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Familistère de Guise - Aisne

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champions,<br />

ons du <strong>Familistère</strong>”<br />

“Mon mari son <strong>Familistère</strong> c’était tout,<br />

mon beau-père c’était encore pire et mon fils<br />

il est pareil, il reste pas au <strong>Familistère</strong> mais le<br />

<strong>Familistère</strong> c’est un noyau qu’il a eu à lui parce<br />

qu’il allait quelquefois se promener <strong>de</strong>rrière<br />

avec mon beau-père, qui était son grand-père,<br />

il le prenait par la main et ils allaient voir le<br />

bord <strong>de</strong> l’eau et tout ça pendant que je faisais<br />

mon travail. Quand mon gamin est venu au<br />

mon<strong>de</strong>, moi je lui ai tout expliqué sur Godin et<br />

tout ça. Mon fils voulait savoir mais par écrit. Il<br />

copiait tout, il savait tout.<br />

“Un beau jour, on a voulu abattre <strong>de</strong>s arbres là<br />

<strong>de</strong>rrière <strong>de</strong>s marronniers qui ont plus <strong>de</strong> 100<br />

ans, soit disant que ça donnait <strong>de</strong> l’ombre, que<br />

les racines allaient abîmer le <strong>Familistère</strong>. Ils<br />

avaient déjà abattu celui du coin là.<br />

- Le petit me dit : qu’est-ce qu’il y a ?<br />

- Eh bien, ils vont abattre les marronniers.<br />

- Quoi, qu’il me dit.<br />

- Je lui dis, oui.<br />

- Ah non, qu’il dit, moi je ne veux pas qu’on<br />

abatte ça.<br />

- Qu’est-ce que tu veux faire ? T’as 18 ans, la<br />

belle affaire, on va pas t’écouter.<br />

- Tu vas voir, qu’il me dit.<br />

Moi j’étais pas tranquille parce que mon beaupère,<br />

quand il disait quelque chose, tout le<br />

mon<strong>de</strong> filait. Si mon gamin il est comme lui !<br />

Et c’est ce qui s’est passé, parce que le gamin<br />

est parti. Je suis allée avec ma voisine sur la<br />

pelouse, voir les gars.<br />

- La première, j’ai dit : Mais ils ont toujours<br />

été là ! Qui ça gêne ? Vous avez abattu là un<br />

arbre, vous venez <strong>de</strong> commettre un crime, il<br />

André Gravet : “Mon grand-père est entré<br />

[à l’usine Godin] le 24 novembre 1881, à<br />

17 ans. C’est-à-dire qu’il a travaillé avec J.-<br />

B.A. Godin. Il était natif d’Esquehéries (…) Il<br />

a travaillé jusqu’en 1925 (…) Mon père est<br />

né au <strong>Familistère</strong>, en 1890. Il a fait toute sa<br />

carrière chez Godin (...) Mon grand-père était<br />

employé <strong>de</strong> bureau, mon père était magasinier<br />

puis ensuite responsable du dépôt <strong>de</strong><br />

pièces détachées (…) Ensuite, c’est moi qui<br />

naît au <strong>Familistère</strong>. J’ai fait toute ma carrière<br />

chez Godin. Au départ employé <strong>de</strong> bureau, j’ai<br />

terminé responsable <strong>de</strong>s relations humaines.<br />

Entré en 1951, j’ai pris ma retraite en 1995<br />

après 44 ans <strong>de</strong> travail. Ensuite, il y a mon<br />

fils qui est né au <strong>Familistère</strong>. Lui y a travaillé<br />

très peu : il est rentré en 1979, il est parti en<br />

1984 parce qu’à l’époque l’usine n’allait pas<br />

très bien.”<br />

est pas mala<strong>de</strong>.<br />

- Mon gamin, il dit : Qu’est-ce que vous allez<br />

abattre ?<br />

- Bien pour l’instant il n’y a que celui-là et puis<br />

celui d’à-côté. On a ordre mais nous on est <strong>de</strong>s<br />

ouvriers.<br />

Au bout d’un moment, il y en a un qui a été<br />

téléphoner ou je ne sais pas quoi, il y a un gars<br />

<strong>de</strong> cette maison qui a dit :<br />

- Arrêtez tout, il faut qu’on discute <strong>de</strong> ça.<br />

Mais c’était bien dit qu’on abattait au moins les<br />

5 à la file. Mon gamin il est monté sur le tronc<br />

<strong>de</strong> l’arbre.<br />

- Il a dit : Si vous le faîtes tomber, vous me<br />

faîtes tomber avec, je ne bouge pas <strong>de</strong> là.<br />

Il a pas bougé et puis les hommes ont remballé.<br />

Depuis ce temps-là, on en a plus entendu<br />

parler les gens lui ont dit :<br />

- Pourquoi tu fais ça ?<br />

- Mon gamin a répondu : C’est mon arrièregrand-père<br />

qui les a mis.<br />

C’était le père <strong>de</strong> son grand-père qui les avait<br />

plantés avec les autres <strong>de</strong> la ville quand ils ont<br />

décidé <strong>de</strong> mettre <strong>de</strong>s marronniers sur tout le<br />

