Vendredi o Janvier 1900. - Bibliothèque de Toulouse
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générale est oue les juges, pronostiquant la '<br />
débâcle républicaine, ont voulu désarmer d'a-<br />
vance leurs futurs vainqueurs. C'est la peur<br />
oui a dicté chaoua sentence. Se sachant<br />
impuissants, nos sénateurs n'ont pas voulu<br />
8e montrer impitoyables.<br />
Un <strong>de</strong>s juges", M. Aucoin, a laissé échan-<br />
ger un mot qui en dit long sur l'état d'esprit<br />
<strong>de</strong> nos gouvernants. Au moment où les sé-<br />
cateurs examinaient ie cas <strong>de</strong> Déroulèdfe, la<br />
ouestion <strong>de</strong> la publicité du vote a été sou-<br />
levée 1 » Je ne comprends ras, a dit M. Au-<br />
coin, que mes collègues commettent l'im-<br />
pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> communiquer les noms <strong>de</strong>s vo-<br />
tants à la presse.<br />
» Ce faisant, ils nous exposent aux plus<br />
cruelles représailles. Si l'on apprend, par<br />
exemple, que j'ai voté contre Déroulè<strong>de</strong>, et<br />
contre Guérin, je cours le risque d'être<br />
insulté dans la rue par les passants et hué<br />
<strong>de</strong>s sergents <strong>de</strong> ville. »<br />
En entendant ce langage, les sénateurs ont<br />
regardé avec une surprise non dissimulée<br />
"le malheureux Aucoin. Ce juge, qui dévoile<br />
<strong>de</strong> la sorte l'état mental <strong>de</strong>s masses popu-<br />
laires, n'était pas <strong>de</strong>s plus mal inspirés.<br />
En somme," il résulte <strong>de</strong>s propos qui<br />
s'échangent dans les couloirs que les parti-<br />
sans <strong>de</strong>s rigueurs ont obéi à <strong>de</strong>s mobiles <strong>de</strong><br />
haine, tandis que les indulgents ont consi-<br />
déré l'état <strong>de</strong> " l'opinion et n'ont pas cru<br />
<strong>de</strong>voir braver le pays. Voilà toute l'explica-<br />
tion <strong>de</strong>s différents arrêts rendus aujourd'hui<br />
par la Haute-Cour.<br />
II est certain que rarement un gouverne-<br />
ment a été plus discrédité que "celui qui<br />
urési<strong>de</strong> actuellement à nos <strong>de</strong>stinées.<br />
Vous savez que le grand-duc Wladimir,<br />
l'oncle du tsar, se trouve actuellement à<br />
Paris. L'année <strong>de</strong>rnière, à la même époque,<br />
ce prince dinait à l'Eiysée et était l'hôte' du<br />
«rési<strong>de</strong>nt Faure. Pourquoi, cette fois-ci, le<br />
grand-duc Wladimir n'a-t-il pas accordé la<br />
même faveur à M. Loubet'.' Cette abstention<br />
provoque beaucoup <strong>de</strong> commentaires. On<br />
raconté que le prince, invité à diner à<br />
l'Elysée par le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République,<br />
s'est carrément dérobé à cette corvée.<br />
M. Louhet a été d'autant plus mortifié nar<br />
ce refus que le grand duc Vladimir a obéi<br />
aux ordre's du tsar. Nicolas II est, en effet,<br />
profondément irrité <strong>de</strong> l'attitu<strong>de</strong> stuoi<strong>de</strong><br />
qu'observent nos gouvernants à l'égard <strong>de</strong><br />
l'Angleterre. L'empereur aurait voulu oue ia<br />
France profitât <strong>de</strong> la guerre du Transvaal<br />
pour infliger une leçon méritée aux usurpa-<br />
teurs <strong>de</strong> l'Egypte. M. Delcassé a refusé, vous<br />
ie savez, il y a trois mois, <strong>de</strong> recevoir à ce<br />
sujet les ouvertures du comte Mouraview ;<br />
ie tsar n'a pas pardonné à M. Deicassé cette<br />
défection honteuse-<br />
11 paraît qu'à la cour <strong>de</strong> Saint-Pétersbourg,<br />
on n'appeilè pius notre ministre <strong>de</strong>s affaires<br />
que « là colonel <strong>de</strong> la cavalerie <strong>de</strong> Saint-<br />
Georges. )-. M. Delcassé est coionei <strong>de</strong> ce<br />
célèbre régiment comme le grand duc Vla-<br />
dimir est le colonel <strong>de</strong>s Cosaques du Don.<br />
!• Pour revenir au prince, permettez-moi<br />
d'ajouter qu'après avoir refusé <strong>de</strong> diner chez<br />
M. Loubet, ie grand duc n'a pas hésité à dé-<br />
férer aux invitations <strong>de</strong> M. Deschanel, du<br />
comte Boni <strong>de</strong> Casteilane et <strong>de</strong> plusieurs<br />
autres personnalités <strong>de</strong> l'aristocratie du<br />
faubourg Saint-Antoine et du boulevard<br />
Saint-Germain. Je n'ai pas besoin da vous<br />
dire à quelles réflexions" on se livre dans le<br />
mon<strong>de</strong> officiel. Mais les Lanessan, les Del-<br />
cassé et les Loubet se moquent joliment <strong>de</strong><br />
nos commentaires.<br />
Jamais les couloirs du Sénat n'ont été<br />
plus animés qu'aujourd'hui. Tous ies parents<br />
<strong>de</strong>s acquittés sont là ; tous veulent assister<br />
à la lecture <strong>de</strong> l'arrêt qui va «lettre fin aux<br />
odieuses trames du commissaire Bérenger<br />
et du procureur Bernard.,<br />
MENAI, QUE.<br />
M FIL SPECIAL<br />
hors cadres nour être affecté au service<br />
d'état-major, "en remplacement du chef <strong>de</strong><br />
bataillon breveté Moinier, promu et réinté-<br />
gré dans les cadres <strong>de</strong> l'arme d'infanterie,<br />
et a été nommé à un emploi <strong>de</strong> son gra<strong>de</strong>, à<br />
l'état-major du 18e corps' d'armée.<br />
Le général Jamont. généralissime, vice-<br />
prési<strong>de</strong>nt du conseil supérieur <strong>de</strong> la guerre,<br />
se rendra, vers le 15 courant, à Brest pour<br />
y inspecter ies travaux <strong>de</strong> défense <strong>de</strong>s côtes<br />
et. notamment, ceux <strong>de</strong> l'ile d'Ouessant.<br />
Pendant le séjour du général Jamont à<br />
Brest, les conlre-tornilleûrs Fleurus et La<br />
Etre <strong>de</strong> l'escadre du Nord seront mis à sa<br />
dis position.<br />
M. da la Cornillère, colonel au GTe d'in-<br />
fanterie, a été mis en activité hors cadre<br />
pour être affecté au service <strong>de</strong> l'état-major,<br />
èn remplacement da M. le colonel Pelécier.<br />
M. Cou<strong>de</strong>r <strong>de</strong> Foulogneu, chef <strong>de</strong> bataillon<br />
à l'état-major particulier du génie, a été<br />
mis en activité hors cadres, pour être nommé<br />
à un emploi <strong>de</strong> son gra<strong>de</strong> au service géo-<br />
graphique.<br />
GUILLAUME îl m FRANCE<br />
Berlin, 4 janvier.<br />
Le Yols Zeilung prétend que l'empereur<br />
Guillaume se rendra en France au mois <strong>de</strong><br />
mai ou juin avec une escadre composée da<br />
<strong>de</strong>ux navires, cuirassés <strong>de</strong> premier' rang, et<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux petits croiseurs.<br />
Paris, 4 janvier.<br />
Il fait un temps horrible. La pluie tombe,<br />
fine et serrée. Qu'importe? Les voitures ar-<br />
