A l'écoute des cités - Le blog de Patrice Leclerc
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EDITORIAL<br />
Au tout début du siècle, ces cahiers n’existaient pas encore.<br />
Pourtant, <strong><strong>de</strong>s</strong> hommes et <strong><strong>de</strong>s</strong> femmes - chrétiens et musulmans<br />
- œuvraient ensemble sur le terrain où étaient concentrées<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> populations immigrées, musulmanes pour la plupart. Des<br />
idées tentaient <strong>de</strong> prendre corps. En particulier, nous avions découvert<br />
un moyen <strong>de</strong> rejoindre le mon<strong>de</strong> immigré féminin qui, à la cité<br />
dite « La Caravelle », se tenait soigneusement à l’écart et se gardait<br />
bien <strong>de</strong> répondre aux occasions <strong>de</strong> rencontre que nous tentions<br />
<strong>de</strong> provoquer. Vint pourtant le jour où l’idée germa dans le cerveau<br />
d’une chrétienne <strong>de</strong> proposer une initiation au tissage. Plus<br />
d’une centaine d’adolescentes, <strong>de</strong> mamans et <strong>de</strong> grands-mères se<br />
sont précipitées. Par la suite, nous lancions, avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Direction<br />
Départementale du Travail, un chantier d’insertion pour initier<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> femmes aux métho<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> tissage <strong><strong>de</strong>s</strong> Gobelins. Il faut rendre<br />
hommage aux personnes <strong>de</strong> la Direction du Travail qui nous ont<br />
aidés dans cette aventure avec une intelligence et un dévouement<br />
remarquables ; on <strong>de</strong>vrait dire avec une véritable bonté. Entre ces<br />
fonctionnaires et nous, pourtant, une incompréhension étrange a<br />
surgi. L’association au nom <strong>de</strong> laquelle nous agissions s’appelait<br />
« Approches 92 » ; elle était déclarée à la Préfecture sous le titre<br />
« Approches islamo chrétiennes dans les Hauts-<strong>de</strong>-Seine ». Cette<br />
dimension interreligieuse affichée était inacceptable par <strong><strong>de</strong>s</strong> fonctionnaires<br />
français ; on nous a contraints à changer d’étiquette et<br />
à prendre, pour continuer à profiter <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Etat, le nom <strong>de</strong><br />
« Mes-Tissages ».<br />
Cette histoire nous semble assez révélatrice du malentendu<br />
à l’intérieur duquel on enferme les acteurs du dialogue interreligieux.<br />
Révélatrice aussi <strong>de</strong> la clôture que souvent ils<br />
dressent eux-mêmes. <strong>Le</strong> lieu <strong>de</strong> la rencontre est conçu comme un<br />
espace séparé. Dans un ensemble laïc comme le nôtre, le religieux<br />
doit être refoulé dans la vie privée. En réalité, cette vision<br />
<strong>de</strong> la société, pour l’instant du moins, est mise à l’épreuve. Il est<br />
bien évi<strong>de</strong>nt que la présence musulmane, dans notre pays, est un<br />
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