A l'écoute des cités - Le blog de Patrice Leclerc
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Pour élargir l’horizon<br />
66<br />
que les dogmes chrétiens ont « plus <strong>de</strong> valeur » que les affirmations<br />
musulmanes. Notre rapport à Dieu « vaut mieux » que le leur ; il est<br />
moins ritualiste. Il a plus <strong>de</strong> capacité à s’ouvrir sur la mo<strong>de</strong>rnité. Que<br />
n’entend-on pas dans certains milieux chrétiens !<br />
Il faut remarquer qu’en comparant la « valeur » <strong><strong>de</strong>s</strong> uns à celle <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
autres, fût-ce pour rendre hommage à l’autre, on sombre dans l’idéologie<br />
contemporaine la plus matérialiste qui soit. <strong>Le</strong> mot « valeur »<br />
renvoie au système économique dont on constate chaque jour les<br />
effets pervers. Même si on est animé <strong><strong>de</strong>s</strong> sentiments les plus charitables,<br />
on entre dans le jeu <strong>de</strong> la concurrence. Ce jeu du plus et<br />
du moins n’est pas chrétien. La cohérence évangélique ignore toute<br />
notion <strong>de</strong> « valeur » religieuse ou morale et, pour Jésus, celui qui<br />
croit gagner est au nombre <strong><strong>de</strong>s</strong> perdants. Soyons les uns <strong>de</strong>vant les<br />
autres ou les uns avec les autres sans nous jauger, sans nous juger («<br />
Ne jugez pas »), mais en considérant ce qui nous distingue comme<br />
un écart qui nous permet <strong>de</strong> nous écouter et <strong>de</strong> nous appeler, <strong>de</strong> nous<br />
respecter.<br />
Une <strong>de</strong>uxième tentation menace le<br />
Un brèche à élargir.<br />
chrétien et nombreux sont ceux qui<br />
y succombent. <strong>Le</strong> Concile, certes,<br />
a ouvert une brèche qui permet<br />
au chrétien <strong>de</strong> se rappeler que le<br />
mon<strong>de</strong> n’est pas enfermé dans les murs qui circonscrivent le catholicisme.<br />
Grâce à Vatican II, la rencontre du non-chrétien et particulièrement<br />
du musulman est non seulement possible mais désirable. Une fois<br />
la brèche franchie, il semble qu’il faille encore aller <strong>de</strong> l’avant, préciser<br />
la portée et les conditions <strong>de</strong> la rencontre, élargir les dimensions <strong>de</strong> la<br />
brèche pour opérer le passage. Cela suppose peut-être une réflexion sur<br />
l’Eglise qui n’est pas encore commencée. <strong>Le</strong> Concile, certes, permet <strong>de</strong><br />
considérer la foi et les affirmations musulmanes avec estime ; reconnaissons<br />
pourtant qu’à s’en tenir à la lettre <strong><strong>de</strong>s</strong> déclarations officielles<br />
on éprouve un certain malaise. Pire ! Cette estime ne suppose-t-elle<br />
pas une forme <strong>de</strong> totalitarisme ? Nous mettons en la personne <strong>de</strong> Jésus<br />
l’accomplissement <strong>de</strong> toute démarche humaine et particulièrement <strong>de</strong><br />
toute démarche religieuse. Ce qu’il vient faire connaître <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong> la<br />
vie, <strong>de</strong> la <strong><strong>de</strong>s</strong>tinée <strong>de</strong> l’homme, nous permet <strong>de</strong> discerner ce qui, chez<br />
l’autre, mérite considération. En réalité, nous prétendons savoir mieux<br />
que quiconque la vérité ultime et nous sommes persuadés que ce qu’il<br />
y a <strong>de</strong> bon chez l’autre n’est qu’une ébauche <strong>de</strong> ce qui ne trouve son<br />
épanouissement que dans l’Eglise catholique. En elle seule on peut<br />
trouver la vérité pleine. N’est-ce pas là ce totalitarisme qui menace ? A