rivent, nombreuses, par la rue <strong>de</strong> Tournon.<br />
Des piétons, hommes et femmes, abrités<br />
sous leur parapluie, se hâtent vers ia porte<br />
du Luxembourg,<strong>de</strong>vantlaquelle <strong>de</strong> nombreux<br />
curieux stationnent.<br />
Malgré la pluie, la consigne est pius que<br />
jamais rigoureuse. On refuse impitoyable-<br />
ment l'entrée à toute personne non munie<br />
<strong>de</strong> cartés.<br />
Les agents et les gar<strong>de</strong>s républicains sont<br />
en force. Nous remarquons "au passage les<br />
parents <strong>de</strong>s accusés: Mme Buffet mère, Mme<br />
André Buffet, M. et Mme Pierre Buffet, Mme<br />
<strong>de</strong> Sabran-Pontevès, Mme <strong>de</strong> Ramei, Mlie<br />
Jeanne Dérouiè<strong>de</strong>, M. et Mme André Dérou-<br />
lè<strong>de</strong>, Mme Barillier, Mme et Mile Dubuc, M.<br />
Louis Guérin.<br />
Les agents refusent, avec une férocité<br />
Sans égale, aux parents da MM. Buffet et<br />
Déroulè<strong>de</strong>, et au frère <strong>de</strong> Guérin d'aller voir<br />
les condamnés, avant i'audience.<br />
Ils accomplissent la consigne, que <strong>de</strong>s mi-<br />
sérables leur ont donnée. Les agents, d'ail-<br />
leurs, exécutant toujours leur consigne, éloi-<br />
gnent tous les curieux et font le vi<strong>de</strong> autour<br />
du palais.<br />
L'audience publique<br />
èst ouverte à midi 20.<br />
Jamais, même pendant les audiences ies<br />
plus mouvementées, on ne vit pareille af-<br />
iluence dans les tribunes publiques.<br />
Les accusés sont introduits. Un silence<br />
général se fait. On les observe avec atten-<br />
tion. MM. Go<strong>de</strong>froy, <strong>de</strong> Sabran, <strong>de</strong> Ramei et<br />
da Vaux sont placés au premier rang. Les<br />
avocats les félicitent au passage. Puis vient<br />
Déroulè<strong>de</strong>, appuyé sur i'épauië <strong>de</strong> Barillier,<br />
marchant lentement. On les laissa s'asseoir<br />
côte à côte sans les séparer, comme à l'or-<br />
dinaire, par un gar<strong>de</strong>..<br />
Enfin, "suivent MM. Buffet. Guérin et Du-<br />
buc. Ce <strong>de</strong>rnier a une rieur bleue à la bou-<br />
tonnière. Tous les regards sont touraés vers<br />
les accusés.<br />
On procè<strong>de</strong> à l'anpel nominal <strong>de</strong>s juges.<br />
Sont absants: MM. Fâye, Frogier.<strong>de</strong> Poulevoy<br />
et Géry-Legrand.<br />
Au moment dc l'appel du nom <strong>de</strong> M. <strong>de</strong><br />
Casabianca. Déroulè<strong>de</strong> fait, à l'adressa du<br />
sénateur <strong>de</strong> la Corse, un signe <strong>de</strong> remercie-<br />
ment pour son intervention toujours favora-<br />
ble au"cours <strong>de</strong> ces longs débats.<br />
Le procureur général, plus pâle que jamais,<br />
affecte <strong>de</strong> causer avec ses substituts.<br />
UOÏiirl xrectes<br />
Paris, 4 janvier.<br />
M. Boy, contrôleur hors classa dans le<br />
Tarn-et-Garonne, est nommé contrôleur prin-<br />
cipal dans le Tarn.<br />
M. Pons nasse <strong>de</strong>s Basses-Pyrénées, dans<br />
le Tarn-et-Garonne.<br />
M. Ducos passe <strong>de</strong> l'Ardèehe dans lesBas.-<br />
ses-Pyrénées.<br />
M. Guesnin passe <strong>de</strong>s Deux-Sèvres dans la<br />
Vienne.<br />
M. Lavigne nasse <strong>de</strong> la Loire-Inférieure<br />
dans les Deux-Sèvres.<br />
10<br />
, Paris, 4 janvier,<br />
<strong>de</strong> France du 28<br />
Bilan <strong>de</strong> la Banque <strong>de</strong> France du 28 dé-<br />
cembre au 4 janvier :<br />
, En caisse, or. 1.S65.305,448 ; dira., 1,347,471<br />
' argent. 14.706.6S3 ; riim.. 1.008,241.<br />
Portefeuille. 1.267,625.546 ; aug. 67,S33.S~7.<br />
Avances sur titres 503,137,787,855; augment.,<br />
£0.262,953.<br />
Comotes courants Particuliers, 570,441,017<br />
dira., " 32,356.019.<br />
ComDte courant trésor, 276,315,249; diminu-<br />
tion, 6.081.993.<br />
Billets en circulation, 416,299,537; augmenta-<br />
tion, 179,502,510.<br />
Bénéfices bruts escomptes et intérêts divers<br />
pouria semaine, 1,850,974.<br />
avec violences el voies <strong>de</strong> Tait, les âge rus<br />
<strong>de</strong> la force publique, agissant pour l'exécu-<br />
tion <strong>de</strong>s lois;<br />
Attendu enfin que les circonstances atté-<br />
nuantes ont été déclarées en faveur <strong>de</strong> Buf-<br />
fet, Déroulè<strong>de</strong>, <strong>de</strong> Lur-Saluces, contumax,<br />
et Guérin,<br />
Déclare lesdits Buffet, Déroulè<strong>de</strong>, Lur-<br />
Saluces, contumax, ct Guérin coupables<br />
du crime <strong>de</strong> complot, prévu et puni par<br />
l'article 80, paragraphe 1 el 2 du Co<strong>de</strong><br />
pénal ;<br />
Déclare Guérin mal fondé dans ses con-<br />
clusions tendant à la disjonction <strong>de</strong>s crimes<br />
et délits retenus comme connexes par l'ar-<br />
rêt <strong>de</strong> renvoi, l'en déboute cl statuant en<br />
conséquence sur les faits dont il s'agit, le<br />
déclare, au contraire, coupable.<br />
I - Du délit <strong>de</strong> détention sans autorisation<br />
d'armes et munitions <strong>de</strong> guerre, ou d'un<br />
dépôt d'armes, prévu et puni par les arti-<br />
cles 3 et 4 do la loi du 24 mai 1834 ;<br />
2* Du délit d'outrages envers les agents,<br />
prévu ct puni par l'article 224 du Co<strong>de</strong> pé-<br />
nal ;<br />
3' Du délit d'altaque avec violences et<br />
voies <strong>de</strong> fait envers les agents <strong>de</strong> la force<br />
publique, prévu>et puni par l'article 212 du<br />
Co<strong>de</strong> pénal ;<br />
Déclare enfin qu'il existe <strong>de</strong>s circonstan-<br />
ces atténuantes en faveur <strong>de</strong> Buffet, Dérou-<br />
iè<strong>de</strong>, Lur-Saluces, contumax, et Guérin.<br />
Tous les avocats ont écouté l'arrêt <strong>de</strong>bout.<br />
Au bano <strong>de</strong>s accusés, un seul s'est levé,<br />
M. Buffet. Les autres sont restés assis.<br />
Au milieu <strong>de</strong> l'émotion générale, M. le<br />
-prési<strong>de</strong>nt ordonne :<br />
Huissiers, mettez immédiatement en liberté<br />
MM. Go<strong>de</strong>froy, <strong>de</strong> Sabran, <strong>de</strong> Vaux, <strong>de</strong> Uamel,<br />
Dubuc et Bariiiier. (Vive sensation.)<br />
Une scène émouvante<br />
Les acquittés se lèvent, très dignes, tour-<br />
nant leurs regards autour d'eux, vers ies<br />
amis qu'ils quittent et qui ont été leurs<br />
compagnons pendant <strong>de</strong> si longs jours.<br />
Bariiiier sé jette, vibrant d'émotion, dans<br />
les bras <strong>de</strong> Déroulè<strong>de</strong>. Le chef et le soldat<br />
s'embrassent par <strong>de</strong>ux fois. L'émotion étreint<br />
toutes les poitrines. Des larmes perlent au<br />
bord <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s yeux.<br />
