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L'accueil des enfants (d') immigrés dans les écoles françaises

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Nous nous intéresserons ici aux <strong>enfants</strong> ayant eux-mêmes migré, et aux <strong>enfants</strong> dont <strong>les</strong><br />

parents ont migré. Se pose tout <strong>d'</strong>abord la question de leur dénomination. Quel(s) terme(s)<br />

utilisé(s) pour désigner ces <strong>enfants</strong> : <strong>enfants</strong> (de) migrants, (<strong>d'</strong>) immigrants, (<strong>d'</strong>) émigrants, (<strong>d'</strong>)<br />

<strong>immigrés</strong>, (<strong>d'</strong>) émigrés, (de) « migrés » ?<br />

Le participe présent « migrant », « immigrant » ou « émigrant » fait référence à une action en<br />

cours. Or, pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> que nous étudions, la migration est terminée 62 . Le participe passé<br />

semble donc plus opportun pour <strong>les</strong> caractériser. Il évoque en effet un processus achevé.<br />

Nous entendons la critique selon laquelle « (l)es protagonistes (de la migration) continuent<br />

<strong>d'</strong>être désignés exclusivement en référence à cet épisode, comme s'il ne devait jamais cesser<br />

de s'accomplir. Comme si la migration et ses acteurs étaient indéfectiblement confondus.<br />

Comme s'ils continuaient <strong>d'</strong>être en partance, comme si le passage se prolongeait sans jamais<br />

pouvoir aboutir à un autre lieu où construire une autre identité sociale. Comme s'ils devaient<br />

demeurer <strong>d'</strong>éternels errants. » 63<br />

Cependant, <strong>dans</strong> notre recherche, le fait <strong>d'</strong>avoir migré est un critère important de l'histoire <strong>des</strong><br />

<strong>enfants</strong>, que cette migration ait été effectuée par eux ou leurs parents 64 . En effet, la migration<br />

est à l'origine de l'existence <strong>d'</strong>une double référence culturelle (celle de la famille et celle de la<br />

société de résidence) avec laquelle ces <strong>enfants</strong> vont grandir.<br />

Alors, « migrés » ou <strong>immigrés</strong> ? « Migré » prend en considération l'émigré et l'immigré, c'est-<br />

à-dire la personne <strong>dans</strong> l'ensemble de son parcours. Abdelmalek Sayad attire notre attention<br />

<strong>dans</strong> Les 3 âges de l'émigration sur le fait que l'immigré est également émigré et que l'on ne<br />

peut pas comprendre la trajectoire migratoire de celui-ci si on ne prend pas en compte le<br />

temps et l'espace <strong>d'</strong>avant l'immigration 65 . En effet, avant <strong>d'</strong>immigrer, le migrant émigre, quitte<br />

un pays. Or, souvent l'immigré est perçu comme un être sans histoire, sans passé, un être qui<br />

naît en arrivant <strong>dans</strong> le pays <strong>d'</strong> arrivée. 66<br />

62 A quelques exceptions près où l'arrivée en France n'est qu'une étape de la migration.<br />

63 Nacira Guenif-Souilamas, Des « beurettes » aux <strong>des</strong>cendants <strong>d'</strong>immigrants nord-africains, Paris, Grasset,<br />

2000, pp.40-41<br />

64 Nous ne réduisons cependant pas ces <strong>enfants</strong> ou leurs parents à cette seule migration.<br />

65 Abdelmalek Sayad, Les 3 âges de l'émigration, in Abdelmalek Sayad, La double absence, Paris Seuil, 1999,<br />

p.56<br />

66 « Des centaines de milliers <strong>d'</strong>hommes sont décrits et jugés comme s'ils sortaient du néant. Comme si, avant<br />

de venir chez nous pour travailler et pour y endurer, ils n'avaient jamais existé. (...) Sortis du néant, oui –<br />

c'est-à-dire sans passé, et sans avenir. » Daniel Karlin, Tony Lainé, La mal vie..., Paris, Éditions socia<strong>les</strong>,<br />

1978, p.34<br />

Cette absence de passé est présente <strong>dans</strong> <strong>les</strong> dénominations utilisées pour nommer <strong>les</strong> <strong>immigrés</strong> et leurs<br />

<strong>des</strong>cendants : « 1 ère génération », « 2 ème génération ». La migration semble marquer le début de la généalogie.<br />

« Il semblerait que l'acte migratoire parental a engendré une cassure <strong>dans</strong> cette chaîne patrilinéaire, cassure<br />

qui met <strong>les</strong> parents au point « zéro » <strong>d'</strong>origine. » Smaïl Hadjadj, Le palimpseste psychique ou la fonction<br />

paternelle <strong>dans</strong> <strong>les</strong> rapports à la filiation, in Ab<strong>des</strong>salem Yahyaoui (ss. dir.), Troub<strong>les</strong> du langage et de la<br />

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