tour du bâtiment. Au départ, il était pas tellement<br />

bien et puis après tout le mon<strong>de</strong> lui a dit :<br />

- Grâce à toi, on a toujours nos marronniers.<br />

Et lui il était fier d’avoir défendu un petit peu le<br />

<strong>Familistère</strong> et moi je trouve qu’il a bien fait, il<br />

avait raison.<br />

Simone DORGE<br />

Extraits <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong><br />

Simone Dorge et <strong>de</strong> André Gravet<br />

sur la vie au <strong>Familistère</strong> recueillis<br />

en 2000 par Estienne<br />

Blécon et Frédéric Panni. Le<br />

témoignage <strong>de</strong> Jean Baudaux<br />

a été publié sous le titre : Le<br />

<strong>Familistère</strong> par Jean Baudaux,<br />

Laon, Conseil général <strong>de</strong> l’<strong>Aisne</strong>,<br />

2000. <br />

Jean Baudaux (en bas à droite),<br />

élève <strong>de</strong> l’harmonie du <strong>Familistère</strong><br />

<strong>de</strong> <strong>Guise</strong> en 1935.<br />

Coll. <strong>Familistère</strong> <strong>de</strong> <strong>Guise</strong><br />

“Quand on était gamin, il y avait<br />

les marchan<strong>de</strong>s <strong>de</strong> lait qui passaient avec une<br />

voiture à cheval dans le <strong>Familistère</strong> et il y avait<br />

les habitués qui prenaient leur lait. Les gens…<br />

les dames avaient l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mettre leur<br />

timbale à lait sur la fenêtre avec l’argent en<br />

<strong>de</strong>ssous. Alors, comme nous on le savait bien<br />

sûr, comme tout gamin, on allait faire un tour<br />

et puis avant que la laitière elle passe, on relevait<br />

les sous et puis on se barrait. Oh, c’était<br />

l’affaire <strong>de</strong> 2-3 sous, c’était pas formidable ! Ou<br />

alors, quand on était arrivé trop tard, que le<br />

lait était dans… qu’il n’y avait plus <strong>de</strong> sous en<br />

<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> la timbale, on buvait une gorgée<br />

puis on se sauvait.<br />

On s’est bagarré… on faisait <strong>de</strong>s batailles avec<br />

les gens [du quartier] <strong>de</strong> Robbé par exemple.<br />

On s’armait comme <strong>de</strong>s anciens, on avait <strong>de</strong>s<br />

boucliers. J’ai connu <strong>de</strong>s gars qui avaient <strong>de</strong>s<br />

arca<strong>de</strong>s fendues par un caillou… par <strong>de</strong>s scories.<br />

C’était comme ça, on défendait le <strong>Familistère</strong><br />

si vous voulez. On faisait <strong>de</strong>s murs, quand<br />

c’était l’automne, avec <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> marronniers<br />

et on se bignolait à coup <strong>de</strong> marrons<br />

avec les gens… Bon bien, c’était comme tous<br />

les gosses, mais je vous dis, on était pas <strong>de</strong>s<br />

champions pour autant. On était les champions<br />

du <strong>Familistère</strong>.”<br />

Jean BAUDAUX<br />

Simone Dorge est admise au <strong>Familistère</strong> en<br />

1952, année <strong>de</strong> son mariage avec Roger<br />

Dorge, familistérien et pointeau à l’usine<br />

Godin (préparation <strong>de</strong>s payes <strong>de</strong>s ouvriers).<br />

Le beau-père <strong>de</strong> Simone Dorge exerce longtemps<br />

le métier <strong>de</strong> mouleur à l’usine <strong>de</strong><br />

<strong>Guise</strong>. Simone et Roger Dorge s’installent<br />

dans un appartement <strong>de</strong> l’aile gauche du <strong>Familistère</strong>,<br />

celui-là même où Roger Dorge a vu<br />

le jour. Ils y élèvent leurs <strong>de</strong>ux enfants, fille<br />

et garçon. Simone Dorge y <strong>de</strong>meure après le<br />

décès <strong>de</strong> son mari.<br />

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