Tout à coup, sur un mouvement <strong>de</strong> Dérou-<br />
lè<strong>de</strong>, Barillier se redresse et, avec une éner-<br />
gie, un accent plus puissant que jamais,<br />
s'écrie : « Vive là nation ! Vive la République<br />
du peuple ! Vive Dérouiè<strong>de</strong> toujours ! »<br />
Dubuc, à son tour, se tourne vers Guérin,<br />
lui serre la main et s'écria : « Nous sommes<br />
réconciliés maintenant. A bas les exploiteurs<br />
du peuple S »<br />
Tous les royalistes serrent la main à MM.<br />
Buffet et Déroulè<strong>de</strong> et envoient un salut<br />
amical à Guérin.<br />
MM. Go<strong>de</strong>froy et ds Vaux crient: « Vive la<br />
France ! »<br />
Tous sortent, suivis par tous les regards.<br />
M. <strong>de</strong> Vaux est, comme d'habitu<strong>de</strong>, emporté<br />
sur une chaise à porteur.<br />
Le banc <strong>de</strong>s accusés a maintenant quelque<br />
chose <strong>de</strong> sinistre. Au milieu <strong>de</strong>s "places<br />
vi<strong>de</strong>s, disséminés sur les divers bancs,' ayant<br />
<strong>de</strong>ux gar<strong>de</strong>s à leurs côtés, sa trouvent les<br />
trois hommes, les trois bons Français qui,<br />
au cours <strong>de</strong> ces débats, par leur caractère,<br />
leur énergie indomptable, leur voionté <strong>de</strong><br />
fer, se sont montrés en quelque sorte ies<br />
géants, à côté <strong>de</strong>s pygmées qui les jugeaient.<br />
Les trois accusés"s'ont là, caimes et dédai-<br />
gneux.<br />
Réquisitions du procureur général<br />
M. le prési<strong>de</strong>nt. — La paroie est au procureur<br />
générai pour ses réquisitions.<br />
M. ie procureur générai. — Vu l'arrêt <strong>de</strong> ia<br />
Cour nous requérons qu'il lui piaise d'appliquer<br />
aux accusés déclarés" coupables les articles du<br />
Co<strong>de</strong> pénal et <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong>' 1831, don; ils ont en-<br />
couru i'application.<br />
noms <strong>de</strong>s douzes<br />
; jury. L'effet est<br />
Je dois un salut au jury <strong>de</strong> laSeinii qt<br />
m'a acquitté.<br />
Et l'accusé énumèro les<br />
jurés qui composaient c;<br />
saisissant.<br />
Votre verdict sc:a pour notre histoire<br />
parlementaire uno honte ineffaçable. (Hu-<br />
meurs). Lanation, la partie saine du parti<br />
républicain sont lasses <strong>de</strong> voire régime.<br />
Oui! le peuple est las <strong>de</strong> toutes ces hontes.<br />
(Nouvelles et violentes rumeurs).<br />
EnsCvclissez-moi dans quelque détention<br />
lointaine, chassez-moi <strong>de</strong> la pairie, le châ-<br />
timent Je plus dur pour le vieux soldat que<br />
;je suis. Je reviendrai quand reviendra la<br />
justice, quand le pays sera enfin libéré.<br />
Je finirai par une double acclamation.<br />
Encore et. toujours je crierai : Vive l'armée<br />
<strong>de</strong> la France 1 Vive la République du peu-<br />
ple !<br />
L'émotion <strong>de</strong> l'auditoire est <strong>de</strong> plus on<br />
nlus vive. La scène est d'une gran<strong>de</strong>ur uni-<br />
oue.<br />
' A ! on tour Guérin se lève.<br />
Déclaration da Guérin<br />
Courage<br />
Il énumère: rticlss.<br />
ouel-<br />
La Grève <strong>de</strong> Saiiit-Stlenna<br />
Saint-Etienn», 4 <strong>Janvier</strong>.<br />
MM. Grnner. arbitre, choisi car les Compa-<br />
gnies, er^ Jaurès, arbitre <strong>de</strong>s mineurs, ont en<br />
do 9 h. 35 à 10 heures, une conférence dans le<br />
•cabinet du préfet.<br />
Après un échange d'observations, les <strong>de</strong>ux<br />
arbitres ont décidé que la note <strong>de</strong>s Comnaeniês<br />
pouvait être modifiée. Un compromis sera ré-<br />
digé domain, oui tiendra comote <strong>de</strong>s modifica-<br />
tions indiquées.<br />
L'impression générale, hier soir, après la réu-<br />
nion à la préfecture entra arbitres," est oue la<br />
question est en voie d'arrangement. Il ne s'agit<br />
plus maintenant oue da discuter lés détails ,<br />
après que la Compagnie <strong>de</strong> la Loire, oui avait<br />
fait <strong>de</strong>s réserves, aura fait connaître son adhé-<br />
sion à la lettre <strong>de</strong>s Comnagnies.<br />
NOUVELLES MILITAIRES<br />
Paris, 4 janvier.<br />
Le général <strong>de</strong> Galliflet, ministre <strong>de</strong> la<br />
guerre, vient d'adresser aux commandants<br />
<strong>de</strong> corps d'armée, la circulaire suivante s<br />
Paris, 1" janvier <strong>1900.</strong><br />
Mon cher général,<br />
La communication qui vient <strong>de</strong> m'être faite d'un<br />
ordre du jour récent, m'a permis <strong>de</strong> constater<br />
<strong>de</strong>s tolérances fâcheuses auxquelles j'ai décidé<br />
<strong>de</strong> remédier. J'interdis en conséquence, <strong>de</strong> la<br />
façon ia plus absolue, i'introduction par un<br />
moyen quelconque dans ies cercles d'officiers et<br />
<strong>de</strong> sous -officiers et dans tous las bâtiments mili-<br />
taires <strong>de</strong>s journaux, revues, brochures et autres<br />
écrits qui attaquent <strong>de</strong> Darti rais les institutions<br />
nationales, le prési<strong>de</strong>nt da la Réoublique et le<br />
gouvernement.<br />
Parmi ces publications, les unes excitent les<br />
soldats à l'indiscipline et au méDris da leurs<br />
chefs; las autres excitent ces chefs à la révolte<br />
et au mépris <strong>de</strong>s pouvoirs établis. Le3 unes et<br />
ies autres seront comprises dans la même me-<br />
sure d'exclusion.<br />
M. Fleury, chef d'escadrons <strong>de</strong> cavalerie<br />
hors cadre à l'état-major du 12e corns d'ar-<br />
mée, a été nommé à l'emploi <strong>de</strong> chef d'état<br />
major da la 5e division da cavalerie, en<br />
remplacement du lieutenant-colonel <strong>de</strong> ca-<br />
valerie d'Estainville, réintégré dans les ca-<br />
dres <strong>de</strong> son arme.<br />
M. Vidal, chef <strong>de</strong> bataillon breveté tu He<br />
régiment d'infanterie, a. été sais ea activité<br />
Le contre-appel terminé, la prési<strong>de</strong>nt<br />
donne lecture,' âu milieu d'un silence solen-<br />
nel, <strong>de</strong> l'arrêt rendu par ia Haute-Cour pro-<br />
nonçant l'acquittement <strong>de</strong> MM. Go<strong>de</strong>froy, da<br />
Sabran, <strong>de</strong> Ramei, <strong>de</strong> Vaux, Bariiiier et<br />
Dubuc, et déclarant coupables MM. Buffet,<br />
Dérouiè<strong>de</strong>, Guérin, et <strong>de</strong>" Lur-Saluces, con-<br />
tumax:<br />
La Haute-Cour,<br />
Statuant par un seul et même arrêt, tant<br />
sur les réquisitions <strong>de</strong> M. le procureur gé-<br />
néral que sur les, conclusions précé<strong>de</strong>m-<br />
ment prises par l'accusé Guérin, et tendant<br />
à la disjonction <strong>de</strong>s crimes et délits retenus<br />
