22.06.2013 Views

Que faire ? - Médias 19

Que faire ? - Médias 19

Que faire ? - Médias 19

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

<strong>Que</strong> <strong>faire</strong> ?<br />

l’immeuble et cuisinière –, puis fut reprise par l'avocat de la défense. Cette rumeur<br />

voulait qu'un homme maigre, un gringalet à barbe brune, ait fréquenté Mme de Montille<br />

peu avant le crime, et ait été aperçu après l'événement en compagnie de Pranzini.<br />

L'avocat s’empara de cette histoire et soutint que Pranzini n'était que complice, receleur,<br />

et que le petit homme brun – demeuré introuvable – était le véritable assassin. <strong>Que</strong><br />

<strong>faire</strong> ? table sur cette tache aveugle de l’instruction : c’est ce petit homme brun que<br />

René Danglars piste au début du roman. La fiction innove et remodèle la mémoire<br />

médiatique et judiciaire en prenant pour point de départ une rumeur, une piste<br />

abandonnée, en suggérant que tout ne s’est peut-être pas passé ainsi, en fin de compte,<br />

et en ouvrant une brèche sur une autre version possible d’une af<strong>faire</strong> classée. Mais <strong>Que</strong><br />

<strong>faire</strong> ? va encore plus loin.<br />

9. Stanislas Prado y Ribo, dit comte Linska de Castillon, dit Haro de Mendozza, dit enfin<br />

« l'assassin X… » puisqu'on ne connut jamais sa véritable identité, fut reconnu coupable<br />

et condamné à mort, le 14 novembre 1888, du meurtre de Camille-Marie Aguétant,<br />

survenu plus de deux ans auparavant, en janvier 1886, chez la victime, rue Caumartin.<br />

Prado avait raccompagné chez elle la femme galante avant de l'égorger et de voler ses<br />

titres et ses bijoux. Dans un premier temps, l'instruction se conclut par un non-lieu et<br />

aucun coupable ne fut arrêté. C'est une seconde af<strong>faire</strong>, le vol d'une bijouterie, qui, en<br />

décembre 1887, permit l'arrestation de Prado. Les témoignages de deux femmes<br />

impliquées dans ce vol, Eugénie Forestier et Mauricette Couronneau, permirent de relier<br />

Prado à l'assassinat de Marie Aguétant. L'enquête fut rouverte en avril 1888. Prado, qui<br />

était un élégant et volubile criminel, se défendit habilement lors de son procès. Il n'en fut<br />

pas moins exécuté le 28 décembre 1888. L'af<strong>faire</strong> Pranzini, qui survint entre les deux<br />

épisodes de l'af<strong>faire</strong> Prado, rappela curieusement aux magistrats et aux enquêteurs les<br />

détails de l'assassinat de Marie Aguétant – même mobile, le vol, mêmes types de<br />

blessure et de victime –, mais il s'avéra que ce Pranzini avait un solide alibi : il se<br />

trouvait en Égypte en janvier 1886. Néanmoins, les deux af<strong>faire</strong>s furent rapprochées à<br />

nouveau par la presse, pendant l’instruction de Prado, en 1888 : on ne manqua pas de<br />

rappeler que tout comme Pranzini, Prado avait été trahi par l’une de ses maîtresses,<br />

Eugénie Forestier.<br />

10. Le parallélisme entre ces deux af<strong>faire</strong>s a sans doute été le déclencheur de l’opération<br />

d’alchimie à laquelle se sont livrés les auteurs de <strong>Que</strong> <strong>faire</strong> ?. Secouant les pièces du<br />

puzzle et entremêlant les pistes, ils suggèrent que le véritable coupable du triple<br />

assassinat de la rue Montaigne serait le marquis d’Alamanjo, c’est-à-dire le célèbre

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!