Friedrich Nietzsche - Sociologie:Système LMD
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<strong>Friedrich</strong> <strong>Nietzsche</strong> 38<br />
refoule sans pitié la vie dégénérescente — par exemple en faveur du droit de vivre... »<br />
Crépuscule des idoles.<br />
Qui sont en effet, pour <strong>Nietzsche</strong>, ceux qu'il appelle les "ratés" ? Ce sont ceux qui<br />
interprètent moralement le monde, et qui ne peuvent en conséquence supporter d'y vivre<br />
(car, nous l'avons vu, le monde et son interprétation morale se contredisent), bref ce sont<br />
ceux que ronge le nihilisme. Il n'est donc nul besoin d'une politique agressive (qui serait<br />
une forme de décadence), mais seulement d'une sélection des interprétations. Pour le<br />
comprendre, prenons un exemple : un homme, dans l'Antiquité, ayant appris la doctrine de<br />
Platon, se suicida car il estima qu'il ne fallait pas attendre la mort naturelle pour connaître<br />
ce monde meilleur décrit par le philosophe. Voilà un nihilisme pratique et conséquent, qui<br />
est aussi une forme d'eugénisme par l'influence des idées. C'est pourquoi on trouvera chez<br />
<strong>Nietzsche</strong> un éloge du suicide, et d'une mise en scène consolatrice de la mort librement<br />
choisie, qu'il oppose à l'horrible mise en scène de la mort et de ses tourments moraux dans<br />
le christianisme : il faut se sentir libre de se tuer, car c'est ainsi un service que l'on se rend<br />
à soi-même, et que l'on rend également aux autres quand la vie est devenue insupportable.<br />
Ainsi parlait Zarathoustra mentionne qu'il faut savoir « mourir au plus haut point de son<br />
ascension », lorsqu'il est impossible de se surpasser, et en faisant cela, notre image et notre<br />
puissance ne seront pas altérées par les années qu'il nous serait resté à vivre (et à se<br />
dégrader).<br />
Dès lors, <strong>Nietzsche</strong> se pose les questions suivantes :<br />
• la crise nihiliste peut-elle être précipitée ?<br />
• quel type de valeurs permettrait-il de surmonter cette crise ?<br />
Naturalisation de l'homme<br />
Une réponse possible à la seconde question consiste à se demander s'il est possible de<br />
naturaliser l'homme, en extirpant les habitudes idéalistes qui détournèrent les hommes du<br />
monde sensible, de la Terre.<br />
Puisque la morale des faibles a vaincu, faut-il comprendre que par la critique de cette<br />
morale et les réflexions sur la culture, <strong>Nietzsche</strong> aspire à un retour à des formes anciennes<br />
de civilisation, avec tous les aspects violents et cruels ? Il faut répondre non ; cependant les<br />
temps anciens, pour <strong>Nietzsche</strong>, sont toujours possibles parce qu'il appartient à la Volonté<br />
de puissance humaine de s'exercer avec violence dès lors qu'elle n'est pas l'objet d'une<br />
autre force qui la contient et la détourne vers des expressions culturelles plus raffinées.<br />
Loin de souhaiter la violence pour elle-même, <strong>Nietzsche</strong> constate qu'elle est naturelle, et<br />
qu'il nous appartient de la cultiver dans un sens ou dans un autre.<br />
Dès lors que la morale du ressentiment s'est imposée, il serait absurde de faire comme si<br />
elle n'avait eu aucune influence. Aurore, où il propose de substituer une morale naturelle à<br />
la morale chrétienne, qui conserverait par exemple certaines pratiques de la vertu, mais en<br />
leur donnant des buts et des moyens différents. <strong>Nietzsche</strong> s'attache à définir une<br />
naturalisation de l'homme qui passerait par une spiritualisation des pulsions : par exemple,<br />
l'abstinence absolue, valorisée par la morale, devient une abstinence relative qui permet de<br />
concentrer et d'augmenter les forces intellectuelles. La haine peut être transformée en<br />
amour de ses ennemis, si l'on comprend la nécessité naturelle de l'adversité.<br />
D'une manière générale, les anciennes vertus peuvent ainsi être réinterprétées, tout en<br />
supprimant les éléments réactifs qu'elles contenaient ou dont elles étaient issues. La<br />
perspective de cette réévaluation est celle de la grande santé.