comme connexes, par l'arrêt <strong>de</strong> renvoi du<br />
30 octobre 1899 ;<br />
Après avoir entendu M. le procureur<br />
général en ses réquisitions ; les défenseurs<br />
<strong>de</strong>s accusés présents et les accusés eux-<br />
mêmes, lesquels ont été entendus les <strong>de</strong>r-<br />
niers, en leurs plaidoiries et moyens da<br />
défense ;<br />
Après en avoir délibéré conformément à<br />
la loi ;<br />
1* En ce qui concerne les accusés Go<strong>de</strong>-<br />
froy, <strong>de</strong> Pontevès-Sabran, <strong>de</strong> Ramei, <strong>de</strong><br />
Vaux, Barillier et Dubuc;<br />
Attendu qu'il n'existe pas contre eux <strong>de</strong>s<br />
preuves suffisantes qu'ils se soient rendus<br />
coupables du crime <strong>de</strong> complot qui leur<br />
était reproché ;<br />
Déclare lesdits Go<strong>de</strong>froy, <strong>de</strong> Pontevès<br />
<strong>de</strong> Sabran, <strong>de</strong> Ramei, <strong>de</strong> Vaux, Barillier ct<br />
Dubuc, acquittés <strong>de</strong> l'accusation portée<br />
conlre eux, et ordonne qu'ils soient immé-<br />
diatement remis en liberté, s'ils ne sont re-<br />
tenus pour une autre cause ;<br />
~ • En ce qui concerne les accusés Buffet,<br />
Déroulè<strong>de</strong>, <strong>de</strong> Lur-Saluces, contumax, et<br />
Guérin,<br />
Attendu qu'il résulte <strong>de</strong> l'information et<br />
<strong>de</strong>s débats la preuve que lesdits accusés<br />
ont en 1898 et en 1899, sur le territoire <strong>de</strong><br />
la République, notamment à Paris, concerté<br />
et arrêté, avec une ou plusieurs personnes,<br />
un complot ayant pour but <strong>de</strong> détruire ou<br />
<strong>de</strong> changer le gouvernement;<br />
Qu'il en résulte également la preuve que<br />
le dit complot a été suivi- d'actes commis<br />
ou commencés pour en préparer l'exécu-<br />
tion ;<br />
3- En ce qui concerne l'accusé Guérin ;<br />
Attendu que les faits visés par lui clans<br />
les conclusions sus énoncées ont été re-<br />
connus comme connexes au crime <strong>de</strong> com-<br />
plot, par l'arrêt, <strong>de</strong> renvoi rendu par la<br />
commission d'instruction ;<br />
Attendu que les faits dont il s'agit se rat-<br />
tachent d'une manière certaine au crime <strong>de</strong><br />
complot sus énoncé ;<br />
Qu'ils avaient pour but d'assurer l'impu-<br />
nité <strong>de</strong> son auteur ;<br />
Que c'est avec raison que les faits ont<br />
été déclarés connexes ;<br />
Aitendu, en ce qui concerne la tentative<br />
d'hommici<strong>de</strong> volontaire sur les agents <strong>de</strong><br />
la force publique, qu'il n'existe pis contre<br />
Guérin <strong>de</strong> preuves suffisantes qu'il se soit<br />
rendu coupable <strong>de</strong> ce crime ;<br />
Mais attendu qu'il résulte <strong>de</strong> l'informa<br />
tion et <strong>de</strong>s débats la preuve qu'il a :<br />
1* A Paris, en 1899, détenu, sans y être<br />
légalement autorisé, <strong>de</strong>s arrrfes et muni-<br />
tions <strong>de</strong> guerre ou un dépôt d'armes ;<br />
2* A Paris, en août et septembre 1899,<br />
outragé par paroles, gestes ou menaces les<br />
agents <strong>de</strong> la force publique dans l'exercice<br />
ou à l'ocoasion <strong>de</strong> l'exercice <strong>de</strong> leurs fonc-<br />
lions ;<br />
El 3- Aux mêmes lieux et date3, attaqué<br />
M. le prési<strong>de</strong>nt. — Accusés, avez-vous<br />
que chose à dire sur l'application <strong>de</strong> ia peine»<br />
Plaidoirie da M" Normand<br />
M- Normand, défenseur <strong>de</strong> M. Buffet, se<br />
présente à la barre. (Mouvement d'atten-<br />
tion.)<br />
L'heure <strong>de</strong>s plaidoiries est passé?. Mais .la<br />
voix <strong>de</strong> ia défense doit encore s'éiever une <strong>de</strong>r-<br />
nière fois en faveur <strong>de</strong> ceiui qui n'est plus<br />
un meuipé, mais déjà un condamné. (Mouve-<br />
ment.)<br />
J'ai le droit <strong>de</strong> dire quel sentiment da tris-<br />
tesse étreint tous les amis <strong>de</strong> M. Buffet à l'heure<br />
où l'on va faire supporter à cet honnête homme<br />
la peina du complot qui n'existe pas. (Murmu-<br />
res.)<br />
Pourquoi condamnez-vous les hommes dont je<br />
vois les" complices disDarus ? (Nouveaux murmu-<br />
res.)<br />
M. le prési<strong>de</strong>nt. —• Maître. Normand, vous<br />
avez ia parole sur i'aDoiication <strong>de</strong> la peina !<br />
Dérouiè<strong>de</strong>. — Laissez-nous donc. Monsieur la<br />
prési<strong>de</strong>nt, emporter un bon souvenir <strong>de</strong> vous!<br />
M* Normand. — Qui donc a inspiré ces pour-<br />
suites, aujourd'hui condamnées?<br />
M. ie prési<strong>de</strong>nt. — Je vais vous retirer ia pa-<br />
role. (Bruit.)<br />
Déroulè<strong>de</strong>. — Qui ies a inspirées? C'est Lou-<br />
bet. parbleu ! (Violentes protestations sur les<br />
bancs du Sénat.)<br />
M* Normand. — Je m'arrête puisqu'il nous est<br />
interdit ce discuter un arrêt inique.<br />
Frappez cet honnête homme !<br />
Frappez-le donc pour qu'on puisse mesurer<br />
toute l'étendue ds la haine qui a inspiré ces<br />
poursuites ! (Violentes protestations. Cris : Ré-<br />
quisitions ! Réquisitions S)<br />
Le prési<strong>de</strong>nt". — M".Normand je vais aie voir<br />
obligé <strong>de</strong> faire requérir contre vous.<br />
Le procureur générai se iève.<br />
M° Normand. — Je parle <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong>:<br />
haine seulement, <strong>de</strong> ceux qui ont inspiré les<br />
poursuites. (Nouveau bruit).<br />
Dérouiè<strong>de</strong>. — Oui. c'est une honte ! (Exclama-<br />
tions indignées. Tumulte).<br />
Le prési<strong>de</strong>nt agite éperdûment sa sonnette<br />
et menace encore une fois le défenseur.<br />
M" Normand. — Je me tais, puisqu'on m'empê-<br />
che <strong>de</strong> parler, mais sachez que M. Buffet sera<br />
grandi par votre condamnation.<br />
Du fond <strong>de</strong> sa prison son visage olanera sur<br />
le siècle qui va s'ouvrir. (Sensation". Agitation<br />
prolongée).<br />
M.<br />
tion)<br />
Déclaration <strong>de</strong> M. Buffet<br />
Buffet se lève (Vif mouvement d'attîn<br />
Je ne viens pas implorer votre pitié. Je<br />
n'ai rien à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s adversaires.<br />
Vous m'avez condamné. Merci l<br />
En acquittant douze <strong>de</strong>s accusés, vous<br />
avez douze fois condamné le gouverne-<br />
ment. Merci ! (Sensation.)<br />
Quanta expliquer, ù motiver votre arrêt,<br />
vous n'y réussirez pas. Un bruit est par-<br />
venu jusqu'à moi : c'est que quelques-<br />
uns d'entre vous songeraient à m'appliquer<br />
la loi Bérenger. Je proteste <strong>de</strong> toute mon<br />
