... Rentrons, ma mère doit dormir à présent… Je n’ai<br />
plus de questions indiscrètes à craindre ce soir. Il sera toujours temps de lui révéler la<br />
vérité !... »<br />
Désespéré et lamentable, il s’achemina vers son logis.<br />
(À suivre.)<br />
24 février <strong>19</strong>00<br />
L’HÔTEL DE MONTFORT-CHALOSSE<br />
L’hôtel de Montfort-Chalosse est une des plus opulentes constructions de la rue de<br />
l’Université. Une haute porte surmontée d’un écusson simple, comme sont les blasons<br />
des très vieilles familles, donne accès sur une cour pavée, d’un aspect austère et<br />
seigneurial. Le perron de l’hôtel est vaste et monumental plutôt qu’élégant. La demeure<br />
construite par un aïeul est empreinte d’une sévérité hautaine dans le goût des belles<br />
années du siècle de Louis XIV, et malgré quelques retouches, a conservé son grand<br />
style.<br />
II