L'approche genre

en témoignent en évoquant leur sentiment de découragement, d’épuisement
et même de perte de virilité. Un fermier de Kiwanja a ainsi
déclaré: « avant la guerre, j’étais un homme ».
Confrontés à la réalité que les femmes prennent de plus en plus le
rôle de soutien de famille, les hommes expriment des sentiments d’humiliation
et de perte de valeur personnelle. Par leurs discours et leurs
comportements, ils maintiennent cependant que « l’homme doit être le
patron », s’accrochant à la domination masculine même là où les rôles
sont de fait inversés. Comme l’illustre la déclaration d’un jeune mototaxi
à Sake :
« Les hommes et les femmes ne peuvent pas être égaux. Par exemple,
lorsqu’une femme a fait des études et travaille et que les deux époux
apportent un salaire à la maison, c’est difficile pour la femme de respecter
l’homme. La tradition qui place les femmes au-dessous de
nous, nous aide (…) à rester forts. Les hommes seraient damnés si
les femmes étaient égales aux hommes. Les femmes pourraient quitter
les hommes et elles ne nous serviraient pas ». 8
D’après cet homme, l’égalité des sexes menace d’annihiler la virilité. Le
maintien de la hiérarchie des sexes – et ainsi des privilèges des hommes –
est à la base des réticences des hommes à s’engager dans les tâches ménagères,
à s’occuper des enfants ou à travailler dans les champs.
2.2 Comment devenir un homme –
Education aux questions de genre et environnement social.
Dans la recherche contemporaine sur le genre, celui-ci n’est en effet pas
perçu comme qualité innée, mais comme étant construit dans le processus
de conditionnement. Ce processus est communément appelé
« fabrication du genre » et décrit l’interaction entre les individualités
dans lesquelles le genre est représenté, vécu et perçu. Le genre n’est ainsi
8 Agriculteur EA, Sake, 22.02.2010.
« Avant la guerre, j’étais un homme » : Hommes et masculinités à l’est de la RD Congo 37