énergie, car il est une chose que je ne sau-<br />
rais accepter : c'est une mesure <strong>de</strong> faveur<br />
qui resterait suspendue sur moi comme une<br />
menace. (Sensation prolongée.)<br />
L'accent <strong>de</strong> fermeté, <strong>de</strong> résolution inébran-<br />
lable <strong>de</strong> M. Buffet fait la plus gran<strong>de</strong> impres-<br />
sion sur l'auditoire.<br />
Déclaration <strong>de</strong> Déroulè<strong>de</strong><br />
Déroulè<strong>de</strong> se dresse à son tour. Tous<br />
les regards convergent vers lui :<br />
Je ne parlerai pas <strong>de</strong> ma condamnation.<br />
J'aurais trop à vous dire. Vous m'avez<br />
déjà frappé <strong>de</strong> trois mois <strong>de</strong> prison pour<br />
outrages au prési<strong>de</strong>nt do la République,<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans pour outrages à la Haute-<br />
Cour. J'ignore si vous allez me bannir du.<br />
sol sacré <strong>de</strong> la Patrie ou me mettre en<br />
détention, mais peu importe. Vous savez<br />
bien que ma peine no sera pas éternelle,<br />
vous savez que je reviendrai.<br />
Je dois avant <strong>de</strong> vous dire adieu adres-<br />
ser un salut à la vaillante minorité qui a<br />
défendu la justice.,<br />
Je gar<strong>de</strong>rai <strong>de</strong> ces débats un souvenir<br />
ineffaçable. Ils m'ont permis <strong>de</strong> faire jus-<br />
tice enfin d'une calomnie infâme dont j'é-<br />
tais l'objet. J'ai pu donner ainsi à un géné-<br />
ral l'occasion <strong>de</strong> se laver d'une accusation<br />
non moins honteuse portée contre iui.<br />
N'atten<strong>de</strong>z <strong>de</strong> moi ni une parole <strong>de</strong> co-<br />
lère, ni une parole <strong>de</strong> regret, ni une <strong>de</strong>-<br />
man<strong>de</strong> d'indulgence. Je suis condamné ;<br />
mon cœur ne bal pas aujourd'hui plus vite<br />
qu'hier.<br />
Ou ïrai-je, peu importe, j'en reviendrai,<br />
je l'espère.<br />
Ce qui est certain, c'est, que vous avez<br />
rendu à notre cause un service signalé.<br />
Vous nous avez permis <strong>de</strong> sceller nos con-<br />
victions <strong>de</strong> la perle <strong>de</strong> notre liberté. Cette<br />
pensée m'ai<strong>de</strong>ra à oublier les souffrances<br />
que je vais avoir ù subir.<br />
Enfermé ou banni, ma <strong>de</strong>vise reste la<br />
même, ct je dis à mes amis : «<br />
toujours. Espérez quand môme ' ><br />
La lang'.ge, l'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Guérin, témoi-<br />
gnent ds la même énergie, <strong>de</strong> la même<br />
fierté que ceux <strong>de</strong> ses co-accusés.<br />
M. le prési<strong>de</strong>nt. —» Je vais suspendre l'au-<br />
dience publique. Gar<strong>de</strong>s, emmenez les -accusés.<br />
Caux-ci se lèvent et Déroulè<strong>de</strong> s'écrie :<br />
C'est ici que pour la première fois j'ai pu<br />
apprécier la valeur et le courage <strong>de</strong> mes<br />
co-accusés. Vous m'avez appris à connaître<br />
ces <strong>de</strong>ux hommes. Je suis heureux <strong>de</strong> ie<br />
dire en leur serrant publiquement la main.<br />
Et Déroulè<strong>de</strong> serre chaleureusement la<br />
main à M. Buffet, qui s'écrie :<br />
L'injustice commune fait notre union.<br />
Déroulè<strong>de</strong> serre ensuite la main à Guérin,<br />
qui la serre à M. Buffet. La scène est en ne<br />
peut pius poignante. Toute la salie est en<br />
proie à une émotion intense.<br />
Déroulè<strong>de</strong>. — Voilà tout le complot !<br />
Guérin. — C'est la première fois que<br />
nous sommes d'accord !<br />
Buffet. — Jo n'ai connu Guérin qu'en<br />
prison!<br />
Les trois accusés se retirent. Leurs dé-<br />
fenseurs les accompagnent en leur prodi-<br />
guant les plus chauds témoignages <strong>de</strong> sym-<br />
pathie. Da longs murmures d'admiration<br />
îes saluent <strong>de</strong>s tribunes.<br />
L'audience " publique est suspendue à 1<br />
heure 10, au milieu d'une effervescence in-<br />
dicible. La cour va délibérer sur l'applica-<br />
tion da ia peine à chacun <strong>de</strong>s condamnés.<br />
Départ <strong>de</strong>s acquittés<br />
Les six acquittés, MM. Go<strong>de</strong>froy, <strong>de</strong> Sa-<br />
bran, <strong>de</strong> Ramei, da Vaux, Bariiiier et Dubuc<br />
ont été réconduits, à leur sortie <strong>de</strong> ia salie,<br />
au ouartier cellulaire.<br />
Peu d'instants après, M. Albert Sorei,<br />
greffier en chef <strong>de</strong> la Haute-Cour, faisait te-<br />
nir à M. Mouquin, chargé <strong>de</strong> la surveillance<br />
du quartier cellulaire, ies ordres dc mise en<br />
liberté.<br />
Oa conduisait les prisonniers au greffe et<br />
on leur remettait les objets leur appartenant.<br />
La levée d'écrou signée, oa leur rendait la<br />
liberté.<br />
C'est M. Barillier qui est sorti ie premier,<br />
encore accompagné par <strong>de</strong>ux agents da la<br />
sûreté, oui i'o"nt"conduit, iui, à l'a prison <strong>de</strong><br />
la Santc* où il était détenu, pour lui faire<br />
accomplir la formalité da la levée d'écrou.<br />
En montant en voiture. M. Barillier a crié,<br />
aux nombreux journalistes qui s'empres-<br />
saient autour <strong>de</strong> iui « Vive la France!<br />
Malheureusement le meilleur <strong>de</strong>s Français<br />
est ià ! »<br />
Et en prononçant cette phrase, ie vaillant<br />
ami <strong>de</strong>" Dérouiè<strong>de</strong> montrait le Sénat d'un<br />
geste menaçant.<br />
Définitivement libre, sont sortis successi-<br />
vement M. <strong>de</strong> Sabran. accompagné do ia<br />
comtesse <strong>de</strong> Sabran; Dubuc, qu'était venu<br />
attendre Brunet, l'acquitté <strong>de</strong> ces jours <strong>de</strong>r-<br />
niers, M. do Ramei, qu'accompagnait Mma<br />
<strong>de</strong> Ramei; ie baron <strong>de</strong> Vaux, et enfin M. Go-<br />
<strong>de</strong>froy, entouré ds plusieurs amis. A tous<br />
on a donné <strong>de</strong> très "chau<strong>de</strong>s et très vives<br />
maroues <strong>de</strong> sympathie.<br />
M. et Mma <strong>de</strong> Sabran doivent partir sa-<br />
medi prochain pour la Touraine.<br />
Ajoutons un détail d'une gravité inouïe:<br />
A l'entrée, Mme ia baronne <strong>de</strong> Vaux mère,<br />
qui voulait passer et aller au plus tôt re-<br />
trouver son dis mala<strong>de</strong> et enfin libre, a <strong>de</strong>-<br />
mandé, supplié qu'on iui dit où il se trouvait.<br />
Les agents,"aussi odieux que leurs maîtres,<br />
ont répondu aux prières <strong>de</strong> cette mère par<br />
<strong>de</strong> grossières fins <strong>de</strong> non-recevoir !<br />
Tout est infâme dons est immon<strong>de</strong> procès.<br />
Au moment ou M. <strong>de</strong> Ramei, sorti la <strong>de</strong>r-<br />
