Alexa Sarbacane, épisode 5 - Eric Vincent

- Un danger ? Je suis en danger ? Il faut que je me déguise pour me mettre à l'abri du danger ?
"Absolument" répondit-il de manière catégorique.
D'ordinaire, miss Sarbacane aurait chipoté, discuté, pinaillé, critiqué ; bref, elle aurait usé de
sa réputation de dominatrice. Là, elle défit la malle magique dévolue aux tenues de travail et
au grimage sans perdre une seule seconde. Elle cogita brièvement pour se rendre
méconnaissable et eut une brillante idée.
16
*
* *
L'ensemble du personnel navigant se tenait prêt à accueillir les officiels dans ce vol spécial à
bord d'un Jumbo Jet, le Boeing 747. Près de quatre cent cinquante figures emblématiques de
la cinquième république avaient pris place à bord. Même si la beauté des hôtesses de l'air
n'était plus ce qu'elle était dans de nombreuses compagnies aériennes (du fait de la
multiplication des vols, tout simplement), la légende perdurait au sein de cet équipage. Ces
grandes blondes avaient de l'allure et un port royal. La plus minuscule d'entre elles, une
délicieuse eurasienne à la peau mate et aux yeux verts, les cheveux noirs, brillants, ramassés
en un subtil assemblage sous sa coiffe, ne dépareillait pas du reste de l'équipe. La charmante
demoiselle compensait ses débuts peu assurés par une gentillesse désarmante et des sourires
prévenants. Miss Sarbacane, méconnaissable, s'en tirait avec les honneurs pour sa première
traversée transatlantique en tant qu'hôtesse de l'air.
Elle plaçait les passagers à l'instar de ses supposées collègues. Elle mena Romain Latin à sa
place sans qu'il ne la reconnaisse. Il avait l'air nettement moins frais qu'à son arrivée et il
aurait menti en prétendant qu'il s'agissait d'un effet à retardement du décalage horaire. Que
nenni ! Il s'agissait plutôt des conséquences dévastatrices d'une folle nuit passée au coeur
d'une tornade rousse.
Ses adieux avec Marie furent longs et chaleureux. Le jeune homme n'avait pas regretté son
déplacement en Guyane. Alexa n'avait pas le moindre remords d'avoir foulé le sol de
l'Amazonie. C'était les yeux remplis d'émotion qu'elle avait quitté l'équipage d'Hermès, la
larme à l'oeil qu'elle avait serré Marie dans ses bras une dernière fois. Elle la reverrait bientôt.
Elle le savait. Marie avait été subjuguée par Romain et ne tarderait pas à le rejoindre en
métropole. Nul besoin de voyance pour deviner que les deux spécialistes de la
communication étaient tombés follement amoureux. Le futur député avait intérêt à assurer
avec mademoiselle Curry car elle avait le don de pimenter la relation.
Une fois l'ensemble des passagers assis à leurs places, une invitation sonore et visuelle les pria
instamment de se sangler correctement (Note de l'auteur : les gros porteurs ont beau paraître
très stables, le geste a beau paraître inutile, je peux vous assurer qu'un énorme trou d'air vous
décolle de votre siège en moins de deux secondes et qu'il s'agit véritablement d'une mesure
indispensable). Alexa se prêta au jeu de la démonstration des gilets de sauvetage.
Evidemment, vu leurs couleurs bariolées, elle s'extasia devant ces accessoires de secours dont