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Familistère de Guise - Aisne

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présente et future au <strong>Familistère</strong><br />

L’appartement <strong>de</strong> Godin vu <strong>de</strong> la place. Photographie Hugues Fontaine, 2009. © <strong>Familistère</strong> <strong>de</strong> <strong>Guise</strong><br />

<strong>de</strong>s roses, au gar<strong>de</strong>-à-vous <strong>de</strong>vant le visiteur,<br />

et l’on se perd dans les carrés potagers et<br />

aromatiques. Pour Godin, le jardin “<strong>de</strong> rapport<br />

et d’agrément” doit non seulement pourvoir<br />

en légumes les premiers familistériens, mais<br />

comme dans tout ce qu’il entreprend, il a aussi<br />

une fonction symbolique, celle <strong>de</strong> rappeler<br />

la nature primitive, non pas dans une vision<br />

rousseauiste, mais au contraire, d’exaltation<br />

du progrès humain. L’étrange hutte qui domine<br />

la rivière n’est pas récente, c’est bien Godin<br />

qui l’a voulue. L’homme primitif vivait dans une<br />

paillote, le nouvel homme, libéré <strong>de</strong> l’asservissement<br />

à la terre, habite le <strong>Familistère</strong>.<br />

Traversons l’Oise, laissant à droite la buan<strong>de</strong>rie–piscine.<br />

Nous pousserons ses portes plus<br />

tard. Il est tôt. Un homme<br />

entre dans le pavillon central<br />

comme une ombre, un<br />

filet à provisions dans la<br />

main, une baguette <strong>de</strong> pain<br />

dépassant à peine. Une<br />

femme sort et se hâte vers<br />

sa voiture. Il fait frais, encore.<br />

Ainsi donc, le voilà, le<br />

fameux Palais, le “Versailles”<br />

<strong>de</strong>s ouvriers. Neuf cents fe-<br />

Dans la cour,<br />

le facteur passe.<br />

En face, c’est<br />

le musée.<br />

Derrière, ce<br />

sont les gens<br />

nêtres, mille trois cents portes, dix millions <strong>de</strong><br />

briques. Ce n’est pas un concept, non. C’est<br />

du soli<strong>de</strong>, cette “machine à habiter ensemble”.<br />

<strong>Familistère</strong> central. Pris en main par Frédéric<br />

Panni, le conservateur, qui travaille ici <strong>de</strong>puis dix<br />

ans et s’en trouve parfois transformé, comme<br />

habité par la machine. “Il m’arrive, lorsque je<br />

lis Libé, <strong>de</strong> décrypter les événements actuels<br />

avec un regard différent, lié à l’œuvre <strong>de</strong> Godin”,<br />

sourit-il <strong>de</strong>rrière ses lunettes ron<strong>de</strong>s.<br />

Dans la cour. Le facteur passe. En face, c’est<br />

le musée. Derrière, ce sont les “vrais” gens. Ils<br />

sont retraités, actifs. Ont <strong>de</strong>s enfants. Ou pas.<br />

Ils vivent là <strong>de</strong>puis longtemps. Ou pas. C’est<br />

un immeuble d’habitation comme les autres,<br />

alors ? Certainement pas, pour Simone Dorge,<br />

77 ans, qui <strong>de</strong>meure dans l’aile<br />

gauche <strong>de</strong>puis 1952, après son<br />

mariage avec un familistérien.<br />

Son parcours est jalonné <strong>de</strong><br />

chiffres - ceux <strong>de</strong>s appartements<br />

qu’elle a occupé. “J’ai habité au<br />

49, d’abord, dans l’appartement<br />

où est né mon mari, en 1911.<br />

Mes beaux-parents étaient à<br />

l’étage au-<strong>de</strong>ssous, au 19.” Aujourd’hui,<br />

Simone habite au 33,<br />

au <strong>de</strong>uxième étage. Elle raconte,<br />

avec vivacité, son arrivée dans<br />

ce mon<strong>de</strong> à part. Elle<br />

est née “en ville”, mais<br />

connaissait bien le <strong>Familistère</strong>,<br />

pour aller y<br />

faire ses commissions,<br />

le jeudi. “Lorsque je<br />

me suis installée là,<br />

je me suis dit qu’il fallait<br />

que je fasse bonne<br />

impression aux autres<br />

habitants. J’ai bien lu<br />

le règlement, et je l’ai toujours<br />

respecté. Je disais bonjour, avec<br />

un sourire, même aux gens qui<br />

ne me répondaient pas. C’était<br />

à moi <strong>de</strong> m’intégrer.” Simone<br />

constate vite qu’ici, “ce sont les<br />

mêmes gens qu’en ville, mais ce<br />

n’est pas la même vie.” Les voisines<br />

qui donnent un coup sur<br />

le mur, pour indiquer que le café<br />

est chaud. Ça, Simone ne s’y est<br />

jamais fait, “mais on ne m’en a<br />

pas voulu.” Simone est diserte<br />

sur la vie passée au <strong>Familistère</strong>, moins sur le<br />

présent. Le Central rénové lui plaît, c’est sûr.<br />

“On s’est <strong>de</strong>mandé ce qu’ils allaient faire, mais<br />

c’est bien. C’est propre, surtout”.<br />

Retour au central. Sur trois étages, une explication<br />

<strong>de</strong> la rationalité déraisonnable <strong>de</strong> J.-B.A.<br />

Godin. Sans doute le père du <strong>Familistère</strong> auraitil<br />

été satisfait <strong>de</strong> la trouvaille muséologique :<br />

une coupe, gran<strong>de</strong>ur nature, <strong>de</strong> l’intérieur du<br />

bâtiment. Vertigineux. On y voit les entrailles <strong>de</strong><br />

la machine, <strong>de</strong> la cave au grenier. De visu, on<br />

comprend le système <strong>de</strong> ventilation, qui recycle<br />

le vent du nord à partir <strong>de</strong>s caves. Puis, on<br />

monte dans les étages, à plus <strong>de</strong> 18 mètres<br />

<strong>de</strong> haut. Ce matin-là, trois bus <strong>de</strong> retraités sont<br />

<strong>de</strong>scendus du Pas-<strong>de</strong>-Calais. Sallaumines, au<br />

cœur du pays minier. Vivement intéressés par<br />

la comparaison avec le système <strong>de</strong>s houillères<br />

- les petites maisons individuelles tant honnies<br />

par Godin. Exclamations <strong>de</strong>vant la collection <strong>de</strong><br />

poêles, que tous ont connu en fonctionnement,<br />

à la maison, à l’école. Leurs yeux sont attirés<br />

par les cimaises sur lesquelles se déploient<br />

<strong>de</strong>s pensées <strong>de</strong> J.-B. A., extraites <strong>de</strong> son ouvrage,<br />

Solutions Sociales.<br />

><br />

Dans la cour du pavillon central. Juin 2010.<br />

Photographie Georges Fessy, 2010. © Département <strong>de</strong> l’<strong>Aisne</strong><br />

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