nier du greffe, allait le quitter, l'audience<br />
publiqueVenait d'être terminée, et les trois<br />
condamnés réintégraient le quartier, Dérou-<br />
lè<strong>de</strong> en tête, soutenu par son défenseur, M*<br />
Faiateuf.<br />
En les apercevant, M. <strong>de</strong> Ramei s'est<br />
avancé vers'eux, et a embrassé MM. Buffet<br />
et Guérin.<br />
Acquitté et condamnés étaient très émus.<br />
î M. Buffet, à dix ans da bannissement. La<br />
voix eu plus uour les dix ans à ttéroulèdo.<br />
estcelKwle M. Chanlatrrel qui, ancien pré-<br />
cepteur dc M. André" Buffet, n'avait pas<br />
voulu, dans le scrutin qui concernait ce <strong>de</strong>r-<br />
nier, voter contre son ancien élève.<br />
Protestation<br />
Un certain nombre <strong>de</strong> sénateurs qui avaient<br />
vigoureusement protesté contre l'injustifia-<br />
ble condamnation prononcée par la Haute-<br />
Cour, ont voté auuremier tour <strong>de</strong> scrutin<br />
oui concernait M. Bùfï'el, cinq ans <strong>de</strong> bannis-<br />
sement, dans ie but <strong>de</strong> lui assurer la mini-<br />
mum <strong>de</strong> la peine et <strong>de</strong> rendre ainsi la peina<br />
moins odieuse.<br />
Cette attitu<strong>de</strong> n'ayant pas proluit le ré-<br />
sultat désiré, ces sénateurs, au <strong>de</strong>uxième<br />
tour <strong>de</strong> scrutin sur 'l'application da la peine<br />
à M. Déroulè<strong>de</strong>, ont fait" la déclaration sui-<br />
vante, que M. <strong>de</strong> Lamarzelle a portée à la<br />
tribune :<br />
Nous avons voté le minimum <strong>de</strong> cinq ans. con-<br />
vaincu oue ia majorité n'hésiterait pas à, s'y ral-<br />
lier. Cet. espoir ayant été déçu, nous ne vouions<br />
plus appliquer aucune peine.<br />
C'est ce qui explique la différence qui<br />
s'est produite dans" le'chiffre <strong>de</strong>s voix.<br />
M. <strong>de</strong> Lur Saluces condamné à<br />
dix ans <strong>de</strong> bannissement<br />
Par 13! voix contre 15, favorables à une<br />
peine <strong>de</strong> cinq ans et 59 abstentions. M. da<br />
Lur Saluées est condamné comme MM. Buffet<br />
et Dérouiè<strong>de</strong>, à dix ans <strong>de</strong> bannissement.<br />
Guérin condamné à dix. ans <strong>de</strong><br />
détention<br />
Enfin, la Cour examine le cas <strong>de</strong> Guérin.<br />
Un scrutin a lieu qui donne ies résultats<br />
suivants : 127 voix pour dix ans <strong>de</strong> déten-<br />
tion, 3 pour sent ans <strong>de</strong> cette peine, 7 pour<br />
cina ans: 50 abstentions.<br />
M. <strong>de</strong> Casabianca avait <strong>de</strong>mandé que la<br />
ouestion <strong>de</strong>s frais du procès qui atteignent<br />
un chiffre assez élevé comme on sait, sans<br />
pourtant arriver à celui <strong>de</strong> huit cent mille<br />
francs oui a été donné, fut réglés propor-<br />
tionnellement aux condamnations respec-<br />
tives <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s condamnés, défalcation<br />
faite <strong>de</strong>s frais imputables aux acquittés.<br />
Anrès une brève discussion, M. <strong>de</strong> Casa-<br />
bianca a retiré sa proposition.<br />
A quatre heures, i'audience secrète est<br />
suspendue nour la rédaction <strong>de</strong>s arrêts. Elle<br />
esc reprise "à cinq heures, pour soumettre<br />
ces arrêts à ia Cour.<br />
L'audience secrète prend fin<br />
à 5 heures moins cinq.<br />
A 5 heures, la prési<strong>de</strong>nt entre en séance.<br />
Les couloirs d'accès aux tribunes regorgent<br />
do car<strong>de</strong>s municipaux. Tous les sénateurs<br />
sont, à leur banc. La place réservée aux ac-<br />
cusés est vi<strong>de</strong> comme sont vi<strong>de</strong>s les bancs<br />
réservés aux témoins. U n'y a même pas <strong>de</strong><br />
sar<strong>de</strong>s, ce oui donne, à cette partie <strong>de</strong> la<br />
saile hier encore si vivante, un aspect morne<br />
et lugubre.<br />
M- Quentin, seul, s'est assis au premier<br />
banc <strong>de</strong>s accusés.<br />
A 5 heures trois minutes, le prési<strong>de</strong>nt<br />
commence ia lecture da l'arrêt. Les avocats<br />
présents se lèvent, M- Oscar Faiateuf en<br />
tête.<br />
M. Faîlières donne donc, au milieu du plus<br />
profond silence lecture :<br />
1- De l'arrêt, condamnant MM. Buffet et<br />
Déroulè<strong>de</strong> à dix ans <strong>de</strong> bannissement et Gué-<br />
rin à dix ans <strong>de</strong> détention ;<br />
2- De l'arrêt condamnant par contumace,<br />
M. <strong>de</strong> Lur-Saluces à dix ans da bannisse-<br />
ment.<br />
Voici ie texte du Premier arrêt :<br />
réquisitions da M. le<br />
La Haute-Cour,<br />
Statuant sur les<br />
procureur générai.<br />
Après avoir entendu M. le procureur<br />
général en ses réquisitions, les conseils <strong>de</strong>s<br />
accusés et les accusés eux-mêmes, lesquels<br />
ont clé entendus les <strong>de</strong>rniers en leurs<br />
observations sur l'application <strong>de</strong> la peine, et<br />
après en avoir délibéré conformément à la<br />
loi:<br />
Attendu que, <strong>de</strong>s déclarations contenues<br />
au précé<strong>de</strong>nt arrêt . <strong>de</strong> la Haute-Cour en<br />
date <strong>de</strong> ce jour, ii résulte que les accusés<br />
Buffet, Déroulè<strong>de</strong> et, Guérin sont coupables<br />
d'avoir, en 1898 et 1899, sur le territoire <strong>de</strong><br />
la République, notamment à Paris, concerté<br />
et arrêté, avec une ou plusieurs personnes,<br />
un complot ayant pour but <strong>de</strong> détruire ou<br />
<strong>de</strong> changer le gouvernement avec cette cir-<br />
constance que ledit complot a été suivi<br />
d'actes commis ou commencés pour en pré<br />
parer l'éxecution ; que ces faits constituent<br />
le crime prévu par l'article 89, paragra-<br />
phe 1er du Go<strong>de</strong> pénal ;<br />
Attendu qu'il résulte encore dudit arrêt<br />
que Guérin seul s'est, en outre, en 1899, à<br />
Paris, rendu coupable <strong>de</strong>s délits : 1- <strong>de</strong><br />
détention,,sans autorisation, d'armes et <strong>de</strong><br />
munitions <strong>de</strong> guerre ou d'un dépôt d'ar-<br />
mes ; 2' d'outrages par paroles, gestes ou<br />
En Chambre du Conseil<br />
L'aitdience en chambre du conseii s'est<br />
ouverte par une très brève discussion; ie<br />
prési<strong>de</strong>nt a déclaré qus les peines déjà ap-<br />
pliquées aux condamnés sa confondraient<br />
avec celles qui allaient être prononcées.<br />
Ainsi Déroulè<strong>de</strong>, condamne une première<br />
fois à trois mois <strong>de</strong> prison pour outrages au<br />
prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République, une secon<strong>de</strong> fois<br />
à <strong>de</strong>ux ans pour outrages aux juges et au<br />
