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Formation Dossier<br />

La nouvelle carte de l’excellence<br />

Entretien avec Enora Pruvot, chargée de projet<br />

au sein de l’Association européenne des universités<br />

«La diversification des ressources<br />

permet de limiter les risques »<br />

Vous suivez depuis 2010 la situation des<br />

finances des européennes.<br />

Dans quelle mesure ont-elles souffert<br />

«universités de la crise économique ?<br />

européennes.<br />

L’impact de la crise économique n’a pas été le<br />

même à travers toute l’Europe. Cela étant dit,<br />

dans un bon nombre de pays, les gouvernements<br />

ont décidé de réduire leurs subventions aux universités.<br />

La <strong>Le</strong>ttonie connaît la situation la plus<br />

dramatique. <strong>Le</strong>s universités y ont perdu 48 % de<br />

leurs subventions en 2009, puis encore 18 % en<br />

2010. <strong>Le</strong>s universités grecques paient aussi un<br />

lourd tribut à la crise. Comme d’autres secteurs<br />

publics, les universités ont perdu près de 35 % de<br />

leurs financements, causant en premier lieu un<br />

arrêt des recrutements d’enseignants-chercheurs.<br />

En Italie, les universités s’attendent à une chute<br />

de 20 % de leurs subventions d’ici à 2013. Enfin,<br />

en Angleterre et au Pays de Galles, les pouvoirs<br />

publics ont décidé de supprimer 40 % des subventions<br />

publiques pour l’enseignement et d’autoriser<br />

les universités à percevoir des droits d’inscription<br />

allant jusqu’à 9000 livres [plus de<br />

10 000 euros].<br />

2006 Enora Pruvot est diplômée de<br />

l’Institut d’études politiques de Lille.<br />

2007 Institut supérieur de management<br />

public et politique (ISMaPP), Bruxelles.<br />

2008 Collège d’Europe, Bruges (Belgique).<br />

2008 Rejoint l’Association européenne<br />

des universités (EUA) au sein de l’unité<br />

Gouvernance, autonomie et financements.<br />

2011 Coécrit un rapport sur la<br />

diversification des financements des<br />

Dans les autres pays européens, les établissements<br />

sont-ils moins touchés ?<br />

Effectivement, certains Etats ont préféré limiter<br />

les baisses de subventions, même si les coupes<br />

budgétaires restent substantielles. En Islande, en<br />

Roumanie ou aux Pays-Bas, les universités perdent<br />

de 5%à 10 % de fonds publics. Dans d’autres<br />

pays, les coupes sont indirectes. <strong>Le</strong> personnel universitaire<br />

est parfois concerné en priorité, à travers<br />

des réductions salariales, le gel des recrutements<br />

ou des départs à la retraite anticipés,<br />

comme en Irlande. En Belgique ou en Espagne,<br />

les engagements financiers pris sont repoussés.<br />

Aucun pays n’est mieux loti ?<br />

Il existe quatre exceptions. Après une baisse des<br />

budgets ces dernières années, le Portugal s’est<br />

engagé à apporter 100 millions d’euros annuels<br />

sur quatre ans à ses universités. De même en<br />

Norvège, un pays particulièrement riche, le gouvernement<br />

poursuit son aide en faveur des universités.<br />

Restent deux cas particuliers : l’Allemagne<br />

et la France. En Allemagne, l’Etat fédéral<br />

investit depuis 2007 plusieurs milliards d’euros<br />

dans un certain nombre d’universités sélectionnées<br />

par un jury international. Cependant, dans<br />

le même temps, certains Länder ont baissé leurs<br />

subventions aux universités. En France également,<br />

l’idée est de faire émerger des universités<br />

d’excellence grâce aux investissements d’avenir.<br />

Cela se double d’un effort budgétaire important<br />

depuis 2007.<br />

Dans votre rapport, vous vous inquiétez des<br />

conséquences d’un financement purement<br />

public des universités. Pourquoi ?<br />

<strong>Le</strong> financement public des universités est essentiel,<br />

car il offre une grande stabilité aux institutions.<br />

L’Association européenne des universités<br />

continue de demander des efforts supplémentaires<br />

aux autorités publiques. Mais, en période<br />

de crise, la diversification des ressources permet<br />

de limiter les risques liés à une trop grande<br />

dépendance vis-à-vis d’un financeur. Actuellement,<br />

les universités européennes dépendent<br />

pour les trois quarts de leur budget de subventions<br />

publiques. La France se situe au-dessus de<br />

cette moyenne. <strong>Le</strong> reste provient, selon les pays,<br />

des frais d’inscription, des contrats de partenariat<br />

avec des entreprises, de fonds internationaux,<br />

etc. Si les universités doivent poursuivre la diversification<br />

de leurs revenus, il n’existe pas aujourd’hui<br />

un modèle unique à suivre.<br />

Comment cela ?<br />

Il règne une grande diversité dans l’enseignement<br />

supérieur en Europe. Dès lors, il existe différentes<br />

options plus ou moins adaptées au profil de<br />

chaque université. De plus, travailler à la diversification<br />

des revenus requiert un important travail<br />

des universités elles-mêmes. Elles doivent<br />

déterminer leur stratégie, former leurs cadres et<br />

obtenir l’adhésion de leur corps enseignant. Reste<br />

deux enseignements de notre étude sur la diversification<br />

des revenus. Il existe tout d’abord un<br />

lien très fort entre l’autonomie des universités et<br />

la diversification des ressources. Responsabilisés,<br />

les établissements ont la capacité de diversifier<br />

leurs revenus et de recruter des cadres qui travailleront<br />

par exemple au rapprochement avec<br />

les entreprises. Ensuite, les Etats ont un rôle<br />

essentiel à jouer pour aider leurs universités à<br />

trouver des nouveaux revenus. L’Angleterre ou la<br />

Norvège ont développé un mécanisme d’abondement.<br />

A chaque euro collecté par une université<br />

auprès de ses anciens, ces Etats leur versent<br />

une contribution proportionnelle ou équivalente,<br />

sous réserve d’un plafond.<br />

Propos recueillis par Philippe Jacqué<br />

18 /<strong>Le</strong> <strong>Monde</strong> <strong>Campus</strong> mardi 29 mars 2011

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