ministère publie, ne fera pas ces vingt-sept<br />
mois da prison.<br />
La raison en est que si cas <strong>de</strong>rnières pei-<br />
nes étaient subies, elles entreraient en dé-<br />
duction dans le compte <strong>de</strong>s années <strong>de</strong> bannis-<br />
sement, ce qui diminuerait la paine, le ban-<br />
nissement étant considéré comme une peina<br />
supérieure à l'emprisonnement.<br />
La cour est passée presque immédiate-<br />
ment au vote. C'est ia peine "la pius élevée<br />
oui d'abord a été mise aux voix.<br />
M.<br />
'%T'(' :;, -V '<br />
Buffet<br />
<strong>de</strong><br />
condamné â<br />
bannissement<br />
dix ans<br />
menaces envers les agents <strong>de</strong> la force pu-<br />
blique dans l'exercice ou à l'occasion <strong>de</strong><br />
l'exercice <strong>de</strong> leurs fondions ; et 3- d'atta-<br />
ques avec violences et voies <strong>de</strong> fait envers<br />
<strong>de</strong>s agents <strong>de</strong> la force publique agissant<br />
pour l'exécution <strong>de</strong>s lois", délits prévus et<br />
Dunis par les articles 3 et 4 <strong>de</strong> la loi du<br />
24 mai 1834, îes articles 224, 209 et 212 du<br />
co<strong>de</strong> pénal ;<br />
_ Attendu toutefois qu'aux termes <strong>de</strong> l'ar-<br />
ticle 365 du Co<strong>de</strong> d'instruction criminelle,<br />
en cas <strong>de</strong> conviction <strong>de</strong> plusieurs crimes ou<br />
délits, la peine la plus forte sera seule pro-<br />
noncée, que la peine la plus forte est celle<br />
qui résulte <strong>de</strong> l'article 89 du Co<strong>de</strong> pénal;<br />
Attendu que, par le même arrêt, la<br />
Haute-Cour a déclaré les circonstances at-<br />
ténuantes en faveur <strong>de</strong>s trois accusés; qu'il<br />
y a lieu par suite <strong>de</strong> modérer la peine par<br />
l'application <strong>de</strong> l'article 463 du Co<strong>de</strong> pénal:<br />
Vu, en conséquence, lesdits articles 89<br />
paragraphe 1er et 463 du Co<strong>de</strong> pénal, en-<br />
semble les articles 20 et 32 du même Co<strong>de</strong>,<br />
l'article 4 <strong>de</strong> la loi du 24 mai 1835:<br />
Vu encore la disposition <strong>de</strong>s articles 368<br />
du co<strong>de</strong> d'instruction criminelle, 55, du<br />
Co<strong>de</strong> pénal el 9 <strong>de</strong> la loi du 22 juillet 1807.<br />
La Haute-Cour,<br />
Faisant application aux accusés <strong>de</strong>s dis-<br />
positions <strong>de</strong> loi dont il vient d'être donné<br />
lecture,<br />
Condamne Buffet (Anne-Joseph-<br />
Paul-André) à la peine du bannisse-<br />
ment pendant dix années.<br />
Condamne Déroulè<strong>de</strong> (Paul-Marie-<br />
Joseph) à la peine du bannissement<br />
pendant dix. années.<br />
Condamne Guérin (Jules-Napoléon) à<br />
la peine <strong>de</strong> la détention pendant dix<br />
années<br />
Et, après en avoir spécialement délibéré,<br />
dit qu'il n'y a lieu <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r contre Buf-<br />
fet, Déroulè<strong>de</strong> et Guérin à l'interdiction<br />
enté à la diligence <strong>de</strong> M. lo procureur gé.<br />
nêral, imprimé publié cl. affiché partout où<br />
besoin sera cl ordonne qu'il sera notifié<br />
sans délai, aux condamnés par le greffier dà<br />
la Haute-Cour.<br />
Pour M. <strong>de</strong> Lur-Laluces, l'arrêt est ainsi<br />
conçu :<br />
La Haute-Cour,<br />
Statuant sur les réquisitions <strong>de</strong>. M. le<br />
procureur général, après avoir entendu M<br />
le procureur général en ses réquisitions et"<br />
après en avoir délibéré, conformément à là<br />
loi :<br />
Attendu que la procédure <strong>de</strong> contumace<br />
suivie contre <strong>de</strong> Lur-Saluces, est régulière'<br />
Aitendu que <strong>de</strong> la déclaration contenuà<br />
au précé<strong>de</strong>nt arrêt <strong>de</strong> la Haute-Cour, en<br />
date <strong>de</strong> ce jour, il résulte que <strong>de</strong> Lur-Sa-<br />
luces est coupable d'avoir, en 1898 el 1899<br />
sur le territoire <strong>de</strong> la République, notam-<br />
ment à Paris, concerté et arrêté, avec une<br />
ou plusieurs personnes, un complot, ayant<br />
pour but <strong>de</strong> détruire ou <strong>de</strong> changer le gou-<br />
vernement avec celle circonstance que la<br />
dit complot a clé suivi d'actes commis oa<br />
commencés pour en préparer l'exécution ;<br />
que ce fait constitue le crime prévu par<br />
l'article 89, paragraphe premier, du Coda<br />
pénal ;<br />
Attendu que, parle même arrêt, la Cour<br />
a déclaré les circonstances atténuantes en<br />
laveur <strong>de</strong> l'accusé; qu'il y a lieu, par suile,<br />
do modérer la peine par application <strong>de</strong>s dis-<br />
positions <strong>de</strong> l'article 463 du même co<strong>de</strong> ;<br />
Vu les dits articles 89 et,' 463 du Co<strong>de</strong><br />
pénal ensemble, <strong>de</strong> l'article 32 du même<br />
co<strong>de</strong>, lesquels sont ainsi conçu :<br />
« Art. 89.— Le complot, ayant pour but<br />
les crimes mentionnés aux articles 86 et 87,<br />
s'il a été suivi d'un acte commis ou com-<br />
mencé pour en préparer l'exécution sera<br />
puni <strong>de</strong> la déportation, s'il n'a été suivi<br />
d'aucun acte commis ou commencé pour en<br />
préparer l'exécution la peine sera celle <strong>de</strong><br />
la détention ;<br />
« Il y a complot dès que la résolution d'a-<br />
gir est concertée et arrêtée entre <strong>de</strong>ux ou<br />
plusieurs personnes ; s'il y a eu proposition<br />
faite et non agréée do former un complot<br />
pour arriver aux crimes mentionnés dans<br />
les articles 86 et 87, celui qui aurait fait<br />
une telle proposition sera puni d'un em-<br />
prisonnement <strong>de</strong> un an à cinq ans ; le cou-<br />
pable pourra, <strong>de</strong> plus, être interdit en tout<br />
ou partie <strong>de</strong>s droits mentionnés à l'article<br />
42 êt l'article 463.<br />
» Les peines prononcées par la loi contre<br />
celui ou ceux <strong>de</strong>s accusés reconnus coupa-<br />
bles, en faveur <strong>de</strong> qui le jury aura déclaré<br />
les circonstances atténuantes, seront modi-<br />
fiées ainsi qu'il suit: si la peine prononcée<br />
par la loi est la mort, la cour appliquera la<br />
peine <strong>de</strong>s travaux forcés à perpétuité, ou<br />
celle <strong>de</strong>s travaux forcés à temps ; si la peine<br />
est celle <strong>de</strong>s travaux forcés à perpétuité,<br />
la cour appliquera la peine <strong>de</strong>s travaux<br />
forcés à temps ou celle <strong>de</strong> la réclusion; si<br />
la peine est celle <strong>de</strong> la déportation dans<br />
une enceinte fortifiée, la cour appliquera<br />
celle <strong>de</strong> la déportation simple où celle <strong>de</strong> la<br />
détention.<br />
» Mais dans les cas prévus par les arti-<br />
cles 96 et 97, la peine <strong>de</strong> la déportation<br />
simple sera appliquée ; si la peine est celle<br />
<strong>de</strong> la déportation. La Cour appliquera la<br />
peine <strong>de</strong> la détention ou celle du banisse-<br />
ment ; si la peine est celle <strong>de</strong>s travaux for-<br />
cés à temps, la Cour appliquera la peine dô<br />
la réclusion ou les dispositions <strong>de</strong> l'article<br />
401 sans toutefois pouvoir réduire la durée<br />
<strong>de</strong> l'emprisonnement au-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> 2 ans<br />
si la peine est celle <strong>de</strong> la réclusion, <strong>de</strong> la<br />
détention, du bannissement ou <strong>de</strong> la dégra-<br />
dation civique, la Cour appliquera les dis-<br />
positions <strong>de</strong> l'article 401 sans toutefois<br />
pouvoir réduire la durée <strong>de</strong> l'emprisonne-<br />
ment au-<strong>de</strong>ssous d'un an. Dans le cas où<br />
le Co<strong>de</strong> prononce le maximum d'une peine<br />
afllictive, s'il existe <strong>de</strong>s circonstances atté-<br />
nuantes, la Cour appliquera le minimum <strong>de</strong><br />
la peine ou même <strong>de</strong> la peine inférieure.<br />
» Art. 32. —- Quiconque aura été con-<br />
damné au bannissement sera transporté par<br />
ordre du gouvernement hors du territoire<br />
<strong>de</strong> la République ; la durée du bannissa-<br />
ient sera au moins <strong>de</strong> cinq années et.<strong>de</strong><br />
dix années au plus. »<br />
Faisant application <strong>de</strong>sdits articles.<br />
Condamne <strong>de</strong> Lur-Saluces (Eugène-<br />
Henri-Marie), â la peine du bannisse-<br />
ment pendant dix années.<br />
Et attendu que le susnommé est contu-<br />
max ;<br />
Vu l'article 472 du co<strong>de</strong> d'instruction<br />
crlminelie, ordonne que l'extrait du pré-<br />
sent arrêt sera, dans les trois jours, adressé<br />
au directeur <strong>de</strong>s Domaines et <strong>de</strong> l'enregis-'<br />
trementdu domicile du contumax;<br />
Vu encore les dispositions <strong>de</strong> l'article 308<br />
du co<strong>de</strong> d'instruction criminelle ;<br />
Condamne <strong>de</strong> Lur-Saluces aux frais en-<br />
vers l'Eiat, solidairement avec Buffet, Dé-<br />
roulè<strong>de</strong> et Guérin, condamnés par arrêt <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> la Haute-Cour <strong>de</strong> justice en date <strong>de</strong> ca<br />
jour ;<br />
Ordonne que le présent arrêt, sera rendu<br />
public dans la forme et dans les termes<br />
prescrits par la. loi du 2 janvier 1850 et<br />
exécuté à la diligence du procureur gé-<br />
néral.<br />
Après un premier tour da scrutin, qui n'a<br />
pas donné <strong>de</strong> résultats, la cour, par 115 voix<br />
contre 52 favorables au chiffre <strong>de</strong> cinq ans,<br />
et 35 absteutions, condamne M. André Buf-<br />
fet à dix ans <strong>de</strong> bannissement.<br />
Déroulè<strong>de</strong> condamné à dix ans<br />
<strong>de</strong> bannissement<br />
La cour passe ensuite à Déroulè<strong>de</strong>. Il y a<br />
également <strong>de</strong>ux tours <strong>de</strong> scrutin. Par 110<br />
voix contre 69 non et 20 on faveur du chiffre<br />
<strong>de</strong> cinq ans, Déroulè<strong>de</strong> est condamné, comme<br />
loi du 27 mai<br />
et<br />
édictée par l'article 19 <strong>de</strong> la<br />
1835 ;<br />
Prononce la confiscation <strong>de</strong>s armes<br />
munitions saisies au domicile <strong>de</strong> Guérin<br />
Condamne solidairement, Butfet, Dérou-<br />
lè<strong>de</strong> et Guérin aux trais envers l'Etat, i<br />
l'exception <strong>de</strong> ceux qui ont été exclusive<br />
ment, exposés à raison <strong>de</strong>là tentative d'as-<br />
sinat pour laquelle Guérin a été acquitté;<br />
Fixe au minimum la durée <strong>de</strong> la con-<br />
trainte par corps;<br />
Ordonne que le présent arrêt sera e.\é-<br />
Cette lecture est lugubrement accueillie.<br />
Intervention da M 0 Faiateuf<br />
A ce moment M- Faiateuf, défenseur <strong>de</strong><br />
Paul Déroulè<strong>de</strong>, se présente â la barre <strong>de</strong>s<br />
avocats :<br />
La Haute-Cour, en prononçant la peine <strong>de</strong> dût<br />
ans <strong>de</strong> bannissement contre Déroulè<strong>de</strong> n'a -t-ell»<br />
pas entendu confondre dans cette Daine celles à<br />
trois mois et à. <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> prison qui ont été<br />
prononcées aux cours <strong>de</strong>s audiences contre M.<br />
Déroulè<strong>de</strong>?<br />
M. le prési<strong>de</strong>nt. — La confusion est da droit.<br />
Il n'est pas nécessaire <strong>de</strong> le dire oac une déci-<br />
sion spéciale.<br />
Le procureur général intervenant :<br />
Je suis chargé <strong>de</strong> l'exécution da l'arrêt et î»<br />
déclare que cette question ne fait aucun doute.<br />
« Vive l'Armée ! A bas la Haute-Cour ! »<br />
Après ce court dialogue , le prési<strong>de</strong>nt,' .<br />
avant <strong>de</strong> déclarer l'audience levée, ordonna<br />
aux gar<strong>de</strong>s <strong>de</strong> faire évacuer les tribunes.<br />
M. Faîlières et les sénateurs restent à leur,<br />
poste, sans doute dans le but d'éviter ainsi<br />
une manifestation redoutée: mais à peine la<br />
paési<strong>de</strong>nt a-t-il donné l'ordre d'évacuatiors<br />
que, malgré la présence <strong>de</strong> nombreux gar<strong>de</strong>s<br />
républicains répandus un neu partout, da<br />
presque toutes les tribunes s'élève en même<br />
temps une formidable clameur: « Vivo l'AC-,<br />
mée! A bas la Haute-Cour! »<br />
On distingue également les cris <strong>de</strong> 1<br />
« Vive Guérin l A bas les juifsl A bas Ber-<br />
nard ! »<br />
Une longue agitation suit cotte démonstra-<br />
tion vigoureuse du Public <strong>de</strong>s tribunes apos-<br />
trophant la Haute-Cour. Le prési<strong>de</strong>nt, »•<br />
Faîlières, pâle, et les sénateurs, l'air dé-<br />
confit, sa sont tournés vers les tribunes»<br />
d où leur arrive cette ovation au rebours.<br />
Cependant gar<strong>de</strong>s et huissiers font éva-<br />
cuer les galeries. La sortie est fiévreuse-<br />
ment tumultueuse et s'effectue au mil' ûU<br />
d'imprécations adressées à la Haute-Cour- .<br />
Lorsque les sénateurs, débarrassés du u°<br />
<strong>de</strong>s protestataires se trouvent à neu pre»<br />
seuls, l'un d'eux, M. <strong>de</strong> Lamarzelle, s'écrie ..<br />
» Ah! l'exil est imoie ». C'est Victor MS 9 *<br />
par c* vers y»us condamne 1<br />
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